Après un long parcours dans l’aérien (entre autres, Directeur Régional et Directeur Marketing d’AOM, Air Liberté, Star Airlines) et le tourisme (marketing Look Voyages), Olivier Moracchini dirige aujourd’hui VCA, le leader français de l’animation des ventes BtoB dans le secteur du tourisme. Il est aussi Président et co-fondateur de The Bridge, société spécialiste de la relation commerciale dans les secteurs du tourisme et du transport. Il nous livre une réflexion sur l’indemnisation des voyageurs dans le secteur du voyage : une exacerbation des tendances consuméristes ? Une carence dans la prise en compte (et en charge) des consommateurs ? Un marché qui devient lucratif pour certains ? La gestion des litiges devient primordiale pour les acteurs du tourisme Nous assistons au développement exponentiel du consumérisme, c’est-à-dire, la prise de conscience par les consommateurs qu’ils ont des droits (à commencer par le droit au respect) et qu’ils peuvent exprimer leur mécontentement et demander des indemnisations quand le service rendu n’est pas conforme à la promesse du vendeur. Si cette tendance se vérifie dans le secteur tertiaire, l’industrie du voyage est fortement impactée. Que ce soit les compagnies aériennes, les croisiéristes ou encore les tour-opérateurs et agences de voyages, c’est l’ensemble des acteurs du tourisme qui est confronté, entre autres, à des retards voire annulations, correspondances manquées, surbooking, délogement, etc. Décomplexé, le consommateur réclame plus facilement qu’auparavant si le service est défaillant. L’indemnisation des voyageurs préoccupe donc plus que jamais les acteurs du tourisme, notamment dans le secteur de l’aérien, particulièrement touché. Un marché qui se structure avec l’arrivée de nouveaux acteurs Le transport aérien est devenu un laboratoire pour certaines entreprises : afin d’aider (ou stimuler) les passagers exposés aux problèmes (retards, annulations, etc.) des sociétés se sont créées dans le but de les assister dans leur démarche. Le passager confie la gestion de sa réclamation à une de ces sociétés. Celle-ci prend contact avec la compagnie aérienne concernée, et en s’appuyant sur les lois, règlements européens et jurisprudence, demande une réparation financière. En échange du service rendu, les sociétés retiennent entre 25 et 30 % des sommes récoltées. Et le transport aérien ne semble être qu’une première étape (la plus « facile » car des règles strictes d’indemnisation doivent être appliquées selon plusieurs critères) avant que ce type d’actions ne s’applique aux autres secteurs du tourisme (et les tour-opérateurs peuvent trembler : délogement, modifications de dernières minutes, charters annulés, … seront autant de réclamations à venir). Protection du client + réclamations = gros profits Les réseaux d’agences de voyages se disent maintenant que ces sociétés peuvent apporter un vrai service à leurs clients. Plusieurs réseaux (et pas des moindres) ont signé des accords qui prévoient qu’en cas de retard ce soient ces sociétés qui prennent directement contact avec les clients des agences pour apporter leur soutien ou leur conseiller de réclamer. Et pourquoi pas ? Le client n’a rien d’autre à faire qu’acquiescer, la société se charge donc de porter la réclamation. Le client aurait réclamé tout seul (une simple lettre suffit ou, mieux, remplir un formulaire spécifique présent sur le site internet de la compagnie), il récupérait 100% de l’indemnisation… Ici, la société prend entre 25 et 30 % de la somme dite et en reverse une petite somme au réseau d’agences de voyages qui a donné les contacts des passagers. Mais finalement, qui est responsable ? Oui, des sociétés (appelées communément des officines) gagnent bien facilement de l’argent, mais peut-être faudrait-il s’interroger sur le service après-vente rendu par certaines compagnies aériennes. Oui, le nombre de réclamations explose, oui les passagers sont exigeants, et oui, les « officines » poussent le bouchon parfois trop loin. Mais le magazine 60 millions de consommateurs a un jour publié un article sur le sujet. Un tableau y indiquait le délai moyen de réponse (ou de résolution) à un litige par compagnies. Les délais s’étalaient de 60 jours (« à peine » indiquait le magazine…) à… 266 jours ! Alors ? Alors finalement cet emballement peut avoir une répercussion favorable : obliger les compagnies aériennes à accepter l’idée qu’un client reste un client, même après l’arrivée de son vol. D’une certaine façon, les compagnies le savent ; ne serait-ce que parce qu’elles attribuent des miles aux passagers à l’issue de leurs voyages. D’une autre façon, il y a du travail…