La Commission Européenne a opposé son veto hier à l’OPA sur Aer Lingus de la compagnie aérienne low cost Ryanair, qui va faire appel. Michael O’Leary avait donc raison : le patron de la spécialiste irlandaise du vol pas cher avait annoncé dès le 12 février le troisième refus des autorités de la concurrence d’autoriser la prise de contrôle du transporteur national. Dans son communiqué du 27 février 2013, la Commission explique qu’elle « est parvenue à la conclusion que la concentration envisagée aurait porté préjudice aux consommateurs en créant une situation de monopole ou de position dominante sur les 46 liaisons aériennes sur lesquelles Aer Lingus et Ryanair se livrent actuellement une concurrence acharnée. Cette situation aurait réduit le choix proposé à la clientèle et, très probablement, entraîné une hausse des prix pour les passagers qui empruntent les lignes concernées ». La Commission a examiné « avec attention les mesures correctives proposées par Ryanair en cours de procédure, et a consulté les acteurs du marché à plusieurs reprises. Elle a néanmoins estimé que ces mesures n'apportaient pas de réponse satisfaisante aux problèmes de concurrence qu’elle avait relevés ». Les autorités de la concurrence ont calculé que la part de marché cumulée de Ryanair et d'Aer Lingus pour les vols court-courriers au départ de Dublin était passée de 80 % en 2007 à 87 % en 2012, le nombre de liaisons au départ et à destination de l’Irlande que les deux compagnies exploitent en concurrence étant passé pendant la même période de 35 à 46. Selon Joaquín Almunia, vice-président de la Commission chargé de la concurrence, le veto « protège les quelque 11 millions et plus de passagers irlandais et européens qui voyagent chaque année à destination ou au départ de Dublin, Cork, Knock et Shannon et pour qui le rachat d’Aer Lingus par Ryanair aurait plus que probablement été synonyme de hausse des prix ». La décision a été saluée par le PDG d’Aer Lingus Christoph Mueller, pour qui « la position de la compagnie depuis le début est que l’offre de Ryanair n’aurait jamais dû être faite ». les « remèdes inadéquats » présentés par la low cost « prouvent qu’elle n’a jamais cru à ses chances » d’obtenir le feu vert européen.  Ryanair fait appel Comme prévu, Ryanair a décidé de faire appel devant la Cour européenne de justice de Luxembourg de cette « décision politique », prise pour « se plier aux intérêts mesquins du gouvernement irlandais (actionnaire minoritaire d’Aer Lingus avec 25%) et non basée sur une application équitable et raisonnable des règles de la concurrence ». Dans un communiqué presqu’aussi long que celui de la Commission, la low cost explique avoir répondu aux arguments développés lors du veto européen à sa première tentative de fusion en 2007 : sur la cession des routes concurrentielles (35 alors, 46 cette fois), et sur l’engagement formel des repreneurs. Ryanair avait en effet passé des accords avec Flybe et British Airways, la première pour la reprise de 43 routes d’Aer Lingus au départ de l’Irlande et la seconde pour les opérations de Ryanair et Aer Lingus (3 routes) à l’aéroport de Londres – Gatwick - accords approuvés par leurs conseils d’administration respectifs. Ryanair revient évidemment sur la décision de la Commission d’accepter le rachat de BMI par IAG, qui a vu le groupe céder « seulement 12 créneaux de vols quotidiens sur six routes à l’aéroport d’Heathrow » où British Airways et BMI étaient respectivement numéro 1 et 2. L’argument de la concurrence présenté par la Commission pour justifier son veto est donc « intenable », et un signe clair que la low cost « est jugée selon des critères plus stricts que les compagnies nationales européennes ». Selon Le Monde, sur les 24 vetos opposés par la Commission Européenne à des projets de fusion, trois ont été annulés par la Cour européenne de justice de Luxembourg. Rappelons que Ryanair avait proposé en juillet 2012 694 millions d’euros pour prendre le contrôle total d’Aer Lingus, dont elle détient déjà 29,82% des parts. Outre le veto opposé en 2007 à sa première tentative de fusion, la low cost, et avait renoncé à une deuxième en 2009.