Le BEA espère être en mesure de fournir « dans quelques semaines » un scénario expliquant pourquoi le MD83 de Swiftair, affrété par la compagnie aérienne Air Algérie pour relier Ouagadougou à Alger, s’est écrasé jeudi dernier dans le nord-est du Mali faisant 118 victimes dont 54 françaises. Interrogé hier par Europe1, le directeur du Bureau d’Enquête et d’Analyses (BEA) Rémi Jouty s’est déclaré « raisonnablement optimiste » sur le fait de comprendre ce qui s’est passé le 24 juillet 2014 sur le vol AH5017. Au sujet des boîtes noires, il a précisé que l’enregistreur des données de vol avait pu être lu et était en cours d’analyse, mais les dégâts causés à l’enregistreur des conversations du cockpit (« bande magnétique très fortement compressée, froissée ou rompue par endroits ») vont nécessiter au minimum quelques jours avant que cette bande puisse être reconstituée et lue. Il a d’autre part souligné que les informations sur la demande de demi-tour faite par l’équipage viennent de « rapports très préliminaires » sur les échanges avec le contrôle aérien, rappelant que la priorité est l’étude des boîtes noires « puisqu’il s’agit d’un enregistrement unique ». Rappelons que le BEA est censé remettre un premier rapport préliminaire 30 jours après un crash. Au Burkina Faso d’où était parti le vol AH5017, les enquêteurs ont dévoilé hier des images radars du trajet de l’avion, notamment ses changements de trajectoire face à la zone orageuse. Selon le général Gilbert Diendéré qui coordonne la cellule de crise à Ouagadougou, le pilote « a peut-être pensé qu’il avait complètement évité l’orage et a voulu revenir sur la droite afin de reprendre son itinéraire initial. Et c’est en faisant cette manœuvre, à ce niveau, que l’accident est arrivé ». L’avion est passé en quelques secondes de 10 000 à 7500 mètres d’altitude avant que le contact ne soit perdu, l’impact ayant lieu 3 minutes après le début de la chute « ce qui est vraiment vertigineux », explique encore le général. Sur le terrain près de Gossi, au sud-ouest de Gao, les experts français ont perdu espoir de retrouver des « corps intègres », pour reprendre l’expression du colonel de gendarmerie Patrick Touron cité par Le Parisien. Les premières constatations sur le lieu du crash l’ont « tout de suite » laissé penser que le recours aux analyses ADN serait indispensable, l’état fragmenté des corps rendant insuffisants les moyens de médecine légale classique. Et il ajoute que la chaleur et le temps jouent contre les experts, entrainant une dégradation rapide des échantillons prélevés. Plusieurs familles de victimes sont venues sur place, permettant des prélèvements sanguins qui seront utilisés pour l’identification des corps. Outre l’enquête judiciaire déclenchée automatiquement suite à l’accident, la France a nommé hier deux juges d’instruction, le Parquet de Paris précisant que l’information est pour « homicides involontaires par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ». Une qualification qui exclue d’emblée les pistes de l’homicide volontaire du terrorisme, ont souligné hier plusieurs experts.