Alors que la grève des pilotes de la compagnie aérienne TAP Portugal entame aujourd’hui son septième jour, entrainant l’annulation d’environ 30% des vols en moyenne chaque jour, le gouvernement menace : si le processus de privatisation est compromis, il faudra s’attendre à des suppressions de routes et d’emplois. Entamée le 1er mai 2015 et prévue pour durer jusqu’au 10, la grève des pilotes de la compagnie nationale portugaise affecte chaque jour entre un quart et un tiers des vols programmés habituellement ; elle assure en moyenne 296 décollages quotidiens, et seulement une trentaine sont assurés systématiquement au nom du service minimum. Mais à l’approche de la date limite de dépôt des offres de rachat de TAP Portugal le 15 mai, le Premier ministre Pedro Passos Coelho a fait monté la pression hier. En cas d’échec de la privatisation, l’alternative est connue, a-t-il déclaré au Parlement : « une restructuration qui pourra seulement reposer sur de nombreux licenciements, un éventail de dessertes moins large, une réduction du matériel et par conséquent une diminution de l'activité et de l'importance de la compagnie ». De quoi transformer TAP Portugal selon lui en une « mini-TAP » qui ne serait « ni dans l'intérêt des employés, ni dans celui de l'économie, ni dans celui des Portugais ». Le conflit pourrait affecter jusqu’à 300 000 passagers et coûter 70 millions d’euros à la compagnie de Star Alliance, ainsi que 300 millions d’euros à l’industrie touristique selon ses propres calculs. Le Syndicat des Pilotes de l’Aviation Civile portugais avait annoncé le 15 avril que « plus des deux tiers des pilotes » avaient voté en faveur de cette grève, l’Etat étant accusé de ne pas avoir restitué les primes d’ancienneté (supprimées en 2011) et d’ignorer un accord d’entreprise leur attribuant entre 10 et 20% du capital en cas de privatisation. Le gouvernement « veut exclure les pilotes du processus de privatisation, et préfère brader la compagnie aérienne porte-drapeau à des intérêts privés étrangers », affirme le syndicat. Rappelons que la précédente grève des pilotes, prévue fin décembre 2014, avait été de fait annulée par l’utilisation d’une loi de « réquisition civile », pas utilisée cette fois-ci. La privatisation de TAP Portugal a été exigée par l’Union européenne et le FMI en échange du plan de sauvetage de l’économie du pays de 78 milliards d’euros, lancé en 2011. Le gouvernement met en vente 66% du groupe TAP (qui comprend également une filiale d'entretien aéronautique TAP M&E Brazil, largement déficitaire, la compagnie régionale Portugalia et 43,9% du bagagiste Groundforce), 5% de ce capital étant réservé aux employés, tandis qu’il gardera le contrôle des 34% restant. Le nom du ou des repreneurs devrait être connu fin juin; ne resteraient en course que la low cost brésilienne Azul de David Neeleman (fondateur de JetBlue Airways), et l’homme d’affaires portugais Miguel Pais do Amaral allié à l’ancien propriétaire de Continental Airlines. Globalia, propriétaire entre autres d’Air Europa, a jeté l’éponge en raison de l’endettement trop important de TAP (environ 1 milliard d’euros), tout comme le Groupe Synergy de German Efromovitch (Avianca-TACA entre autres) ou le groupe LATAM Airlines.