La compagnie aérienne Air France a détaillé le projet d’accord envoyé aux syndicats de pilotes SNPL et SPAF à propos du projet Boost, un accord ouvert à la signature a priori jusqu’au 24 février. Elle met dans la balance le recrutement de quelque 200 pilotes ainsi que plus d’un millier pour les PNC, mais les représentants de ces derniers appellent les premiers à un refus global. A l’issue de quinze journées de négociation depuis décembre, la direction de la compagnie nationale française a adressé le 9 février 2017 un projet d’accord aux deux organisations représentatives des pilotes, le SNPL et le SPAF. Il est ouvert à la signature jusqu'au 24 février, Air France précisant dans son communiqué que ce délai pourra être prolongé « si une consultation des pilotes était décidée par les organisations professionnelles » - le résultat du référendum déjà organisé par le SPNL étant attendu en début de semaine prochaine. Ce projet d’accord « permet la création de la Nouvelle Compagnie, filiale à 100% d’Air France », ce projet Boost devant permettre à Air France de « reprendre l'offensive sur le long-courrier et défendre le réseau d'alimentation de son hub » à l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle, « avec des coûts moins élevés » : - La Nouvelle Compagnie sera détenue par Air France et ne pourra être vendue. Les droits de trafic resteront Air France. - Les vols de la Nouvelle Compagnie seront opérés par des pilotes d’Air France avec les règles d’utilisation et de rémunération d’Air France. Ceci implique la mutualisation sur l’ensemble de la population pilotes des réductions de coûts « pilotes » liées à Boost ; - Des mesures de productivité et d’amélioration de l’efficacité, définies par la négociation, assurent la réduction des coûts pilotes liés à Boost mais contribuent aussi à la compétitivité d’Air France ; - Un mécanisme, associé à un engagement de progression des effectifs pilotes sur la période, est par ailleurs mis en place afin de maîtriser les éventuelles augmentations de coût unitaires pilotes ; - Un compromis sur la majoration des heures de nuit permet de solder définitivement Transform ; - Le projet d’accord garantit que la flotte de la Nouvelle Compagnie ne dépassera pas 18 avions moyen-courrier et 10 avions long-courrier. Le projet d’accord prévoit également qu’un mécanisme de « profit sharing », sous la forme d’un supplément d'intéressement, sera proposé dès 2017 pour tous les collaborateurs d’Air France; il sera conditionné aux résultats de l’entreprise. Air France rappelle son ambition de lancer le premier vol moyen-courrier de la nouvelle compagnie à l’automne 2017, avec des Airbus de la famille A320 ; sur le long-courrier, la nouvelle compagnie sera lancée pendant la saison été 2018 en A340, remplacés l’année suivante par des A350. « Ce projet d’accord est un compromis équilibré qui reflète l’état d’esprit constructif dans lequel nous avons conduit ces négociations. Il doit nous permettre de construire l’avenir d’Air France, avec les pilotes et l’ensemble des salariés de l’entreprise, sur la base d’un projet de croissance durable et de reconquête », a déclaré Franck Terner, Directeur général d’Air France. Il a plus tard précisé que la mutualisation des efforts pour l’ensemble des pilotes permettra un gain de « 1,5% de productivité », et que l’accord sur les heures de nuit visait à solder « définitivement » Transform 2015. Soulignant les concessions faites par Air France pour trouver un accord avec les pilotes sur le projet Boost, le dirigeant a rappelé le recrutement promis de 200 pilotes par an, dont la moitié pour compenser des départs à la retraite. Le syndicat de pilotes majoritaire SNPL Air France ALPA a regretté l'arrêt des négociations, estimant que l'accord n'est « pas signable en l’état ». Pour le président du syndicat Philippe Evain cité par Europe 1, « au-delà même des divergences de fond, le projet de texte n'est pas abouti », a-t-il insisté, « à la fin, ce qui est sur la table ressemble furieusement à ce qui y était au début ». Son porte-parole Emmanuel Mistrali a indiqué que lors du conseil du 22 février, il pourrait être décidé de lancer une nouvelle consultation tenant compte du projet d’accord présenté hier. Pour le président du SPAF Grégoire Aplincourt, le projet d’accord est « un peu fourre-tout » : il estime déplacée la mention du solde de Transform, estimant que « si on veut faire une compagnie, on s'en donne les moyens, ce n'est pas en capitalisant sur le passé qu'on va y arriver ». Le communiqué d’Air France se conclut par une référence aux négociations de l’accord collectif PNC avec les syndicats représentatifs des hôtesses de l’air et stewards : l'objectif est de finaliser un nouvel accord avant fin février, échéance de l'accord actuel. Franck Terner a affirmé que « plus d’un millier » de PNC seront recrutés pour la nouvelle compagnie. Un message interprété autrement par l’intersyndicale SNPNCUNSA-PNC selon qui avec le projet Boost « c'est clairement notre activité de PNC Air France qui est dans le collimateur ». Evoquant « la manipulation et les mensonges de la Direction », les syndicats qui avaient déjà déclaré il y a deux jours leur opposition au projet expliquent que « grâce aux passerelles PNT entre les deux compagnies, l'exploitation d'une grande partie des lignes d'Air France pourra progressivement et massivement être opérée par des PNC low cost. Pendant ce temps, nous, PNC Air France, continuerons à voir nos coûts exploser puisqu'il n'y aura quasiment plus d'embauches de jeunes PNC à AF pour venir compenser nos salaires, encore plus importants du fait de notre ancienneté́ qui continuera d'avancer. Notre soi-disant ‘cherté’ est donc entretenue artificiellement par nos dirigeants en refusant d'embaucher de jeunes PNC à Air France, et en faisant ces embauches de jeunes chez Boost ». Le scénario est clair pour les deux syndicats : dans 5 ans, « on nous annoncera que nous sommes définitivement trop chers et qu'il faut que l'on aille travailler chez Boost, aux conditions de Boost, ou alors que l'on baisse tous nos salaires de 30 % ». L'intersyndicale PNC sera reçue aujourd’hui par le Président Jean-Marc Janaillac : à l'issue de cette rencontre, « deux voies sont possibles : soit l'Entreprise recule sur ce projet sordide destiné à exterminer les PNC Air France, soit.... LA GUERRE ! ». Le SNPNC a d’ailleurs publié une lettre ouverte aux pilotes, expliquant que « l’esprit d'équipage est encore vivant à Air France, mais pour combien de temps avec ce plan dévastateur pour nos populations? » Il dénonce une « ostracisation programmée » des PNC Air France, qui ont pourtant montré « à travers plus de 80 ans d'existence, que la Compagnie Air France, notre Compagnie, a su résister et que le travail conjointement mené entre les PNT et les PNC a permis de conserver l'excellence et l'efficacité ». Pour le syndicat, le danger du projet Boost ne va faire que « renforcer certaines tensions, déjà parfois palpables » entre Pilotes et Hôtesses et Stewards et « entretenues par la Direction ». Il en appelle dont à « vous, cher(e)s Pilotes », de choisir de « sauvegarder cette cohésion des navigants qui fait la force d'Air France », et de ne pas accepter « la découpe de notre Compagnie et sa filialisation ».