Face au préavis de grève chez la compagnie aérienne TAP Portugal entre le 27 et le 30 décembre, le gouvernement a annoncé la réquisition de 70% des employés, ce qui pourrait permettre d’assurer l’intégralité du programme de vols. Tout en promettant des négociations sur tous les sujets sauf la privatisation avec les douze syndicats de la compagnie nationale si le préavis de grève est levé, le gouvernement portugais a sorti le 18 décembre 2014 une arme légale inutilisée depuis août 1997 chez TAP Portugal : la réquisition des employés. « A situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle », a déclaré le ministre de l'économie Antonio Pires de Lima qui parle d’un coût de « plusieurs centaines de millions d’euros » pour le tourisme ; son collègue aux transports Sergio Monteiro affirmant que cela permettra d’assurer « 100% des vols » pendant les quatre jours de grève (si tout le monde se présente, les absents devant présenter des justificatifs). L’argument du gouvernement est évidemment l’intérêt du public, surtout à une période où « l’immense diaspora et nos émigrés n'ont souvent pas d'autre alternative pour revenir au Portugal » que de prendre les avions de TAP Portugal. Douze syndicats de la compagnie de Star Alliance ont lancé un appel à la grève entre le 27 et le 30 décembre, pour protester contre leurs conditions de travail et surtout contre le processus de privatisation relancé le mois dernier. Ils exigent la suspension immédiate de cette privatisation, sans quoi TAP Portugal sera clouée au sol dans les aéroports du pays en pleines vacances de Noël. Avec à la clé une perte quotidienne de 8 millions d’euros, venant s’ajouter aux 25 millions déjà envolés pendant la série de conflits sociaux ayant affecté la compagnie depuis le début de l’année. TAP Portugal affirme avoir déjà vendu 130 000 places pendant cette période ; elle a suspendu les ventes de billets entre le 27 et le 30 décembre, et autorisé les changements de réservation ainsi que les remboursements sans frais ; son site internet affirme mercredi matin que plus de 10 000 passagers ont déjà contacté. Rappelons que l'état a décidé en novembre de mettre sur le marché 66% du capital de TAP Portugal, tout en gardant le reste pour au moins deux ans – une privatisation par paliers donc, qui survient après l’échec de sa tentative de vendre 100% du capital. L’état réservera 5% du capital aux employés, et en conservera un tiers pendant deux ans. Les 61% restants seront proposés aux investisseurs privés, dont quatre candidats déjà déclarés : un homme d’affaires portugais, Miguel Pais do Amaral, allié à l’ancien propriétaire de Continental Airlines, le groupe espagnol Globalia (qui possède Air Europa), la compagnie brésilienne low cost Azul de David Neeleman, et le Synergy Group de German Efromovich (qui contrôle Avianca-TACA et Avianca Brazil, et dont une première tentative de racheter TAP Portugal avait échoué en 2012). La privatisation de TAP Portugal avait été exigée par l’Union européenne et le FMI en échange du plan de sauvetage de l’économie du pays de 78 milliards d’euros lancé en 2011. Elle a dégagé l’année dernière un bénéfice net de 34 millions d’euros, en hausse pour la cinquième année consécutive. Une perspective à la quelle le PDG Fernando Pinto ne croit déjà plus pour 2014.