L’intersyndicale représentant tous les corps de métier de la compagnie aérienne Air France agite la menace de nouvelles grèves en septembre si aucun accord n’est trouvé sur les salaires. Et ce avec ou sans nouveau PDG.

Alors qu’ils avaient suspendu leur mouvement suite à la démission du PDG Jean-Marc Janaillac, après avoir mené quinze jours de grève depuis février, les syndicats de pilotes (SNPL, SPAF, Alter), du personnel au sol (CGT, FO, SUD) et d’hôtesses de l’air et stewards (SNPNC, UNSA-PNC, CFTC, SNGAF) a tiré le 23 juillet 2018 un premier coup de semonce. « Avec ou sans PDG, dès le mois de septembre pour ne pas pénaliser nos passagers pendant l’été, le conflit pour les salaires reprendra. Et seul un accord pourra y mettre fin », conclut le communiqué d’hier qui s’en prend à l’absence de nomination d’un nouveau dirigeant. Le processus de nomination « traine en longueur car aucun plan de succession n’a été anticipé par le conseil d’administration » d’Air France-KLM, malgré les promesses de la présidente par intérim Anne-Marie Couderc  qui s’était « avant mi-juillet engagée personnellement à chercher un mandat afin de traiter en urgence la question salariale». Le CA est d’ailleurs la cible de toutes les railleries des syndicats, qui dénoncent « une faiblesse structurelle de taille » et l’accusent de ne pas savoir « surmonter les situations de crise. Cette incapacité fait de lui la risée de toute la sphère médiatique et économique ».

Pour les dix syndicats, le Conseil d’administration du groupe prend ce faisant « la lourde responsabilité d’enfoncer Air France un peu plus dans la crise ». Quel est l’intérêt de « fragiliser ainsi notre entreprise », demandent-ils en dénonçant une accumulation de fautes commises – y compris les mauvais choix dans l’exploitation qui « se paient cash et se traduisent par 139 vols annulés sur le dernier mois ». Et d’inviter le CA à « envoyer le message (…) qu’Air France est effectivement dirigée » : « il peu, donc il doit permettre l’aboutissement d’un accord sur les salaires (par ailleurs tout proche) ». A défaut, il lui faudra prendre la responsabilité des « prochaines turbulences qui ne tarderont pas à survenir ».

On sait déjà que le nouveau patron d’Air France sera nommé en septembre, le comité de nomination continuant sa recherche de l’oiseau rare après l’abandon des pistes concernant la PDG de la RATP Catherine Guillouard et Philippe Capron de Veolia. Mais le modèle de gouvernance n’a toujours pas été arrêté, même si le principe d’un président non-exécutif d’Air France-KLM associé à un CEO et chapeautant les dirigeants des deux compagnies aériennes serait en voie de s’imposer. Le comité de nomination consulterait « beaucoup plus » les actionnaires Delta Air Lines et China Eastern Airlines, tandis que le COMEX d’Air France a lui voté en faveur du patron de KLM Pieter Elbers (qui aurait refusé).

Rappelons que l’intersyndicale réclame une augmentation générale des salaires de 5,1% dès 2018 (plus 4,7% supplémentaires pour les pilotes), avec +3,8% au 1er avril (rattrapage d’inflation 2012-2017) et +1,3% en octobre (inflation prévisionnelle de 2018). Ces revendications auraient été abaissées durant les négociations avant le CCE du 14 juin, à une hausse des grilles de salaires de 4% en 2018 et du montant du niveau de l’inflation en 2019 (hors avancement automatique).

En face, Air France avait officiellement revu à la hausse l’augmentation de 1% qui n’avait été signée que par deux syndicats (CFDT et CFE-CGT représentant 31,3% des voix du personnel) : sa proposition d’accord portait sur une augmentation générale de 2% en 2018, assortie d’un seuil minimum de 25 euros par mois, puis une autre augmentation générale de 5% pour 2019, 2020 et 2021 (1,65% par an), assortie d’un seuil minimum de 40 euros par mois. Les salaires seraient selon la direction ainsi augmentés de 12,5% en moyenne sur la période (comprenant une augmentation générale de 7% pour toutes les catégories de personnel et les augmentations individuelles/GVT) ; mais ce « pacte de croissance » prévoyait d’adapter l’augmentation dans le cas où le résultat d’exploitation d’Air France serait inférieur à 200 millions d’euros, et d’appliquer une clause de revoyure en cas d’inflation plus élevée ou de résultat négatif. Le rejet par 55% de l’ensemble du personnel de ces propositions avait entrainé la démission du PDG d’Air France-KLM Jean-Marc Janaillac.

Air France sous la menace de grèves à la rentrée 1 Air Journal