La FAA américaine vient de dégrader la Thaïlande en Catégorie II pour non respect des règles internationales en matière de sécurité, une décision sans surprise après le drapeau rouge infligé au pays par l’OACI en début d’année, et sans impact immédiat sur le trafic aérien. L’AESA européenne devrait rendre un verdict similaire le 18 décembre, avec des conséquences qui pourraient être bien différentes. Pas de surprise dans la décision de l’Administration Fédérale de l’Aviation (FAA) : elle explique que son audit mené en juillet 2015 a conclu que la Thaïlande « n’applique pas les standards de sécurité recommandés par l’OACI », précisant que son rôle est de s’assurer que toues les compagnies aériennes se posant aux Etats-Unis suivent ces mêmes standards. Sont en cause « l’expertise technique, la formation du personnel, les procédures d’inspection et la conservation de la documentation » - les compagnies aériennes du pays ne sont pas concernées directement. A la fin de son audit, la FAA avait donné 65 jours à la Thaïlande pour remédier aux manquements constatés, des problèmes dérivant principalement du sous-effectif et de la formation. Mais les discussions de fin octobre avec le gouvernement thaïlandais ne l’ont visiblement pas convaincue que les efforts nécessaires avaient été fournis. Le passage en Catégorie II implique qu’aucune nouvelle route ne peut être créée vers les Etats-Unis, que celles existantes ne peuvent pas être modifiées en matière d’avion utilisé, et que les accords de partage de codes sont suspendus quand opérés par une compagnie du pays visé. Cette décision n’aura pas d’impact sur le trafic, puis qu’aucun transporteur du pays ne se pose aux USA depuis le 25 octobre et l’abandon par Thai Airways de sa route entre Bangkok-Suvarnabhumi et Los Angeles via Séoul. Le président de la compagnie nationale thaïe Charamporn Jotikasthira souligne d’ailleurs qu’elle continue à proposer des vols vers les Etats-Unis « via des accords de partage de codes ou interlignes » ; en revanche United Airlines ne devrait plus proposer les vols de Thai Airways en partage de codes, une mesure qui pourrait être étendue à d’autres partenaires de Star Alliance. Car les avis de la FAA, positifs ou négatifs, ont un impact sur les autres régulateurs de l’aviation civile ; et on a vu avec quelle vitesse le Japon, la Corée du Sud ou la Chine ont réagi quand les manquements de l’aviation civile thaïe ont été mis au grand jour par l’OACI... air-journal-thai airways premier A380La Thaïlande s’inquiète en fait beaucoup plus de la décision de l’Agence Européenne de la Sureté Aérienne (AESA/EASA), le verdict de son audit étant attendu le 18 décembre : celle-ci a en effet la possibilité de placer le pays sur la liste noire de l’Union Européenne, avec plus ou moins de restrictions selon les compagnies. Thai Airways dessert en Europe les aéroports de Paris, Bruxelles, Copenhague, Francfort, Londres, Milan, Munich, Oslo, Rome (jusqu’au 31 janvier 2016), Stockholm et Zurich ; une présence importante donc, et toute sanction du pays entrainerait des pertes financières majeures pour la compagnie « à partir de 2017 » selon son président. Par ricochet Bangkok Airways, qui partage ses codes sur son réseau intérieur et régional avec de multiples compagnies étrangères dont Air France et cinq autres européennes, pourrait également en souffrir, tout comme les low cost telles que Thai AirAsia ou Nok Air dans une moindre mesure. Or l’AESA et la FAA suivent généralement les mêmes décisions : ce fut le cas pour l’Indonésie (dégradée en 2007 par la FAA et en 2008 par l’AESA) ou les Philippines (dégradée par la FAA en 2008, puis par l’AESA en 2010) – mais pas pour l’Inde (dégradée par la FAA pendant 16 mois sans que l’Europe ne bouge). Rappelons que la Thaïlande était classée en Catégorie I par la FAA depuis 1998 : le premier ministre Prayut Chan-o-cha a appelé au calme, expliquant que ce passage en Catégorie II « heurtera plus la réputation de la Thaïlande que son économie ». Son ministre des transports Arkhom Termpittayapaisith soulignait hier que le plus grave des 33 problèmes retenus par la FAA était le manque de personnel et de formation, sans oublier l’incapacité des autorités à revérifier les licences des quelques 2300 pilotes du pays dans les délais impartis. Il promet que les 28 compagnies thaïes effectuant des vols internationaux (sur 41 au total) vont être de nouveau certifiées. Les changements entrepris depuis le carton jaune de l’OACI (dont la prochaine visite devrait avoir lieu l’été prochain) étaient donc bien un chantier trop important pur être terminé en quelques mois.