La compagnie aérienne Alitalia veut mettre fin en 2017 à sa coentreprise avec Air France-KLM, jugée désavantageuse maintenant qu’elle peut se restructurer avec Etihad Airways parmi ses actionnaires. Le groupe franco-néerlandais risque de perdre beaucoup de sa présence en Italie, son quatrième marché en Europe. Dans son communiqué du 19 mai 2015, la compagnie nationale italienne annonce qu’elle ne renouvellera pas en janvier 2017 l’accord de coentreprise la liant à Air France et KLM, et portant sur les liaisons passagers entre l’Italie et la France ou les Pays-Bas et au-delà, ainsi que sur la commercialisation des capacités en soute d’Alitalia Cargo par le groupe. Les accords originaux avaient été conclus en 2009 et 2010 « sous des conditions économiques bien différentes », et transférés en janvier à la nouvelle Alitalia SAI. Selon le CEO Silvano Cassano, « ces accords ne sont plus bénéficiaires commercialement ou stratégiquement à la nouvelle Alitalia et à son plan ambitieux de restructuration » ; dans leur forme actuelle ils « favorisent l’autre partie » et « freinent notre capacité à restructurer le réseau et la compagnie de façon à lui assurer une viabilité à long terme ». La première priorité pour l’Italie et Alitalia est de « regagner le tourisme entrant, tout en améliorant le service aux voyageurs d’affaires ou de loisirs italiens », ajoute le dirigeant, mais aussi « offrir des solutions de fret de haut niveau à l’industrie italienne ». La compagnie de l’alliance SkyTeam précise cependant avoir indiqué à Air France-KLM « être ouvert à des discussions pour arriver à des accords plus équitables » qui bénéficieraient de manière égale aux deux parties, un résultat jusque là impossible à atteindre. La porte n’est donc pas fermée, mais Silvano Cassano explique que « dans l'intérêt de la transparence et de la clarté pour toutes les parties concernées, nous avons jugé nécessaire d'annoncer notre intention de ne pas renouveler ces accords aux conditions actuelles ». Air France-KLM avait réduit en 2013 sa participation dans Alitalia à 7%, refusant de participer à une augmentation de capital (elle ne compte plus que pour 1%) ; l’année suivante, Etihad Airways était arrivée au secours du transporteur italien au bord de la faillite, dont elle détient désormais 49% du capital. Ce nouvel actionnaire n’est pas cité dans le communiqué d’Alitalia, mais son influence ne fait aucun doute – dans le timing, Air France-KLM étant particulièrement en pointe en Europe dans la lutte contre les « subventions » accordées aux compagnies du Golfe, comme dans le style. Une pareille annonce deux ans avant l’échéance de l’accord est interprétée plus comme une tactique de négociation que comme une volonté réelle de rupture totale. Car la coentreprise rapporte à toutes les compagnies ; et un divorce avec Air France-KLM entrainera probablement celui avec Delta Air Lines, les quatre transporteurs étant liés par un pacte transatlantique. Le groupe franco-néerlandais a publié un bref communiqué selon lequel « des négociations sont en cours pour voir comment les deux parties peuvent collaborer en Europe dans le futur ». En cas d’échec, difficile de voir comment Air France-KLM pourrait récupérer la position perdue en Italie ; l’exemple de Lufthansa, qui avait tenté d’y imposer sa propre compagnie avant de renoncer, n’est certainement pas bon signe. Et le partenariat stratégique avec Etihad Airways tant vanté par le groupe aurait aussi du plomb dans l’aile.