L’Association du transport aérien international (IATA) et la firme Tourism Economics ont publié un aperçu à long terme de la demande du secteur passagers après la pandémie de Covid-19, tablant sur un retour dès cette année à plus de la moitié du trafic de 2019 – et au dépassement de ses niveaux en 2023. En attendant, les voyageurs vont devoir s’armer de patience : un possible chaos dans les aéroports est redouté, à moins que les gouvernements adoptent rapidement les passeports sanitaires et autres mesures liées à la crise sanitaire.

Les prévisions publiées par l’IATA le 26 mai 2021 indiquent que les gens sont désireux de voyager à court terme et à long terme. Pour que l’aviation puisse « dispenser ses bienfaits sociaux et économiques de façon durable » en répondant à cette demande, il est selon l’IATA essentiel que les gouvernements « accentuent leur soutien à l’efficience des opérations et favorisent une transition énergétique efficace ». Voici les faits saillants de la prévision :

  • En 2021, le nombre total de passagers devrait atteindre 52% de ce qu’il était avant la Covid-19 (2019).
  • En 2022, le nombre total de passagers devrait atteindre 88% de ce qu’il était avant la Covid-19 (2019).
  • En 2023, le nombre total de passagers devrait dépasser (105%) le nombre d’avant la Covid-19 (2019).
  • D’ici 2030, le nombre total de passagers devrait atteindre 5,6 milliards. Cela serait inférieur de 7% à la prévision établie avant la crise sanitaire, et constituerait une « perte estimée de 2 à 3 ans de croissance due à la pandémie ».
  • Au-delà de 2030, les voyages aériens devraient ralentir, en raison d’une plus faible démographie et de l’hypothèse de base d’une libéralisation limitée du marché, ce qui se traduirait par une croissance annuelle moyenne de 3,2% de 2019 à 2039 (contre 3,8% prévus avant la crise sanitaire pour cette période). Le rétablissement du nombre de passagers « est légèrement plus fort que la reprise de la demande mesurée en kilomètres-passagers payants (RPK) », laquelle devrait connaître une croissance annuelle moyenne de 3% de 2019 à 2039. Cela s’explique par la force des marchés intérieurs comme celui de la Chine, où le nombre de passagers est élevé et les distances sont moindres.

« Je suis toujours optimiste lorsqu’il s’agit de l’aviation. Nous traversons la crise la plus profonde et la plus grave de notre histoire. Mais la croissance rapide de la population vaccinée et les progrès en matière de dépistage vont nous redonner la liberté de voler dans les mois qui viennent. Et lorsque cela se produira, les gens vont vouloir voyager », a déclaré dans un communiqué Willie Walsh, directeur général de l’IATA. Mais il ajoute : « le défi immédiat réside dans la réouverture des frontières, l’élimination des mesures de quarantaine et les certificats de vaccination et de test gérés numériquement. En même temps, nous devons nous assurer que les prévisions de croissance à long terme de l’aviation sont soutenues par un engagement indéfectible envers la durabilité. Les deux défis exigent que les gouvernements et l’industrie travaillent en partenariat. L’aviation est prête. Mais les gouvernements ne bougent pas assez vite ».

Les dommages causés par la crise de la Covid-19 « se feront sentir durant des années », rappelle l’IATA, mais tout indique à court terme que les gens ont conservé leur besoin et le désir de voyager :

  • Toute évocation de la réouverture des frontières donne lieu à une augmentation instantanée des réservations. Le plus récent exemple en est le bond de 100 points de pourcentage des réservations du Royaume-Uni vers le Portugal lorsque la « liste verte » du Royaume-Uni a été publiée en mai.
  • L’économie est forte et elle peut alimenter la croissance des voyages. Le niveau de la production industrielle en février 2021 dépassait de 2% la production de février 2019.
  • Les consommateurs ont accumulé de l’épargne durant le confinement, dans une proportion qui dépasse parfois 10% du PIB.
  • Les taux de vaccination des pays développés (avec l’exception notable du Japon) devraient dépasser 50% de la population d’ici le troisième trimestre de 2021.

« Cela devrait appeler les gouvernements à se préparer. Le secteur des voyages et du tourisme contribue au PIB de façon majeure. Les moyens de subsistance des gens sont en jeu. Pour éviter des dommages économiques et sociaux à long terme, le redémarrage ne doit pas être retardé. Les gouvernements peuvent faciliter une reprise sécuritaire par des politiques qui permettront des voyages sans restriction pour les personnes vaccinées, et des solutions de dépistage pour celles qui ne peuvent recevoir le vaccin. Les gouvernements doivent aussi se préparer au moyen de processus de gestion numérique des certificats de vaccination ou de test, pour s’assurer que la reprise est non seulement sécuritaire, mais également efficiente », selon M. Walsh.

Dans l’immédiat, l’IATA veut prévenir d’un « possible chaos dans les aéroports », à moins que les gouvernements adoptent rapidement des processus numériques pour gérer les preuves de santé (certificats de test et de vaccination contre la Covid-19) et les autres mesures associées à crise sanitaire. Avec des conséquences « graves » si ce n’est pas le cas :

  • Avant la COVID-19, les passagers consacraient en moyenne environ une heure et demie aux processus de voyage pour chaque trajet (enregistrement, sécurité, contrôles frontaliers, douanes et récupération des voyages).
  • Les données actuelles indiquent que les délais de traitement dans les aéroports sont passés à trois heures durant les heures de pointe, alors que le volume de trafic n’est qu’environ 30% de ce qu’il était avant la crise. Les plus importantes augmentations sont à l’enregistrement et aux contrôles frontaliers (émigration et immigration), où les preuves de santé sont vérifiées, principalement en format papier.
  • Les modèles suggèrent que sans amélioration des processus, le temps passé à subir les processus aéroportuaires pourrait atteindre 5,5 heures par trajet, avec un trafic égal à 75% de ce qu’il était avant la pandémie, voire à 8 heures par trajet avec un trafic atteignant 100% du niveau de 2019.

« En l’absence de solution automatisée pour les vérifications associées à la Covid-19, il existe un potentiel de perturbation importante dans les aéroports. Déjà, les temps moyens d’attente et de traitement des passagers ont doublé par rapport à ce qu’ils étaient en période de pointe avant la crise, atteignant le chiffre inacceptable de trois heures. Et ce, alors que plusieurs aéroports déploient le même nombre d’employés qu’avant la crise, pour une petite fraction du nombre de voyageurs. Personne ne peut tolérer une attente de plusieurs heures pour l’enregistrement ou les formalités frontalières. Nous devons automatiser la vérification des certificats de test et de vaccination avant que le trafic ne reprenne en force. Les solutions techniques existent. Mais les gouvernements doivent s’entendre sur des normes de certificat numérique et harmoniser leurs processus d’acceptation. Et ils doivent agir rapidement », affirme Willie Walsh

Au cours des deux dernières décennies, les voyages aériens ont été selon l’IATA « réinventés afin que les passagers aient le plein contrôle de leur trajet grâce à des processus en libre-service », ce qui leur permet d’arriver à l’aéroport pratiquement « prêts à voler ». Et avec la technologie numérique, les contrôles frontaliers se sont aussi orientés de plus en plus vers le mode libre-service en utilisant des portes électroniques (dont Parafe en France par exemple). La vérification de documents papier relatifs à la Covid-19 « obligerait les voyageurs à revenir aux processus manuels d’enregistrement et de contrôle frontalier, lesquels présentent déjà des difficultés même avec le faible volume de passagers », rappelle l’association.

IATA : optimisme sur la reprise malgré les files d’attente 1 Air Journal

©IATA

Les discussions du G7, qui débuteront le 11 juin, constituent la prochaine occasion pour les principaux gouvernements de mettre au point une solution axée sur quatre gestes clés : délivrer des certificats de vaccination basés sur les normes de données du certificat de  vaccination intelligent de l’OMS, incluant les codes QR ; délivrer des certificats de test de la Covid-19 conformes aux exigences de données établies  par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) ; accepter les certificats numériques de test de COVID-19 et de vaccination à leurs frontières ; et enfin lorsque les gouvernements exigent que les compagnies aériennes vérifient les documents de voyage, ils devraient accepter l’utilisation des applications pratiques pour les voyageurs afin de faciliter le processus – comme le Travel Pass de l’IATA bien sûr…

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