Les Pays-Bas ont suspendu jusqu’à nouvel ordre l’octroi de nouveaux droits de trafic aux compagnies du Golfe, accusées entre autres par Air France-KLM de bénéficier de subventions d’état et donc de représenter une concurrence déloyale. L’aéroport d’Amsterdam-Schiphol est déjà desservi par les avions d’Emirates Airlines et Etihad Airways, et Qatar Airways les rejoindra le 16 juin prochain ; ces liaisons ne sont pas remises en cause. Mais toute possibilité de croissance dans le principal aéroport néerlandais leur est désormais bloquée : le gouvernement a annoncé le 20 mai 2015 avoir gelé tout nouveau droit de trafic pour les trois transporteurs « en raison des possibles subventions publiques » qu’elles reçoivent, un gel qui durera tant que les négociations entre l’Union Européenne d’une part, et les Emirats Arabes Unis et le Qatar d’autre part, n’auront pas abouti (elles n’ont pas encore débuté). Pour la secrétaire d’Etat à l’infrastructure Wilma Mansveld, il est « inacceptable que les règles de la concurrence soient faussées dans ce secteur d'activité international » ; elle demande donc des « mesures plus sévères » contre leur montée en puissance, s’il est prouvé que les trois compagnies reçoivent bien des aides « illégales » et portant donc atteinte à la santé de la compagnie nationale KLM Royal Dutch Airlines. La décision de l’état néerlandais arrive alors que la France est soupçonnée d’avoir « échangé » des droits de trafic pour Qatar Airways contre la vente de Rafales au Qatar, accusation officiellement démentie. Etihad Airways, l’une des compagnies visées à Amsterdam, est d’autre part actionnaire d’Alitalia qui vient d’annoncer son intention d’abandonner la coentreprise avec Air France-KLM, officiellement jugée « pas équitable ». Au niveau de l’Europe, les ministres des transports ont lancé en mars dernier un projet d’accord qui verrait l’Union européenne ouvrir un peu plus son ciel contre un surplus de transparence de la part des Etats du Golfe sur leur financement du secteur aérien ; aucune date n’a été fixée sur le début des négociations.. Les compagnies américaines ont accusé Emirates, Etihad et Qatar Airways d’avoir touché 42 milliards de dollars de subventions indues ; Etihad a répliqué avec sa propre étude selon laquelle American Airlines, Delta Air Lines et United Airlines ont accumulé 71,5 milliards des mêmes subventions. Sur le fonds, la bataille entre l’Occident et le Golfe ressemble de plus en plus à celle opposant Airbus et Boeing : chacun accuse l’autre de subventions illégales qui menacerait de mort l’entreprise plaignante – et le tout traine depuis des années devant les instances du commerce mondial, qui condamne les deux avionneurs l’un après l’autre sans que rien ne change vraiment…