La compagnie aérienne Air France a confirmé la restructuration de son réseau long-courrier, avec baisse de capacité de 10% entre 2015 et 2017, fermeture de 5 lignes et suppression de 2900 postes. Sept personnes ont été blessées, dont une gravement, quand des manifestants ont interrompu le CCE Air France va déposer plainte pour violence aggravée suite aux incidents provoqués par des salariés qui ont interrompu le Comité Central d’Entreprise le 5 octobre 2015 à l’aéroport de Paris-CDG. Un vigile est sorti du coma dans l’après-midi, un autre ayant été blessé plus légèrement tout comme cinq membres de la direction dont le DRH Xavier Broseta « qui a manqué de se faire lyncher » selon un syndicaliste, et le responsable de la compagnie à Orly Pierre Plissonnier ; les deux dirigeants ont pu s’échapper en escaladant une grille, chemises déchirées. Plusieurs centaines de manifestants s’étaient pourtant réunis dans une ambiance plutôt bon enfant devant le siège d’Air France pour protester contre les mesures attendues dans le cadre de Perform 2020, avec pour la première fois dans l’histoire de la compagnie la perspective de licenciements secs. « Choqué et déçu » mais refusant de « jeter l’opprobre sur l’ensemble du personnel » Xavier Borseta est revenu dans l’après-midi présenter les mesures adoptées par la compagnie de l’alliance SkyTeam. Un communiqué signé du PDG Frédéric Gagey les a détaillées, tout en condamnant avec la plus grande fermeté les violences physiques survenues en marge de ce Comité Central, et qui sont le fait d'individus isolés particulièrement violents. Ces événements n'altèrent en rien la volonté de la direction de poursuivre à tout moment les discussions avec les partenaires sociaux pour la mise en œuvre la plus efficace et constructive de son redressement, précise Air France qui face à l’impossibilité de signer des accords permettant la mise en œuvre de mesures de productivité conduisant à un retour pérenne à la rentabilité, est donc amenée à lancer un plan de restructuration de son réseau long-courrier. aj_aeroport roissy air franceLes capacités long-courrier d’Air France devraient baisser de l'ordre de 10% entre 2015 et 2017. A l’échelle de l’activité passage réseaux d’Air France-KLM, les capacités devraient baisser d’environ 2% entre 2015 et 2017, contre une croissance d’environ 3% précédemment anticipée. Le plan prévoit aujourd'hui, d’ici 2017, la fermeture de 5 lignes et l’arrêt de 35 fréquences hebdomadaires long-courrier. Les modifications du programme seront concentrées sur les lignes les plus déficitaires du réseau, desservant principalement l’Asie et le Moyen-Orient, sans pour autant affecter l’empreinte commerciale du Groupe grâce notamment aux nombreux partenariats sur les marchés concernés. La flotte long-courrier d’Air France sera réduite de 14 avions, passant de 107 avions opérés à l’été 2015 à 93 à l’été 2017. Cet ajustement sera principalement réalisé par la sortie accélérée d’Airbus A340, non remplacés par les Boeing 787 initialement prévus. Sur les seules années 2016 et 2017, la réduction des investissements liée à ces décisions pourrait atteindre jusqu’à 200 millions d’euros Cette baisse d’activité génèrera un sureffectif estimé à 2 900 personnes, dont environ 300 pilotes, 900 Personnel Navigants Commerciaux et 1 700 personnels au sol. Dans les secteurs où les concertations/négociations permettent d’atteindre les objectifs de Perform 2020, l’adaptation des effectifs se fera sous la forme de départs volontaires. Dans les autres secteurs, le recours aux départs contraints ne pourra être exclu. Des charges de restructuration seront enregistrées une fois arrêtés le rythme et les modalités des départs. air-journal_air france klmLa réduction ciblée du réseau d'Air France, centrée sur les lignes les plus déficitaires et conjuguée avec la baisse des coûts fixes d'une part, les mesures d'économie au sein de toutes les activités d'Air France comme dans l'ensemble du Groupe d'autre part, permettront de poursuivre le redressement durable des résultats du Groupe. Air France-KLM maintient l’ensemble de ses objectifs financiers fixés pour 2017 dans le cadre du plan Perform 2020 : réduction des coûts unitaires de 1,5% par an en moyenne sur la période 2015-2017, un ratio de dette nette ajustée sur EBITDAR autour de 2,5 en 2017, une génération de cash-flow libre chaque année par les activités de base. Alexandre de Juniac, Président-directeur général d’Air France-KLM, a déclaré : « Nous déplorons qu’aucun accord avec les syndicats de personnels navigants d'Air France n’ait été trouvé. Le redressement de la compagnie ne pourra s’accomplir que grâce à la mobilisation de tous ses personnels. La direction d’Air France reste disponible à tout moment pour reprendre les négociations avec ses syndicats. Nous restons déterminés à mettre en œuvre les adaptations indispensables pour assurer la pérennité d’Air France et lui permettre de financer son développement ». Après des réactions à chaud sur le ton du « on déplore mais… », les syndicats d’Air France ont publié des communiqués plus apaisés. Le SNPL Air France ALPA, majoritaire chez les pilotes, « condamne ces débordements contre les dirigeants de la compagnie » mais aussi « la répression violente de la manifestation des salariés pourtant calme et sereine. Il demande aux parties prenantes que sont le gouvernement et la direction d’Air France de remettre très rapidement en place les conditions d’un dialogue social apaisé ». Il signe d’autre part aux côtés de onze autres organisations un texte revenant sur la journée de lundi (sans toutefois la CFE-CGC, premier syndicat de l’entreprise). Selon cette intersyndicale, « ce jour les salariés de l’entreprise se sont exprimés à travers toute la France. Plusieurs cortèges réunissant l’ensemble des catégories du personnel d’Air France se sont retrouvés ce matin devant le siège social de la compagnie, puis se sont dirigés vers l’aérogare 2 de Roissy. Réunis afin de revendiquer le maintien de l’emploi et du savoir-faire AF au sein de l’entreprise à laquelle tous les salariés sont attachés, les participants à ce cortège ont défilé pacifiquement ». C’était une « occasion de battre en brèche les clivages entre catégories de personnel savamment entretenus par la direction d’Air France et ses relais. Une belle unité également pour réaffirmer les liens de solidarité qui font le socle historique et social de notre entreprise. Ce socle est indispensable pour garantir la chaîne de sécurité de nos passagers », souligne l’intersyndicale. « Au-delà d’Air France même, ce sont des dizaines de milliers d’emplois du bassin Francilien, de province et des DOM qui sont concernés par les restructurations en cours, ainsi qu’une contribution à hauteur de 2,5 % du PIB français ». « Les salariés ont réagi aux annonces du Président d’AF faites au cours du Comité Central d’Entreprise. Ils dénoncent les décisions de réduction de l’activité alors même que l’entreprise redevient profitable (résultat attendu de l’ordre de 400 M d’euros) dans un secteur d’activité en forte croissance. Les salariés ont également réagi à la menace de transférer notre activité, soit les flux de passagers, à la partie hollandaise de l’entreprise par le hub d’Amsterdam avec les conséquences en termes d’emploi et de perte de la richesse produite », poursuit le texte. Pour ces syndicats, « Air France n’est pas seulement un fleuron industriel mais aussi un vecteur de la culture et de la diplomatie française de sorte que le gouvernement ne saurait se désintéresser de la manière dont notre entreprise est gérée. Or, un dialogue social consternant et la succession de plans d’austérité ont fait perdre la maigre confiance que les salariés pouvaient conserver en leurs dirigeants. Aujourd’hui, avec pour seul bagage une politique RH exclusivement réductrice d’emplois et des coups d’éclat médiatiques, la Direction n’est pas parvenue à convaincre les personnels. Seul un projet industriel fondé sur un développement fédérateur et ambitieux pourra susciter l’adhésion de l’ensemble des salariés d’Air France ». L’intersyndicale demande aussi « un engagement fort du gouvernement sur la préservation d’un contexte concurrentiel équitable est crucial », tout en rappelant que « la solution aux problèmes d’AF sera issue d’une concertation entre les parties que sont les organisations professionnelles, l’équipe dirigeante et le gouvernement dont les arbitrages sont une des clefs principales pour garantir un avenir à la compagnie. Cette concertation devra porter sur la stratégie de développement de l’entreprise, le maintien de l’emploi et les capacités d’investissements ». Côté gouvernement justement, le Premier ministre Manuel Valls et le secrétaire d’état aux transports Alain Vidalies se sont déclarés scandalisés par des violences « inacceptables » et qui « doivent être condamnées ». Avant de réaffirmer leur soutien à la direction d’Air France. La FNAM a elle aussi condamné « avec la plus grande fermeté ce comportement qui date d’un autre âge. En cette période particulièrement difficile pour la compagnie Air France et plus généralement pour l’ensemble des compagnies aériennes françaises, la FNAM en appelle au respect d’autrui et apporte son soutien au management de l’entreprise ».