L’Union européenne a mis à jour sa liste noire des compagnies aériennes interdites de vol dans le ciel du Vieux continent, y ajoutant en particulier 21 transporteurs russes dont les principaux, le groupe Aeroflot, S7 Airlines et UTair.

La Commission européenne a mis à jour le 11 avril 2022 la liste de sécurité aérienne de l’UE, regroupant les compagnies aériennes « faisant l’objet d’une interdiction d’exploitation ou de restrictions d’exploitation au sein de l’Union européenne, car elles ne respectent pas les normes de sécurité internationales ». 21 compagnies aériennes certifiées en Russie figurent désormais dans cette liste noire, ce qui reflète selon la Commission « de graves problèmes de sécurité dus au réenregistrement forcé par la Russie d’aéronefs appartenant à des étrangers, autorisant sciemment leur exploitation sans certificats de navigabilité valides. Ceci est contraire aux normes internationales de sécurité aérienne ». Rappelons que ces compagnies russes sont interdites d’entrée dans l’espace aérien européen depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie fin février.

La commissaire aux transports Adina Vălean a déclaré : « L’Agence fédérale russe des transports aériens a autorisé les compagnies aériennes russes à exploiter des centaines d’aéronefs appartenant à des étrangers sans certificat de navigabilité valide. Les compagnies aériennes russes concernées l’ont fait sciemment en violation des normes de sécurité internationales applicables. Non seulement une violation flagrante de la convention relative à l’aviation civile internationale (la convention de Chicago), mais elle constitue également une menace immédiate pour la sécurité. Nous vivons dans le contexte d’une agression militaire non provoquée et injustifiée de la Russie contre l’Ukraine. Cependant, je tiens à souligner il est clair que cette décision n’est pas une autre sanction contre la Russie ; elle a été prise uniquement sur la base de raisons techniques et de sécurité. Nous ne mélangeons pas la sécurité avec la politique ». Un argument un peu difficile à entendre quand l’EASA a déjà « décertifié » les Sukhoi SSJ100 Superjet, dans le cadre des sanctions européennes visant l’ensemble du secteur aérien russe.

Suite à la mise à jour de mardi, 117 compagnies aériennes au total sont bannies du ciel de l’UE, soit 20 de plus qu’en décembre dernier

  • 90 compagnies aériennes certifiées dans 15 Etats différents (Afghanistan, Angola à l’exception de 2 compagnies, Arménie, Congo (Brazzaville), République Démocratique du Congo, Djibouti, Guinée Equatoriale, Erythrée, Kirghizstan, Libéria, Libye, Népal, São Tomé et Príncipe, Sierra Leone et Soudan), « en raison d’une surveillance inadéquate de la sécurité par les autorités aéronautiques de ces États » ;
  • 21 compagnies aériennes certifiées en Russie (Aeroflot et ses filiales Rossiya, Pobeda, Aurora, S7 Airlines, UTair, Nord Wind, Yakutia, Rusline…), ainsi que 6 compagnies aériennes individuelles d’autres États, « sur la base de graves lacunes de sécurité identifiées » : Avior Airlines (Venezuela), Blue Wing Airlines (Suriname), Iran Aseman Airlines (Iran), Iraqi Airways (Irak), Med-View Airlines (Nigéria) et Air Zimbabwe (Zimbabwe).
  • Deux autres compagnies aériennes sont soumises à des restrictions opérationnelles et ne peuvent voler vers l’UE qu’avec des types d’avions spécifiques : Iran Air (Iran) et Air Koryo (Corée du Nord).

Dans la pratique, cette mise à jour de la liste noire n’aura aucun effet immédiat. La fermeture de l’espace aérien européen et le problème des avions pris en leasing en Occident a réduit à peau de chagrin les vols internationaux des compagnies russes. La semaine dernière, le ministre des transports russes Vitaly Savelyev assurait que ces transporteurs pouvaient sans problème déployer 193 avions vers l’étranger, en particulier des Sukhoi SSJ100 Superjet, des Antonov An-148 « et quelques avions étrangers en pleine propriété » – des Airbus, Boeing ou Embraer, que les sociétés de leasing occidentales ne seraient pas en mesure de saisir lorsque ces appareils atterrissent hors de Russie.

 

Les Etats-Unis ont également renforcé leurs propres sanctions contre la Russie, le Département du commerce suspendant les privilèges d’exportation à l’ensemble des flottes d’Aeroflot, Azur Air et UTair (172 Boeing au total). Cette mesure devrait à terme « forcer les transporteurs à immobiliser la plupart de leurs vols, car les contrôles à l’exportation empêchent les entreprises du monde entier de fournir des services de MRO, de ravitaillement en carburant et d’autres services aux avions sanctionnés », précise un communiqué. Le gouvernement américain souligne en particulier avoir constaté qu’Aeroflot volait encore en Boeing vers Pékin, Delhi, Istanbul, Antalya et Dubaï ; que ceux d’Azur Air atterrissait encore à Malé, Antalya, Nha Trang ou Dubaï ; et que ceux d’UTair étaient déployés vers des destinations régionales telles que Douchanbé, Bakou ou Erevan entre autres. Ces Boeing russes étaient en outre utilisés sur des lignes intérieures.

On retiendra aussi de la journée de mardi que le seul Airbus A350-900 d’Aeroflot (qui en possède sept), immatriculé VP-BXP, a été déployé pour la première fois depuis le 9 mars entre sa base à Moscou-Sheremetyevo et l’aéroport de Sotchi.

Et que la Turquie (qui n’a pas pris de sanctions) a promis 300 millions de dollars d’aide aux tour-opérateurs dépendant du tourisme russe. Turkish Airlines proposera dans ce cadre 1,5 millions de sièges entre les deux pays (principalement via Anex Tour, Pegas Touristik et Coral Travel), et la low cost Pegasus Airlines un demi-million. La création d’une nouvelle compagnie charter est même envisagée. Près de 4,7 millions de touristes russes ont visité la Turquie en 2021, et Ankara en espérait 7 millions cette année – avant le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Liste noire : 21 compagnies russes dont Aeroflot bannies en Europe 1 Air Journal

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