La Commission européenne a ouvert deux enquêtes approfondies afin de déterminer si les mesures en faveur de deux aéroports publics roumains, Cluj-Napoca et Târgu Mures, et des compagnies aériennes qui y opèrent, notamment la low cost Wizz Air, sont conformes aux règles de l’UE en matière d'aides d'État. Après les cas de Ryanair et Transavia en France, la Commission précise dans son communiqué du 31 juillet 2015 que les nouvelles enquêtes portent plus particulièrement sur les coûts de commercialisation payés à Wizz Air par l'aéroport international de Cluj-Napoca, et sur les redevances aéroportuaires peu élevées facturées par l'aéroport de Târgu Mures aux compagnies aériennes qui y opèrent. La Commission se penchera également sur les subventions octroyées par les autorités locales aux aéroports eux-mêmes. Outre Wizz Air, Cluj-Napoca accueille les avions de Vueling, Lufthansa CityLine et Tarom (plus LOT Polish Airlines en janvier prochain) ; la spécialiste hongroise du vol pas cher est la seule à desservir Târgu Mures. L’ouverture d’une procédure d’enquête donne la possibilité aux parties intéressées de faire part de leurs observations sur les mesures soumises à examen. Elle ne préjuge en rien de l’issue de la procédure. Mme Margrethe Vestager, commissaire chargée de la politique de la concurrence a déclaré à ce propos: « il règne une concurrence intense, à l'échelle paneuropéenne, dans le secteur aérien. La Commission doit donc veiller à ce que les redevances aéroportuaires, de même que les autres conditions proposées par les aéroports publics régionaux pour attirer les compagnies aériennes, ne faussent pas les conditions de concurrence sur le marché. Nos enquêtes permettront de déterminer si les mesures roumaines en faveur des deux aéroports et des compagnies aériennes sont conformes aux règles de l'UE en matière d'aides d'État ». L’aéroport international de Cluj-Napoca, deuxième aéroport roumain en importance, est exploité par une entreprise entièrement détenue par le Conseil du comté de Cluj. Près d'1,2 million de passagers l'ont emprunté en 2014. La Commission a été saisie d’une plainte alléguant que l’aéroport aurait accordé à Wizz Air des aides d’État illégales au moyen de certains accords aux conditions avantageuses, et que l’aéroport aurait lui-même bénéficié d’une aide d’État, sous la forme d'un financement public du Conseil du comté de Cluj. La Commission a donc examiné une série d'accords conclus sur la période 2007-2010 entre l'aéroport de Cluj-Napoca et Wizz Air. En vertu de ces accords, Wizz Air est rémunérée pour les services publicitaires qu'elle fournit au comté de Cluj, rémunération soumise à diverses conditions liées à sa présence et à l'importance des activités qu'elle exerce à l'aéroport de Cluj. Les accords fixent également les conditions applicables aux services d'assistance en escale fournis à Wizz Air par l'aéroport. À ce stade, la Commission craint que les clauses de ces accords ne confèrent à Wizz Air un avantage économique indu par rapport à ses concurrentes, dans la mesure où elle jouit de conditions trop favorables qu'aucun opérateur privé n'aurait accepté de lui accorder dans des circonstances similaires. [caption id="attachment_148026" align="alignleft" width="320"]©Kulja ©Kulja[/caption] La Commission cherchera également à déterminer si les subventions qui ont été octroyées à l'aéroport de Cluj-Napoca lui-même par les autorités locales sur la période 2010-2014 ont procuré à ce dernier un avantage économique indu par rapport aux autres aéroports. Elle vérifiera si l’aide potentielle est conforme aux règles de l'UE en matière d’aides d’État, et en particulier si elle contribue réellement à l’accessibilité de la Transylvanie et à la mobilité de ses habitants, et si l’utilisation des fonds publics est strictement limitée au minimum nécessaire. La Commission tiendra également compte de la proximité relative de l'aéroport de Târgu Mures, situé à 103 km et à environ 1,5 heure de route en voiture de Cluj-Napoca. Dans une enquête distincte, qu'elle a également ouverte à la suite d'une plainte, la Commission va maintenant examiner si les redevances aéroportuaires facturées à l’aéroport de Târgu Mures, qui semblent anormalement basses et prévoient des remises importantes en fonction du trafic, sont conformes aux règles de l'UE en matière d’aides d’État. L'aéroport de Târgu Mures, exploité par une société entièrement détenue par le Conseil du comté de Mures, a été emprunté par quelque 350 000 passagers en 2014. C'est essentiellement Wizz Air qui, en tant que principale compagnie aérienne opérant à l'aéroport de Târgu Mures, a bénéficié des redevances peu élevées, mais il est possible que d'autres compagnies aériennes qui y opèrent en aient également profité. À ce stade, la Commission craint que le niveau des redevances aéroportuaires ait conféré à ces compagnies aériennes un avantage économique indu par rapport à leurs concurrentes. La Commission cherchera également à déterminer si les subventions qui ont été octroyées à l'aéroport de Târgu Mures lui-même par les autorités locales depuis 2011 ont procuré à ce dernier un avantage économique indu par rapport aux autres aéroports. Elle vérifiera si l’aide est conforme aux règles de l'UE en matière d’aides d’État, et en particulier si elle contribue réellement à l’accessibilité de la Transylvanie et à la mobilité de ses habitants (compte tenu, notamment, de la proximité relative de l'aéroport de Cluj-Napoca évoquée plus haut) et si l’utilisation des fonds publics est strictement limitée au minimum nécessaire. Si la Commission reconnaît que les aéroports publics régionaux peuvent proposer des conditions intéressantes aux compagnies aériennes afin de les encourager à y exercer leurs activités et de stimuler ainsi leur trafic, ces conditions ne doivent pas aller au-delà de ce qu’un opérateur aéroportuaire guidé par la recherche d'un profit serait prêt à offrir. En ce qui concerne le financement public des infrastructures aéroportuaires, les règles de l’UE visent à éviter les subventions destinées à financer des projets qui créent des surcapacités, entraînent la multiplication d'aéroports (non rentables) dans une même zone d’attraction ou vont au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser des projets d’investissement utiles. Les lignes directrices de la Commission sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes tiennent compte du fait que les aéroports régionaux peuvent parfois utiliser des subventions pour attirer des compagnies aériennes sensibles au facteur prix et que, dans certains cas, celles-ci peuvent transférer des capacités pour bénéficier des meilleures conditions, surtout lorsque les aéroports concernés sont fréquentés par les mêmes clients. Ces subventions peuvent prendre la forme de redevances aéroportuaires peu élevées, de remises de redevances aéroportuaires, de commissions liées aux résultats («success fees») et d'aides à la commercialisation.