Le groupe aérien Singapore Airlines affiche sa première perte annuelle depuis sa création il y a 48 ans, en raison de la pandémie de Covid-19 qui l’a forcée à supprimer 96% de ses capacités. Sur les vols encore opérés, le port du masque et la prise de température sont désormais obligatoires pour les passagers.

Basé à l’aéroport de Singapour-Changi, le groupe SIA souffre comme les autres : les revenus annuels ont reculé de 2,2% à 15,976 milliards de dollars, et si il affiche un bénéfice opérationnel de 59 millions de dollars (contre 1,07 milliard l’année précédente), la perte nette de 212 millions de dollars est une première historique ; elle avait dégagé un bénéfice net de 683 millions de dollars l’année dernière. L’image est cependant différente selon les filiales du groupe : Singapore Airlines affiche un bénéfice opérationnel de 204 millions 991 millions l’année précédente), tandis que la régionale SilkAir et la low cost Scoot enregistrent respectivement des pertes opérationnelles de 112 et 198 millions (+15 et -15 millions l’année précédente).

SIA explique dans un communiqué avoir  pourtant débuté le quatrième trimestre 2019/2020, clos au 31 mars, « fort d’une solide performance enregistrée lors des neuf premiers mois de l’exercice, grâce à un trafic passagers solide et des initiatives de grande envergure entreprises dans le cadre de son programme Transformation ». Mais les conditions du marché se sont « brutalement détériorées » en février 2020, alors que l’épidémie de Covid-19 a commencé à se propager à l’échelle mondiale. Les craintes concernant la propagation du virus, ainsi que les restrictions sur les voyages à l’échelle mondiale et les contrôles aux frontières, ont entraîné un effondrement de la demande de voyages en avion au cours du trimestre : la forte baisse du trafic a entraîné une baisse drastique des revenus à 894 millions de dollars (-21,9%) par rapport au trimestre correspondant de l’exercice précédent. SIA a par la suite annoncé que la capacité passagers prévue d’avril à juin 2020 serait réduite de 96%. En conséquence, le Groupe a subi une perte d’exploitation de 803 millions de dollars pour le seul 4ème trimestre, soit une différence de 1056 millions de dollars par rapport au bénéfice de 253 millions de dollars l’an dernier. La perte nette du Groupe au T4 s’est élevée à 732 millions de dollars.

Le groupe détaille particulièrement le problème de la couverture carburant : les prix ont plongé vers la fin du dernier trimestre, la demande de pétrole ayant chuté en raison de la pandémie « dans un contexte de guerre des prix inattendue et de surabondance d’offre qui en a résulté ». Cela a entraîné des pertes de couverture sur les contrats venant à échéance au cours du trimestre. Par ailleurs, les réductions de capacité attendues au cours de l’exercice 20/21 « entraîneront une consommation de carburant inférieure à celle anticipée sur la base des conditions normales d’exploitation, ce qui entraînera une sur-couverture du Groupe ». En conséquence, SIA a dû enregistrer d’importantes pertes à la valeur de marché de 710 millions de dollars sur ces couvertures excédentaires. En vertu des normes d’information financière, ces pertes doivent être comptabilisées dans le compte de résultat de l’exercice 19/20. La baisse des revenus et les pertes liées à la couverture de carburant « n’ont pas pu être compensées par les économies de dépenses non liées au carburant résultant des réductions de capacité, des programmes de soutien public et d’autres mesures de réduction des coûts », précise le communiqué.

Les paiements d’avions représentant une partie importante des dépenses de capital, souligne aussi le groupe de Star Alliance : « nous avons engagé très tôt des discussions avec les constructeurs afin de négocier des ajustements dans le flux de livraisons de nos commandes d’avions existantes, et des paiements progressifs afin de réduire les sorties de fonds à court terme. Cela contribuera également à modérer la croissance de la capacité à court terme, tout en demeurant attaché à notre programme de renouvellement de la flotte à plus long terme ».

SIA rappelle aussi l’assistance financière obtenue pour survivre à la crise : le 26 mars, le Groupe a annoncé une émission de droits à travers des actions de droits et des obligations convertibles obligatoires « pour renforcer ses liquidités et son bilan ». L’émission de droits devrait être terminée d’ici juin 2020 et générera un produit brut d’environ 8,8 milliards de dollars. Le Groupe a également la possibilité d’émettre jusqu’à 6,2 milliards de dollars supplémentaires par le biais d’obligations convertibles obligatoires supplémentaires ; celui-ci est destiné à apporter des liquidités supplémentaires en cas de prolongation de cette crise et « ne sera exploité qu’en cas de besoin ». Le Groupe explore simultanément « d’autres sources de financement, notamment le financement garanti et les transactions de cession-bail » ; des éléments qui « permettront au Groupe d’être en position de force et de saisir les opportunités de croissance futures » – même s’il avoue n’avoir aucune visibilité sur la reprise du trafic.

Côté passagers, on a appris que l’aéroport de Singapour a décidé de fermer le Terminal 4 à parti de samedi 16 mai, comme c’est déjà le cas pour le Terminal 2 depuis le début avril. Au manque de demande s’ajoute l’interdiction faite par le gouvernement aux correspondances ; mais les clients restant ne risque pas de se trouver à l’étroit dans les installations (T1 et T3 plus Jewel), Singapore Airlines en particulier n’opérant plus que 16 avions ; la fermeture du T4 affecte Cathay Pacific, Korean air et AirAsia entre autres, dont les vols arriveront et partiront désormais du T1.

On retiendra enfin de la compagnie nationale singapourienne que ses passagers et ceux de SilkAir sont désormais obligés de porter un masque pendant le vol, à l’instar des Air France, Air Canada ou autres Emirats Airlines. Elle explique en outre que ses passagers doivent « observer des mesures de distance de sécurité » lors de l’embarquement et du débarquement d’un vol, ainsi que lors de la file d’attente pour aller aux toilettes. Sur les vols à destination de la cité-état, Singapore Airlines souligne que les passagers « subiront également une évaluation de leur santé avant de monter à bord de l’avion », incluant une « déclaration de santé verbale » et un contrôle de la température. Le personnel de cabine portait déjà des masques et des gants pendant les vols.

Hormis une quinzaine de destinations dont Londres, Francfort, Zurich, Los Angeles et Sydney pour ce qui est hors Asie, les vols de Singapore Airlines restent suspendus jusqu’au 15 juin.

Singapore Airlines: une perte historique, des masques 1 Air Journal

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