Sur les 780 aéroports étudiés par ACI Europe, moins de 10 étaient rentables l’an dernier. Et tout restauration de leurs revenus aux niveaux d’avant la pandémie de Covid-19 reste lointaine, des pertes massives étant encore attendues alors que la reprise du trafic aérien est faible en revenus.

Les aéroports européens sont confrontés « au double défi de la reprise et de la décarbonation dans une réinitialisation complète du modèle économique », a résumé le 26 octobre 2021 l’association aéroportuaire lors de l’ouverture de son 31eme Congrès annuel à Genève. Son directeur général Olivier Jankovec a passé en revue l’impact de la crise sanitaire sur les aéroports, à commencer par ce qu’il considère être une faiblesse financière systémique. Avec un chiffre d’affaires total et un EBITDA encore inférieurs au premier semestre par rapport à l’année dernière (-52%, et -65% par rapport à 2019 pour les CA, -121% par rapport à 2019 pour les EBITDA), et une reprise du trafic aérien à la fois coûteuse et faible en revenus, de nombreux aéroports européens « devraient à nouveau enregistrer des pertes massives cette année », explique ACI Europe.

Et avec un soutien financier des États limité et des opportunités de réduction des coûts presque épuisées, « ils n’avaient d’autre alternative que de recourir à l’endettement », nécessaire pour maintenir des niveaux de liquidité acceptables et continuer à fonctionner. La dette des aéroports européens a donc « explosé, augmentant de 200% par rapport aux niveaux d’avant la pandémie ».

En ce qui concerne l’avenir, la perspective de voir les revenus des aéroports restaurés aux niveaux d’avant la pandémie « est lointaine ». Il ne s’agit pas seulement de la lente reprise des volumes de trafic, estime l’association, mais aussi de la pression croissante des compagnies aériennes sur les redevances aéroportuaires et des « réponses inadéquates des régulateurs et des gouvernements sur le niveau de ces redevances ».

Pour Olivier Jankovec, les aéroports européens sont « confrontés à une crise des investissements, qui affectera leur capacité à financer la décarbonisation et la numérisation – ainsi que la capacité nécessaire. L’analyse que nous avons publiée juste avant l’été a révélé que les recettes aéroportuaires resteront insuffisantes pour couvrir les coûts d’investissement bien après la reprise complète du trafic passagers – au moins jusqu’en 2032. Le fait que 15 des plus grands exploitants d’aéroports européens aient déjà réduit les investissements prévus de près de 14 milliards d’euros entre 2020 et 20233 est une sonnette d’alarme ».

La montée et la domination des compagnies à très bas prix, menés par Ryanair et Wizz Air en Europe, combinées à des transporteurs de réseau réduits mais plus agiles, « une hybridation accrue et l’inévitabilité de la consolidation des compagnies aériennes ne signifieront qu’une seule chose : des pressions concurrentielles sans précédent sur les aéroports européens. Cette réalité est en marche et ne vous y trompez pas, elle aura un impact sur tous – de nos méga hubs jusqu’à nos plus petits aéroports régionaux ».

Ces évolutions du marché se mêlent à l’impératif de décarbonation de l’aviation, que les aéroports européens ont pleinement adopté avec leurs partenaires industriels – une décarbonation « qui fera grimper les coûts et induira un rythme de croissance du trafic plus lent que d’habitude », un « défi majeur » selon ACI pour des entreprises dépendantes du volume comme les aéroports.

La pandémie de Covid-19 « a mis fin à l’illusion que les aéroports sont des entreprises sans risque. Ils sont désormais confrontés au double défi de la récupération et de la décarbonation – et ils doivent adapter leur modèle économique en conséquence. Avec cela viendra une pertinence et une acceptation sociétales renouvelées que notre communauté aéroportuaire est plus que prête à rencontrer », souligne Olivier Jankovec. « Mais ne nous faisons aucune illusion ici, ce ne sera pas un voyage facile à venir alors que nous nous remettons de pertes catastrophiques et d’insuffisances flagrantes dans le cadre de réponse financière et gouvernementale qui aurait pu être déployé avec des résultats très différents. Sur les 780 aéroports de notre empreinte, moins de 10 étaient rentables l’an dernier ».

Aéroports européens : pas d’amélioration à l’horizon 1 Air Journal

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