Le syndicat de pilotes SNPL d’Air Austral qui a déposé un préavis de grève du 29 janvier au 1er février prochain, dénonce le double direction de la direction, cette dernière dénonçant de son côté les  véritables motifs de ce préavis de grève.

Rien ne va plus entre le SNPL d’Air Austral et sa direction. Le syndicat de pilotes annonçait vendredi dernier un préavis de grève de quatre jours, dénonçant notamment des détachements de pilotes « sans conditions » au sein de la filiale mahoraise Ewa Air, ainsi que des conditions de travail dégradées nuisant à la sécurité des vols.

La direction répliquait alors dans un communiqué, dénonçant à son tour les intentions cachées du mécontentement du SNPL. Pour elle, le motif secret de la grève est de défendre un collègue syndiqué ayant reçu un avertissement pour « faute grave ».  « L’appel à la grève, lancé depuis Paris par le SNPL Alpa National aux pilotes d’Air Austral, découle de la décision prise par la Direction Générale de la compagnie, d’adresser un avertissement à un membre de son personnel, délégué syndical du SNPL, alors que ce dernier a proféré des menaces écrites à l’encontre d’un dirigeant de l’entreprise dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 2016… Le syndicat s’appuie aujourd’hui à travers son communiqué adressé à la presse, sur des sujets annexes afin de pouvoir justifier auprès de ses adhérents, des salariés de l’entreprise et du grand public, une grève dont le sujet central ne saurait être compris, à savoir l’avertissement. »

La direction d’Air Austral précise aussi « qu’elle reste comme elle l’a toujours été, ouverte à toutes discussions allant dans le sens de l’amélioration de la qualité des relations sociales pour la bonne marche de l’entreprise au bénéfice de sa clientèle.»

« Alors que depuis trois ans nous mettons toute notre énergie à créer au sein de cette compagnie un climat social mature et équilibré, soucieux d’améliorer par ailleurs la qualité de vie au travail de chacun, ce mouvement de grève n’a pas de sens et vient fragiliser les efforts déjà effectués. Air Austral a de nombreux challenges à relever en 2016 et c’est ce sur quoi je souhaite que nous puissions nous mobiliser, pour au final proposer à nos passagers un niveau de service exemplaire, ce qui est avec la sécurité de nos vols inscrit au cœur de nos préoccupations et de nos priorités », conclut Marie Joseph Malé, PDG d'Air Austral.

Samedi 23 novembre, la balle est dans le camp du SNPL qui  répond à son tour à la direction par un long communiqué, afin de « rétablir la réalité des faits en soulignant le double discours qui est celui des dirigeants de la compagnie ». Dénonçant le double discours de la direction, le préavis de grève est maintenu du 29 janvier au 1er février.

Le communiqué du SNPL Air Austral :

Alors que la direction d’Air Austral qualifie de « sujets annexes » les motifs du préavis de grève, nous tenons à rappeler que la présence de risques psychosociaux élevés a été constatée à deux reprises au sein de la compagnie en 2012 et 2014 par les enquêtes SECAFI et « Great Place To Work ». Un audit APEX, réalisé dans le cadre de l’arrivée du Boeing 787 dans la flotte, est venu à nouveau le souligner en 2015.

Alors que le PDG d’Air Austral se prévaut de « mettre toute son énergie à créer un climat social, mature et équilibré, soucieux d’améliorer la qualité de vie au travail de chacun », nous notons qu’en un peu plus d’un an « la qualité de ces relations sociales » a fait l’objet du dépôt de trois préavis de grève – deux préavis ont été déposés à l’initiative du SNPL en décembre 2014 et janvier 2016, le troisième en juillet 2014 étant à l’appel de l’UNSA – sans oublier le dépôt par la CFDT d’une plainte devant le TGI de St Denis pour avoir été écartés des négociations alors qu’ils devaient légalement y être présents. Nous rappelons également la récente dénonciation de l’accord sur la prévention des conflits par la CFDT et l’UNSA, signataires du document, après l’enlisement du dialogue social. Nous constatons enfin que « l’ouverture d’esprit » défendue par la direction de l’entreprise est largement compromise par le grand nombre d’affaires juridiques actuellement en cours d’instruction opposant notre management à d’anciens employés comme à des salariés toujours en poste.

Comment opérer un vol sereinement lorsque l’on est menacé par sa hiérarchie de représailles sur sa carrière en cas de refus d’un détachement dans une filiale sans connaître les conditions de ce détachement ? Comment poursuivre son activité normalement lorsque l’on reçoit sans préavis ni entretien préalable une sanction à peine une heure avant de prendre les commandes de son appareil avec 400 passagers à bord ? Comment réagir lorsque votre hiérarchie, pour « faire une exemple », requiert la levée d’anonymat sur des documents rédigés à des fins d’amélioration de la sécurité des vols, en dehors de tout cadre réglementaire et en infraction avec les législations française et internationale ?

Le dépôt d’un préavis de grève n’est jamais une décision facile à prendre. Elle est ici motivée par une succession d’évènements touchant individuellement des salariés dans l’exercice de leur activité professionnelle et dont la portée est de nature à compromettre la qualité de service offerte aux passagers et la sécurité des vols.

Si, comme l’indique la direction d’Air Austral, le différend qui oppose la direction d’Air Austral au délégué syndical du SNPL est le motif principal de l’appel à la grève, comment alors expliquer que le dépôt du préavis ait reçu le soutien quasi unanime des autres organisations professionnelles présentes dans l’entreprise ?

Le SNPL a toujours placé la sécurité des vols et la qualité de vie au travail au centre de ses priorités. Les pilotes sont les garants de la sécurité à bord ; un environnement serein est la condition du bon fonctionnement d’un cockpit, loin des pressions hiérarchiques. Le double discours tenu par les dirigeants d’Air Austral a conduit les relations sociales au sein de l’entreprise dans une impasse. Les « challenges de 2016 à relever par la compagnie » ne sauraient l’être sans un changement radical des méthodes de management existantes.

C’est pourquoi le SNPL maintient son préavis de grève du 29 janvier au 1er février 2016.