Airbus va pouvoir vendre ses avions à l’Iran, tout comme Boeing d’ailleurs, après la levée du veto des autorités financières américaines. Mais l’OMC a jugé illégales les subventions reçues par l'avionneur de la part de l’Union européenne, y compris celles perçues pour le programme A350XWB. Airbus a annoncé le 22 septembre 2016 avoir reçu le feu vert du Trésor américain concernant le contrat signé en janvier dernier avec la compagnie aérienne Iran Air, et portant sur 118 avions dont douze A380 et seize A350XWB (réduit depuis à 112 avions). Un contrat estimé à l’époque à 25 milliards de dollars au prix catalogue, mais qui était bloqué depuis par les autorités américaines en raison des deux licences demandées puisque tous les Airbus comportent de nombreuses pièces originaires des Etats-Unis. Une seule a été accordée hier, portant sur « 17 avions pour des livraisons anticipées », apparemment des A320 et A330, l’autre licence devant l’être dans les prochaines semaines. Boeing avait également annoncé un contrat avec l’Iran en juin dernier, portant sur 80 commandes fermes et 29 appareils supplémentaires pris en leasing. L’avionneur américain a reçu une licence hier, sans plus de détails, et confirme être « en négociation » avec Iran Air. Le Trésor américain a spécifié hier que ces licences contiennent « des conditions strictes pour s’assurer que les avions seront utilisés exclusivement à des fins commerciales, et ne peuvent ni être revendus, ni transférés ». Interrogé par la presse iranienne, le vice-ministre des routes et du développement urbain Asghar Fakhriyeh Kashan a de son côté affirmé que les discussions avec Boeing « ont commencé après celles avec Airbus, mais devraient déboucher plus vite » sur un accord, la « structure » de ces négociations étant plus simple que celle des Européens. Des émissaires de Boeing seraient selon lui attendus à Téhéran dès la semaine prochaine pour pousser à la finalisation du contrat. Mais cette « avance » pourrait fondre selon nombre d’experts en raison de la frilosité du secteur bancaire américain, coincé par une campagne électorale qui a vu Donald Trump promettre de rompre l’accord nucléaire avec l’Iran et remettre en cause la levée des sanctions internationales. air-journal_Airbus A350 MSN3 usineSi les deux avionneurs peuvent souffler, Airbus a perdu une bataille hier dans l’interminable guerre qu’ils se livrent depuis 2004 devant l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à propos des subventions étatiques. L’OMC a en effet jugé que l’Union européenne n’a « pas réussi à se mettre en conformité » avec ses précédentes préconisations en matière d’aides publiques : les aides perçues par l’avionneur européen, en particulier par des prêts bonifiés, sont donc jugées illégales, y compris les 4 milliards de dollars versés pour le développement du programme A350XWB. Airbus a tenté de relativiser la portée du rapport, expliquant qu’il devait « seulement apporter des changements limités dans les politiques et pratiques européennes » pour se conformer au rapport de l’OMC, et affirmant l’avoir fait « dans le délai convenu ». Il se dit confiant dans le fait que le sujet des prêts sera réglé lors de l’appel qu’il devrait déposer contre le dernier jugement en date (l’UE devrait également faire appel). Boeing a immédiatement crié victoire, affirmant que le jugement de l'OMC « confirme que l’UE n’a pas rempli ses obligations pour remédier aux 17 milliards de dollars perçus en aides aux lancements et autres subventions », et qu’Airbus a perçu « près de 5 milliards de dollars de nouvelle aides illégales pour lancer l’A350 ». L’avionneur américain estime que la décision ouvre la voie pour que les Etats-Unis « cherchent à obtenir jusqu'à 10 milliards de dollars par an en droits de douane compensatoires sur les importations européennes ». Le représentant américain au commerce extérieur Michael Froman évoque une « immense victoire », sans toutefois évoquer des représailles puisque des appels peuvent encore être déposés. Rappelons que l’OMC doit aussi se prononcer sur les accusations d’Airbus, selon qui Boeing a entre autres bénéficié de « subventions massives » pour lancer le programme 777X (8,7 milliards de dollars versés par l’Etat de Washington). Le système de garanties et allégements fiscaux accordés par les USA à l’avionneur américain a en outre été jugé illégal par l’OMC selon Airbus, contrairement au système européen d’aides remboursables. La guerre fiscale risque de continuer longtemps.