La Grande Bretagne compte à l’occasion du Brexit sortir son régulateur CAA de l’Autorité européenne de la sécurité aérienne (EASA), et s’occuper toute seule de la certification des avions. Au grand dam de l’industrie locale.

Lors d’un voyage à Washington la semaine dernière, le Secrétaire britannique aux transports Grant Shapps a déclaré à Aviation Week que la sortie du pays de l’Union européenne – a priori le 31 décembre 2020 – entrainera « après une période de transition » celle de la Civil Aviation Authority (CAA) de l’EASA. Et ce afin d’assumer la responsabilité de la certification des avions et des régulations sur la sécurité aérienne, a expliqué le dirigeant politique qui devait rencontrer des officiels américains. « Une grande partie de l’expertise dont ils disposent est en fait l’expertise britannique. Un grand nombre des principaux phares étaient des Britanniques », a-t-il déclaré à propos de l’agence européenne.

Des négociations avec l’agence européenne basée à Cologne seraient déjà en cours ; le Royaume Uni n’étant plus soumis à la loi européenne et étant considéré comme « pays tiers » par l’EASA depuis janvier (il ne prend plus part aux décisions), « les pouvoirs reviendront à la CAA, qui est probablement l’un des principaux régulateurs mondiaux (…) mais nous le ferons de manière progressive », a-t-il déclaré : le pays cherchera alors « la reconnaissance mutuelle des certifications dans les accords bilatéraux avec d’autres pays et blocs ».

A Londres, la réaction a été immédiatement négative de la part d’ADS qui représente plus de 1100 entreprises britanniques dans les secteurs de l’aérospatiale, de la défense, de la sécurité et de l’espace, avec 111.000 emplois à la clé ; Son directeur général Paul Everitt é déclaré à Aviation Week : « Nous avons clairement indiqué que la participation continue à l’AESA est la meilleure option pour maintenir la compétitivité de notre industrie aérospatiale de 36 milliards de livres sterling et notre accès aux marchés d’exportation mondiaux ».

Pour le responsable, l’influence du Royaume-Uni au sein de l’AESA « contribue à élever les normes de l’aviation mondiale, soutient la collaboration avec nos partenaires internationaux et contribue à rendre notre industrie attrayante pour l’investissement dont elle a besoin pour accueillir le développement d’une nouvelle génération de technologie d’avions de pointe ». Et il rappelle que le gouvernement britannique avait promis « qu’il envisagera une harmonisation là où cela est dans l’intérêt du Royaume-Uni, et sera guidé par les preuves sur l’avenir de la réglementation de la sécurité aérienne. Nous sommes déçus qu’il n’ait pas adopté une approche plus ambitieuse ».

L’EASA n’a pas encore réagi à cette annonce ; elle doit décider début juillet si la transition d’un an accordée à la CAA (toujours présente mais sans droit de décision donc) doit être prolongée d’une année supplémentaire. Difficile pourtant de ne pas voir dans l’annonce de Grant Shapps l’écho des déclarations du premier ministre Boris Johnson, qui évoque régulièrement un Brexit dur et souligne sa volonté de signer au plus vite un accord bilatéral avec les USA. Une possibilité qui serait facilitée si la CAA s’alignait automatiquement sur la FAA ?

Rappelons que la question du Brexit agite aussi les compagnies aériennes : certaines comme la low cost easyJet ont déjà trouvé la parade en ouvrant une filiale dans l’Union européenne, en l’occurrence easyJet Europe basée à Vienne. Quant la société de maintenance Magnetic MRO, elle a déjà selon FlightGlobal décidé de transférer vers l’Estonie sa filiale britannique MAC Aero Interiors (MAC, acquise en 2016) ; elle cite parmi les raisons de sa décision « des changements dans l’environnement économique » et une « augmentation du niveau d’indécision » sur le marché britannique. Selon le directeur général de MAC Marko Manniste, maintenir la production dans l’Union européenne permettra de « garantir un approvisionnement continu » après le Brexit.

Brexit : divorce en vue entre la CAA et l’EASA ? 1 Air Journal

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