L’aéroport de Toronto-Billy Bishop a présenté son plan d’expansion, qui inclut l’allongement de la piste afin qu’elle puisse accueillir des jets comme le CSeries. Mais Air Canada, quasiment absente de la plateforme dominée par Porter Airlines, ne veut pas en entendre parler. Le nouveau plan directeur de l’aéroport le plus proche du centre-ville de Toronto, présenté le 31 mars 2015, vise à passer à 242 créneaux de vols quotidiens contre 202 aujourd’hui, via l’installation de nouvelles balises, antennes ILS et autres équipements – mais surtout pas l’allongement de la piste de 400 mètres (1616 mètres au total), en regagnant du terrain sur le lac Ontario. Ce qui lui permettra d’accueillir des avions à réaction, alors que seuls des appareils turbopropulsés peuvent aujourd’hui s’y poser, et de porter sa capacité de 2,4 à 5,5 millions de passagers par an. La première bénéficiaire en serait Porter Airlines, qui possède 85% des slots à Billy Bishop où elle pose ses Bombardier Dash-8 Q400, et attend ce développement depuis deux ans pour confirmer une commande de 12 CS100 (plus 18 options) à l’avionneur canadien. Problème pour l’aéroport, il est géré selon un accord tripartite valable jusqu’en 2033 qui impose un couvre-feu et limite son développement notamment concernant le bruit des avions – les jets étant interdits. Face au gestionnaire Toronto Port Authority se trouvent la ville de Toronto, et le gouvernement canadien. Porter Airlines veut tout changer ; Air Canada est carrément contre. La compagnie nationale accuse le gestionnaire « d'avantager le plan et les objectifs commerciaux de Porter Airlines, et ce, malgré l'opposition de la collectivité et d'autres transporteurs », d’ignorer toute alternative de développement pour les avions turbopropulsés et surtout de ne proposer qu’une « hausse négligeable du nombre de créneaux supplémentaires pour Air Canada et de nouveaux exploitants » (qui pourraient en outre être des opérateurs de jets privés). air-journal_Porter-Airlines-CS100La position d'Air Canada dans cette affaire « est limpide » sur son opposition à l’arrivée des jets, a déclaré Derek Vanstone, vice-président Stratégie : « nous préférerions que l'aéroport du centre-ville de Toronto connaisse une croissance axée sur les vols de passagers court-courriers assurés par appareils à turbopropulseurs, qui correspondrait davantage à l'esprit et à l'intention de l'entente tripartite originellement conclue à l'aéroport. Le plan (…) visant l'exploitation d'avions à réaction est indéfendable, puisque l'aéroport Billy Bishop peut assurément prospérer et prendre de l'expansion comme aéroport pour appareils à turbopropulseurs desservant les collectivités à deux heures de distance avec les Q400 de Bombardier assemblés à Toronto ». Le dirigeant veut donc qu’Air Canada et les autres transporteurs aient « un accès équitable et convenable aux créneaux dans l'optique de favoriser une vraie concurrence à l'aéroport Billy Bishop », semblable à ce que l'on retrouve dans les autres aéroports du pays « où Porter Airlines a la possibilité de lancer des services avec des avions à réaction à tout moment ». En manque de créneaux, Air Canada se dit « incapable de desservir plus d'un marché (Montréal), malgré la forte demande de nos clients d'Ottawa, de New York/Newark et d'autres marchés desservis par court-courriers ». Et de conclure que la limite de créneaux annoncée par l'Administration portuaire de Toronto « ne peut qu'avantager Porter Airlines et consolider sa position déjà dominante ». La compagnie de Star Alliance cite aussi d’autre problèmes comme le coût de ce programme de développement alors qu’elle souhaite un abaissement « considérable des tarifs et redevances d’aérogare » à Billy Bishop, vers les niveaux observés dans les autres aéroports du pays. M. Vanstone reconnait que « le potentiel de croissance à cet aéroport est énorme », mais affirme que « l'alignement du plan sur les intérêts d'un seul transporteur est tout simplement irresponsable, si l'on considère que (le gestionnaire) est un organisme du gouvernement fédéral dont le mandat est d'exploiter cette infrastructure publique dans l'intérêt public ». L’arrivée d’avions à réaction à Billy Bishop permettrait pourtant d’y proposer des routes jusqu’à plus de 4200 kilomètres, près de quatre fois le rayon d’action actuel – et donc concurrencer Toronto-Pearson où Air Canada est dominante, ce qui devrait être dans ce fameux « intérêt public »…