Le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence a condamné hier la compagnie aérienne low cost Ryanair à payer 200.000 euros d'amende, et près de 9 millions de dommages et intérêts pour non-respect du code du travail français dans son ancienne base de Marseille – un jugement contre lequel elle fera appel. Le verdict annoncé le 2 octobre 2013 est loin des réquisitions du parquet, qui avait demandé 225.000 euros d’amende et la confiscation de quatre Boeing 737-800, mais toutes les parties civiles se sont déclarées satisfaites à la sortie du tribunal. Parmi les dommages et intérêts, les différents organismes de la sécurité sociale recevront 4,5 millions d’euros (montant exact selon l’avocat de l’URSAFF des cotisations sociales non payées par la spécialiste irlandaise du vol pas cher), les caisses de retraites toucheront 3 millions et Pôle Emploi 450 000 euros, les syndicats de pilotes et PNC impliqués dans l’action judiciaire étant également dédommagés. Si un représentant syndical déclarait que Ryanair, « après avoir décidé d’arrêter de traiter ses passagers comme du bétail, allait peut-être en faire de même avec ses employés », l’avocate du SNPL préférait souligner que « petit à petit les compagnies à bas coûts se mettent en règle », avant d’appeler les chambres de commerce et autres élus régionaux qui subventionnent la low cost « à ne plus fermer les yeux sur le fait que Ryanair exerce son activité de manière illicite ». Ryanair comparaissait pour travail dissimulé, entrave au fonctionnement du comité d'entreprise, des délégués du personnel et du droit syndical, et emploi illicite de personnels navigants (non affiliés au régime complémentaire obligatoire de retraite), des faits remontant à la période 2007-2010 quand elle employait 127 salariés sous contrat irlandais à l’aéroport Marseille – Provence, où quatre avions étaient basés jusqu’à l’ouverture de l’information judiciaire en 2010. Le tribunal a notamment retenu le fait qu’en « refusant de se soumettre à la législation française en matière de cotisations sociales, la compagnie Ryanair a organisé un véritable dumping social lui permettant de réduire ses coûts d'exploitation et plus particulièrement ceux relatifs au personnel ». Il souligne également que les taux de charges sociales en France « sont de 40 à 45% pour l'employeur, contre 10,75% en Irlande », ce qui constitue une « concurrence déloyale vis-à-vis des autres compagnies aériennes respectant la législation nationale ». Comme elle l’avait prévenu dès les réquisitions et répété mardi, Ryanair a annoncé hier qu’elle allait faire appel : selon son porte-parole Robin Kiely, vu que « toutes les personnes qui ont opérés de/vers Marseille entre 2006 et 2010 ont déjà payé leurs charges sociales et contributions aux pensions en Irlande, et ce en parfaite conformité avec les règlementations irlandaises et européennes, nous ne croyons pas que soit Ryanair ou nos personnes pourraient être forcées de devoir repayer en doublon ces contributions en France ». Le communiqué ajoute que « par ailleurs, Ryanair et ses personnes continueront à se conformer entièrement avec les lois irlandaises et européennes, impôts et obligations de charges sociales. » La low cost croit qu’il y a une « incohérence claire entre les lois actuelles sur l’emploi européen sous lesquelles ces travailleurs irlandais ont payés leurs impôts et sécurité sociale en Irlande, et le décret français de 2006 qui cherche à exiger que les équipages opérant en Irlande payent des charges sociales et contributions de pension en France, malgré le fait qu’ils les ont déjà payés en Irlande ». Cette incohérence « peut en fin de compte être résolue par les cours européennes qui confirment la règlementation européenne sur l’emploi des travailleurs mobiles. Ryanair a l’intention de faire appel auprès des cours européennes ». Et elle précise qu’au cas où elle serait finalement forcée de devoir rembourser ces charges sociales et contributions en France, la majorité de ces contributions seront récupérables auprès du gouvernement irlandais. La low cost a d’autre part reçu sans surprise le soutien du président de la chambre de commerce de Marseille Provence, rappelant son importance pour la région : « en 2012, Ryanair a généré un impact économique total de 581 millions d'euros sur le territoire Marseille Provence », explique Jacques Pfister dan un communiqué.