L’aéroport de Marseille-Provence multiplie les initiatives pour atteindre son objectif de neutralité carbone en 2030 – sur les émissions qu’elle peut maitriser.

Dans un « contexte sanitaire, social et environnemental chamboulé », la plateforme marseillaise dit n’avoir d’autre choix que de « s’adapter, et donc de  redéfinir ses orientations de développement ». Aujourd’hui de nombreux projets sont en train de voir le jour, dont le début des travaux d’un nouveau bâtiment labélisé HQE (haute qualité énergétique, comme le T1 depuis 2016), ou ceux visant à « tendre vers l’autosuffisance énergétique » : une nouvelle centrale de production thermo frigorifique, la géothermie, et l’installation de 40 hectares de panneaux photovoltaïques notamment.

La lutte contre le changement climatique est présentée comme « un axe majeur de la stratégie de croissance vertueuse » du gestionnaire Aéroport Marseille Provence (AMP), qui participe au programme Airport Carbon Accreditation d’ACI Europe depuis 2013 (et en cinq ans a diminué ses émissions de 50%). La stratégie vise désormais à devenir « Net Zero Carbone » d’ici 2030, via des projets et investissements variés qui permettront « la diminution de 90% des émissions par rapport au niveau d’avant-crise sur le périmètre de l’aéroport ».

Et afin d’aller plus loin et agir sur les émissions indirectes de CO2 (98% du total des émissions), AMP travaille avec les compagnies aériennes pour les inciter à faire venir des avions dernière génération, moins polluants et moins bruyants, ainsi qu’avec les pouvoirs publics pour développer les transports en commun notamment.

La nouvelle centrale de production thermo-frigorifique de 1200 m2 sur deux niveaux permet par exemple d’alimenter en chauffage depuis le 13 octobre et en climatisation depuis le 16 juillet), l’ensemble des bâtiments recevant du public (tous les aérogares jusqu’au Fret). Les travaux ont duré un an pour un investissement de 11 millions d’euros, et permettent à l’aéroport de faire une économie de près de 35% de gaz naturel (pour le chauffage). Ce qui équivaut selon AMP à un gain de 700 tonnes / an de CO2, soit l’équivalent des émissions de chauffage annuel de 222 logements. Un tiers des besoins énergétiques nécessaires à la production d’eau chaude sera obtenu par récupération de la “chaleur fatale” générée par la production de froid. Cette centrale  est également plus sobre, avec une économie de 40% de la consommation électrique pour la production de froid ; « l’autre intérêt non négligeable » est qu’elle permet également de réduire de 40% la consommation d’eau à 14.000 m3, « sans compter que grâce à la mise en place d’équipements performants, nous nous affranchissons de tous les risques liés à la légionnelle ». L’aéroport est alimenté 100% en électricité verte avec garantie d’origine depuis 2018, issue de sources d’énergie renouvelable.

Le projet de géothermie est d’accueillir sur la plateforme une entreprise spécialisée, avec une station qui d’ici 2024 puisera l’eau chaude du sous-sol ou des nappes souterraines, grâce à un forage et utilisera la chaleur extraite pour le chauffage des bâtiments de l’aéroport. L’installation permettra à l’aéroport de réduire sa dépendance aux énergies fossiles (gaz naturel), baissant de 80% les émissions de CO2 liées au chauffage (et de moitié par rapport à 2019).

Depuis 2019, l’aéroport s’est lancé dans un processus de reconversion de ses véhicules vers l’électrique : plus d’une dizaine sont déjà actifs, une vingtaine d’autres devant s’y ajouter d’ici la fin de l’année. AMP prévoit également d’équiper « d’ici les prochaines années » ses parkings en bornes de recharge à destination des employés de la plateforme et des passagers. Des études sont d’autre part menées pour installer 25 hectares d’ombrières photovoltaïques  sur les parkings, puis progressivement 15 hectares supplémentaires sur d’autres parties du  site. L’installation devrait débuter en 2023. L’électricité produite sera prioritairement « autoconsommée sur site » pour les besoins d’AMP  et des acteurs de la plateforme. Le surplus de production électrique par rapport à nos consommations instantanées sera injecté sur le réseau. Cela permettra également de limiter la sollicitation du réseau RTE pour les besoins énergétiques de la plateforme, faisant d’AMP « un contributeur à la transition énergétique nationale ».

Mais 98% des émissions totales de Marseille-Provence sont d’origine indirecte, et l’aéroport doit travailler avec les compagnies aériennes pour les réduire. Cela est déjà passé par la mise en place d’une alimentation électrique, moyen de substitution partiel aux APU (groupe auxiliaire de puissance embarqué) pour alimenter en électricité les avions au sol. 100% des 27 postes « au contact » en sont équipés, depuis 2013 pour le T1 et depuis 2019 pour le T2. Grâce à ce dispositif, près 1000 tonnes/an de CO2 sont ainsi évitées, « soit l’équivalent de 500 allers-retours Paris New-York pour deux personnes ».

Aujourd’hui, AMP veut attirer les avions de dernière génération, moins polluants et bruyants, même si cela « ne dépend pas exclusivement de nous ». L’aéroport propose par exemple une modulation de la redevance d’atterrissage selon les performances acoustiques des aéronefs, les avions les moins bruyants devant payer l’atterrissage moins cher que ceux les plus bruyants. Les mouvements d’avion de dernière génération ou peu bruyants « sont ainsi passés de 6% en 2019 à 12% en 2021 », souligne l’aéroport de Marseille, avec parmi les plus « vertueuses » les compagnies Air Corsica, Pegasus, Ethiopian Airlines, Turkish Airlines, Royal Air Maroc, Lufthansa et Binter.

L’aéroport de Marseille se veut modèle de développement durable 1 Air Journal

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