La compagnie aérienne Air France annulera 60% de ses vols mercredi, au troisième jour de grève de ses pilotes dont les syndicats ont refusé une proposition sur la flotte de la filiale low cost Transavia. Un conflit jugé non productif par un pilote non-gréviste. Comme hier, seuls quatre avions sur dix de la compagnie nationale française prendront les airs ce 17 septembre 2014, la grève affectant la quasi-totalité des aéroports de l’hexagone comme de l’outremer – avec par exemple 540 annulations hier à CDG et Orly, et 90% des vols supprimés à Marseille, Nice ou Toulouse. Selon le syndicat majoritaire SNPL France ALPA, 75% des pilotes sont en grève (Air France estime leur nombre à 60%), et le préavis de grève jusqu’au 22 septembre ne semble pas prêt d’être levé, les deux autres syndicats SPAF et Alter ayant de leur côté ajouté deux jours supplémentaires à leur propre préavis qui court désormais jusqu’à samedi. Le PDG Frédéric Gagey disait hier sur Europe 1 avoir « senti l’inquiétude des pilotes qui imaginaient que Transavia France pouvait soudain remplacer tout Air France sur la France » : lors d’une réunion mardi, la direction a proposé de limiter l’augmentation de la flotte de Transavia à 30 appareils au lieu des 37 prévus en 2019, soit la même taille que sa compagnie-sœur hollandaise. Une proposition rejetée par les syndicats, Jean-Louis Barber du SNPL expliquant que si on limite Transavia France à trente appareils, « qu’est-ce qui va se passer ? C’est l’accélération de la délocalisation vers Transavia Europe, vers ses contrats de dumping social, ses contrats de droit étranger ». La revendication centrale des syndicats, un contrat unique pour les pilotes d’Air France et Transavia volant sur des avions de plus de cent places, n’a fait l’objet d’aucun progrès : le PDG se demandait hier à propos du contrat Transavia « pourquoi changer et rechanger à nouveau alors que ces choses-là ont été négociées il y a sept ans au moment de la création » de la low cost. Il maintient cependant que les négociations avec les pilotes continuent, même si « aucune sortie de crise n’est en vue », une réunion étant prévue ce matin avec le SNPL et le SPAF. Les syndicats tiendront aujourd’hui à 13h00 une assemblée générale des pilotes « pour montrer à la direction qu’on ne lâchera pas » selon le SPAF, aucun vote sur la poursuite du mouvement n’étant a priori prévu. La direction d’Air France évalue le coût de la grève entre 10 à 15 millions d'euros par jour, hors mesures de dédommagement. aj_cockpit landing brussels airlinesSi la direction et les syndicats s’expriment régulièrement sur le conflit, on n’avait guère entendu les pilotes qui continuent à travailler depuis le début de la semaine. Le Plus du Nouvel Obs a publié la lettre ouverte de l’un d’eux, qui s’en prend d’abord à la légitimité du mouvement (« un syndicat qui décide de mener une grève après une consultation des pilotes à laquelle 43% d’entre nous ont répondu n’est en rien légitime »), mais surtout au caractère non-productif du mouvement « d’autant plus lorsqu’il est mené sur fond de campagne électorale syndicale ». Selon lui, la grève « n’a pour seul effet que de dégrader l’image des entreprises qui en ont été victimes et ceux qui la mènent », comme vu récemment chez d’autres transporteurs (SNCM et SNCF). Un conflit sur la durée « engendrerait le discrédit de la compagnie et l’amplification de ses difficultés, elle éloignerait encore nos clients. Elle provoquerait le rejet de ceux qui la conduisent. Elle offrirait un oxygène dont ils n’ont pas besoin à nos principaux concurrents », poursuit le pilote. Il juge en outre que ses collègues ne peuvent « pas faire comme si les hôtesses, les stewards, les personnels au sol, les commerciaux n’avaient quant à eux pas consenti d’importants efforts ces derniers temps : nous ne pouvons honnêtement réduire leurs efforts en quelques jours de vols non assurés ». Parlant de provocation pour les millions de Français au chômage ou en difficultés financières chroniques, il affirme que sur l’ensemble des pilotes officiant chez Air France, « 500 ont déjà connu l’amère expérience du chômage, d’autres le sont encore et donneraient beaucoup pour être aujourd’hui aux commandes d’un Boeing 737 Transavia, aux conditions de Transavia ». Il voudrait croire que les pilotes ne sont « pas une caste qui défendrait ses intérêts au dépend de notre institution », mais doivent être acteurs du changement dans un monde qui change – et appelle donc à cesser la grève et « adopter une attitude constructive ».