Selon Eurocontrol, organisme de surveillance du trafic, le mouvement social mené par les contrôleurs aériens français les 3 et 4 juillet a entraîné un coût estimé à 120 millions d’euros -47 millions d’euros pour les retards et 73 millions pour les annulations de vols.

La grève, initiée par deux syndicats minoritaires d’aiguilleurs du ciel, a impacté plus d’un million de passagers en Europe. Parmi eux, 200 000 n’ont pas pu voyager comme prévu à cause des annulations. Eurocontrol précise que 1 422 vols ont été annulés chaque jour de grève, soit 4,7% des départs prévus. Et 3 713 vols quotidiens ont subi des retards, représentant 10,7% des départs programmées. Dans les aéroports Paris-Orly et Paris-CDG, au total 1 200 vols annulés ont impacté 125 000 passagers, soit l’équivalent d’une journée complète de trafic aérien à Paris-Orly, selon Philippe Pascal, PDG du groupe ADP (Aéroports de Paris).

Sur environ 1 000 contrôleurs aériens de service, 272 ont débrayé les 3 et 4 juillet. Le mouvement a été lancé par l’Unsa-Icna, deuxième syndicat de la profession, rejoint par l’Usac-CGT. Les revendications des grévistes portent sur un sous-effectif chronique, source de retards en période estivale, des outils jugés obsolètes et un management jugé inadapté aux exigences de sécurité.

Comment expliquer cette situation française ? Elle s’explique en partie par un retard dans la modernisation du contrôle aérien. Alors qu’en Suède, une seule tour de contrôle suffit pour tout le pays grâce à la technologie, la France en compte près de 80, sans possibilité de relais entre elles en cas de dysfonctionnement. Les contrôleurs aériens français perçoivent environ 8 000 euros par mois, un salaire inférieur à celui de leurs homologues européens. Cependant, ils travaillent en moyenne 155 jours par an, contre 211 jours en Allemagne et 220 jours en Angleterre. Beaucoup travailleraient à 80% du temps prévu, grâce à un système de « clairances » permettant des absences lorsque le trafic aérien le permet.

Cette organisation a parfois conduit à des situations d’absentéisme problématiques. En décembre 2022, un incident grave à l’aéroport Bordeaux-Mérignac a failli provoquer une collision entre un Airbus A320 d’easyJet, avec 179 passagers à bord, et un avion de tourisme DR400, faute de personnel suffisant dans la tour de contrôle. L’enquête du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) a révélé que seuls trois contrôleurs aériens étaient en poste sur les six prévus, après une réduction des effectifs décidée dans le cadre du système de « clairances ». À la suite de cet incident, une réforme est en cours pour instaurer un système de pointage à la prise de poste des contrôleurs aériens. Cette mesure, contestée par certains syndicats, vise à garantir une présence suffisante et à renforcer la sécurité du trafic aérien.

En tout cas, ce dernier mouvement social met en lumière les défis structurels du contrôle aérien français, entre modernisation nécessaire, gestion des effectifs et exigences de sécurité. Les syndicats Unsa-Icna et Usac-CGT n’ont pas donné d’indication sur la suite du mouvement, alors que le ministre français chargé des Transports, Philippe Tabarot, a exclu de céder aux revendications « inacceptables » des grévistes, rappelant qu’une « une augmentation de 7% a déjà été accordée l’année dernière » aux aiguilleurs du ciel français.

La dernière grève des contrôleurs aériens français a coûté 120 millions d'euros, selon Eurocontrol 1 Air Journal

@DR/AJ