La Commission européenne a traduit la France devant la Cour de justice de l'Union européenne pour ne pas avoir récupéré les aides « incompatibles avec le marché intérieur » dont ont bénéficié la compagnie aérienne low cost Ryanair et sa filiale Airport Marketing Services (AMS) dans les aéroports de Pau, Nîmes et Angoulême, ainsi que Transavia à l'aéroport de Pau. Dans son communiqué du 27 juillet 2015, la Commission rappelle ses décisions prises en juillet 2014, qui imposaient à la France de récupérer auprès de ces compagnies aériennes un montant d'aide incompatible avec le marché intérieur de près de 10 millions d’euros au total. En effet, « grâce à divers arrangements contractuels et commerciaux », ces deux compagnies aériennes payaient des montants inférieurs aux surcoûts liés à leur présence dans l’aéroport, et bénéficiaient de ce fait d’un « avantage économique injustifié qui doit être récupéré pour remédier à la distorsion de concurrence qui en découle ». Sur la base des informations dont la Commission dispose actuellement, la France n’a pas totalement récupéré les aides incompatibles avec le marché intérieur dans le délai imparti de quatre mois. Les autorités françaises ont envoyé les ordres de récupération, mais n'ont pas été en mesure de les exécuter en droit interne, ces ordres ayant été attaqués en justice par les bénéficiaires. En vertu d'une disposition de droit français, les ordres de récupération sont automatiquement suspendus en cas de recours. Toutefois, cela va à l'encontre de la jurisprudence existante sur l’exécution des décisions de récupération par les États membres, qui empêche les juridictions nationales d'appliquer ce type de dispositions lorsqu’elles doivent statuer sur des recours formés contre des ordres de récupération. La Commission a donc décidé de traduire la France devant la Cour européenne de justice pour garantir la pleine mise en œuvre de ses décisions en matière d'aides d'État. Ryanair a également fait appel de deux des trois décisions de la Commission (concernant Angoulême et Pau) devant le Tribunal de l’Union européenne. En vertu du droit de l'UE, ces recours n'ont pas non plus d'effet suspensif, si bien que la France reste tenue de récupérer les aides incompatibles avec le marché intérieur. Les aides dont ont bénéficié les deux low cost sont détaillées : la Commission a imposé à la France de récupérer 0,87 million d’euros pour Angoulême (auprès de Ryanair et d'AMS conjointement), 2,8 millions d’euros pour Pau (0,42 million d’euros auprès de Ryanair, 1,97 million d’euros auprès de Ryanair et d'AMS conjointement et 0,43 million d’euros auprès de Transavia) et 6,3 millions d’euros pour Nîmes (auprès de Ryanair et d'AMS conjointement). Les États membres « ont l'obligation de récupérer les aides d'État déclarées incompatibles avec le marché intérieur par la Commission dans les délais fixés par la décision de cette dernière. Cette obligation est très importante parce que tout retard dans la récupération d'aides illégales fait perdurer la distorsion de concurrence induite par celles-ci », explique la Commission. Ryanair a publié ce mardi une brève réaction: « les trois cas font l'objet d'un appel, et la question du remboursement n'interviendra qu'une fois la procédure menée à son terme ». Selon l'article 14 du règlement (CE) n° 659/1999, les États membres procèdent immédiatement et effectivement à la récupération des aides auprès des bénéficiaires. En particulier, selon la jurisprudence Scott (C-232/05), toute disposition juridique faisant obstacle à l'exécution effective et immédiate de la décision de récupération de la Commission doit être laissée inappliquée. Si un État membre n'exécute pas une décision de récupération, la Commission peut saisir la Cour de justice en vertu de l’article 108, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), lequel permet à la Commission de traduire directement les États membres devant la Cour pour violation des règles de l'UE en matière d'aides d'État. Et si un État membre ne se conforme pas à l'arrêt de la Cour de justice, la Commission peut demander à cette dernière d'infliger à celui-ci le paiement d'astreintes en vertu de l'article 260 du TFUE.