Une enquête menée par les compagnies aériennes American Airlines, Delta Air Lines et United Airlines accuse les transporteurs du Golfe Persique Emirates Airlines, Etihad Airlines et Qatar Airways d’avoir touché au total 42 milliards de dollars de subventions de la part de leurs états respectifs entre 2004 et 2013. Elles demandent donc aux autorités américaines des mesures de protection. Les détails de cette enquête menée pendant deux ans ont été dévoilés le 5 mars 2015 par les trois plus grandes compagnies américaines, alliées pour l’occasion aux syndicats de pilotes et de personnel de cabine. Le dossier de 55 pages affirme avoir les preuves que les subventions versées par les Emirats Arabes Unis et le Qatar ont permis à leurs transporteurs respectifs de financer « une expansion massive » et ont « distordu la concurrence », contrairement aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Etihad Airways et Qatar Airways n’auraient pas pu survivre sans ces subventions, avance encore le rapport pour qui tout cela s’est fait « au détriment des compagnies américaines et de pays tiers ». Emirates Airlines aurait ainsi reçu des « subventions non quantifiables » lors de l’achat pour 11 milliards de dollars de biens et de services auprès de sociétés étatiques, à des prix avantageux. Elle aurait aussi bénéficié de 2,4 milliards de dollars quand l’état à endossé les pertes dues à de mauvaises couvertures sur le carburant, et 2,3 milliards de dollars par la subvention d’infrastructures aéroportuaires (total 15,7 milliards de dollars). Etihad Airways aurait bénéficié de 6,6 milliards de dollars en prêts gouvernementaux non remboursables, de 6,3 milliards d’injection de capital par l’état, de 3,4 milliards de dollars en 2014 en investissement étatique non déclaré, de 751 millions de dollars en dons et de 501 millions de dollars en exemption de taxes d’aéroport (total 17,5 milliards de dollars). Qatar Airways aurait touché 8,4 milliards de dollars en prêts et avances d’actionnaire non remboursables, 6,8 milliards en subventions via des garanties d’emprunt, 616 millions de dollars en exemption de taxes d’aéroport et 452 millions de dollars en terrain gratuit (total 16,3 milliards de dollars). Outre ces subventions chiffrées, le rapport explique que les trois compagnies du Golfe Persique « économisent plusieurs milliards de dollars par année en interdisant la présence de syndicats », ce qui explique la présence de représentants américain du personnel : pour ces syndicats, les subventions menacent l’emploi voire la survie des transporteurs américains, accusées par leur rivale de ne perdre des parts de marché que pour cause de produits et services inférieurs. air-journal_American-Airlines-New_787American Airlines, Delta Air Lines et United Airlines demandent donc au gouvernement américain d’ouvrir des « consultations » sur l’accord de ciel ouvert signé avec les Emirats Arabes Unis et le Qatar, afin de limiter leurs capacités vers les USA et interdire l’ouverture de nouvelles liaisons. « Nous sommes favorables à la concurrence et soutenons les politiques de ciel ouvert, qui ont apporté de grands bénéfices à l'économie mondiale et à des millions d'Américains », a affirmé le PDG de Delta Air Lines Richard Anderson, « mais ces subventions sapent l'esprit de ces accords de ciel ouvert et nuisent à la concurrence ». Il y a deux semaines, il assimilait les compagnies des Emirats Arabes Unis aux terroristes du 11 septembre avant de s’excuser, les compagnies du Golfe ayant affirmé que leurs rivales américaines avaient elles aussi bénéficié de subventions sous la forme de garanties de prêts et de protection contre la faillite suite aux attentats de New York… Interrogé hier, le PDG d’Emirates Airlines Tim Clark a dit ne pas avoir pris connaissance de l’intégralité du rapport. Il va se rendre à Washington pour y plaider sa cause. Rappelons que sa compagnie a publié une étude sur les bienfaits apportés à l’économie européenne, où les trois compagnies du Golfe font face à des accusations similaires. Le rapport complet des compagnies américaines, en anglais, est disponible par exemple ici (bas de page, PDF titré « Restoring Open Skies »).