L’intersyndicale représentant tous les corps de métiers au sein de la compagnie aérienne Air France n’a pas annoncé de nouvelle grève hier, reportant au CCE de jeudi sa prochaine communication.

Un membre de la CGT avait bien essayé de faire monter la pression le 24 aout 2018, annonçant : « on va se poser la question de savoir si on relance la grève ou pas. Il y a de fortes probabilités que ce soit le cas ». Mais c’était avant le début de la réunion des neuf syndicats représentant les pilotes (SNPL, Alter), les hôtesses de l’air et stewards (SNPNC, UNSA-PNC, CFTC, SNGAF), et le personnel au sol (CGT, FO, SUD). Et cette réunion n’a accouché que d’un bref communiqué, expliquant que l’intersyndicale « reste mobilisée pour la défense de (ses) revendications. Un rattrapage de 5,1% de nos salaires, dans les plus brefs délais, correspondant à l’inflation 2012/2017. Une déclaration unitaire sera lue au Comité Central d’Entreprise le jeudi 30 aout ». Pas un mot donc sur l’éventuelle poursuite du mouvement qui avait entrainé quinze jours de grève depuis février dernier chez Air France, pour un coût d’environ 350 millions d’euros. Ce n’est pas vraiment une surprise puisque les syndicats n’ont toujours personne avec qui négocier ou discuter, le nom du futur directeur général de la compagnie française n’ayant pas été dévoilé (le départ de Franck Terner semble se confirmer).

Mais une « source syndicale » expliquait hier sur BFMTV que « petit à petit, on fait monter la pression » : « Jeudi, on va donner une date d’ultimatum: soit la direction lance des signaux forts, soit on repart dans le conflictuel ». En gros le message envoyé par le SNPL AF mi-aout, avant même l’officialisation de la nomination de Benjamin Smith comme CEO du groupe Air France-KLM : le syndicat majoritaire chez les pilotes de la compagnie française expliquait alors que le futur dirigeant devrait reprendre les négociations sans quoi il y aurait « quinze jours de grève » en plus de ceux déjà menés (le président du syndicat Philippe Evain avait ensuite nié avoir mentionné ce nombre). L’intersyndicale avait très mal pris l’arrivée du numéro 2 d’Air Canada : elle juge « inconcevable que la compagnie Air France, française depuis 1933, tombe dans les mains d’un dirigeant étranger dont la candidature serait poussée par un groupe industriel concurrent (Delta Air Lines pour ne pas le citer) ». Dans un contexte où « chaque pays cherche à défendre âprement ses intérêts économiques et ceux de ses entreprises, où la présidence Trump montre elle-même avec quelles armes la guerre économique va se mener, le choix d’un candidat doit se porter sur la défense des intérêts de notre compagnie nationale ». Et le montant annoncé de son salaire, en gros trois fois supérieur à celui de son prédécesseur, avait attisé cette colère.

Ben Smith doit prendre ses fonctions d’ici la fin septembre, avec un président non-exécutif à ses côtés, et nul ne sait quand la nouvelle gouvernance du groupe sera finalisée. Air Canada rappelle sur son site qu’il a été « le négociateur principal au cours des négociations collectives du transporteur avec les deux syndicats représentant les pilotes et les agents de bord, négociations qui ont mené à la conclusion d’accords historiques de dix ans ». Un point qui a son importance alors que le groupe est aussi sous la menace d’une grève des pilotes de KLM,

Rappelons que les 5,1%  mentionnés hier correspondent à la revendication initiale des syndicats d’augmentation générale des salaires (plus 4,7% supplémentaires pour les pilotes), avec +3,8% au 1er avril (rattrapage d’inflation 2012-2017) et +1,3% en octobre (inflation prévisionnelle de 2018). Ces revendications auraient été abaissées durant les négociations avant le CCE du 14 juin dernier, à une hausse des grilles de salaires de 4% en 2018 et du montant du niveau de l’inflation en 2019 (hors avancement automatique) – mais cela n’est probablement pas avouable alors que les négociations vont repartir sur des bases forcément nouvelles.

En face, Air France avait officiellement revu à la hausse l’augmentation de 1% qui n’avait été signée que par deux syndicats (CFDT et CFE-CGT représentant 31,3% des voix du personnel) : sa proposition d’accord portait sur une augmentation générale de 2% en 2018, assortie d’un seuil minimum de 25 euros par mois, puis une autre augmentation générale de 5% pour 2019, 2020 et 2021 (1,65% par an), assortie d’un seuil minimum de 40 euros par mois. Les salaires seraient selon la direction ainsi augmentés de 12,5% en moyenne sur la période (comprenant une augmentation générale de 7% pour toutes les catégories de personnel et les augmentations individuelles/GVT) ; mais ce « pacte de croissance » prévoyait d’adapter l’augmentation dans le cas où le résultat d’exploitation d’Air France serait inférieur à 200 millions d’euros, et d’appliquer une clause de revoyure en cas d’inflation plus élevée ou de résultat négatif. Le rejet par 55% de l’ensemble du personnel de ces propositions avait entrainé en mai la démission du PDG d’Air France-KLM Jean-Marc Janaillac.

Air France : pas de nouveau préavis de grève pour l’instant 1 Air Journal