Le procès du crash du vol IY626 de la compagnie aérienne Yemenia Airways, qui s’était écrasé en juin 2009 au large des Comores tuant 152 passagers et membres d’équipage à bord dont 66 Français, débute ce lundi à Paris. Seule une jeune fille de 12 ans avait survécu à l’accident ; elle devrait témoigner.

Le procès de la compagnie nationale yéménite, renvoyée pour « homicides et blessures involontaires », débute de 9 mai 2022 devant le tribunal correctionnel de Paris, et doit durer jusqu’au 2 juin ; une partie des débats seront retransmis à Marseille, d’où étaient originaires de nombreuses victimes. Yemenia avait décollé de Paris le 29 juin 2009 à bord d’un Airbus A330-200 et fait escale à l’aéroport de Marseille-Provence, avant d’arriver dans sa base à Sanaa. De là était alors parti en direction de Moroni-Prince Saïd Ibrahim un A310-324 (immatriculé 7O-ADJ), mais tôt dans la nuit du 30 juin l’appareil s’était écrasé au large de l’archipel des Comores.

La seule survivante de l’accident était une jeune fille de 12 ans, Bahia Bakari, qui voyageait en compagnie de sa mère ; l’adolescente avait été retrouvée après avoir passé neuf heures agrippée à un des gros débris qui flottaient sur l’océan (son témoignage est programmé le lundi 23 mai). Les deux pilotes yéménites présents dans le cockpit avaient desservi Moroni à plusieurs reprises ; le commandant de bord Khalid Hajeb avait 7936 heures de vol à son actif dont 5314 sur A310, et le copilote Ali Atif 3641 et 3076 respectivement.

Les deux « boîtes noires » du vol 626 avaient été récupérées plusieurs semaines après, mais l’enquête s’est longtemps enlisée, les autorités du Yémen se voyant reprocher de faire trainer pour protéger leur compagnie nationale Yemenia. Après voir écarté les pistes de la panne, la foudre ou l’attentat terroriste, les enquêteurs sont convaincus qu’il s’agit d’une erreur humaine : en juin 2013, le rapport final du BEA (Bureau d’enquêtes et d’analyses) retenait comme cause « une action inadaptée de l’équipage au cours d’une manœuvre non-stabilisée dans le cadre de l’approche de l’aéroport de Moroni, conduisant à la perte de contrôle de l’avion ».

 

Deux ans plus tôt, un rapport préliminaire mentionnait déjà des « erreurs manifestes » de la part des pilotes, avec entre autres le non-respect des procédures d’atterrissage notamment en ce qui concerne le positionnement des becquets, et une vitesse trop faible en cas de problème. Mais pour les magistrats, Yemenia est également responsable, pour avoir maintenu les vols de nuit à Moroni (où le balisage était déficient), pour une formation jugée insuffisante, et pour des problèmes d’entretien de la flotte. L’A310 impliqué, arrivé en 1999 chez Yemenia, était entré en service en 1990, chez Air Liberté qui le louait auprès d’ILFC ; il avait accumulé près de 53.600 heures de vol en 18.129 cycles.

La compagnie aérienne risque une amende de 225.000 euros dans ce premier procès au pénal. Yemenia « reste profondément marquée par cette catastrophe, en particulier pour les victimes, néanmoins elle proteste de son innocence en indiquant qu’elle n’est nullement responsable des faits qui sont intervenus », soutient son avocat Me Léon-Lef Forster à l’AFP. « Il y a eu des dysfonctionnements, mais qui ne lui sont pas imputables et qui apparaîtront lors de l’audience », assure-t-il. Rappelons que la compagnie aérienne a déjà été condamnée en 2015 à verser 30 millions d’euros aux familles de victimes, ainsi qu’à d’autres peines dans des poursuites séparées.

Yemenia avait dû suspendre ses activités à plusieurs reprises depuis 2015 pour cause de conflit, et les avait repris de façon régulière en 2018 à Aden ; elle a opéré des vols de rapatriement depuis 2020 et la pandémie de Covid-19, annonçant dans la foulée la mise à la retraite de ses deux dernier A310. Elle dispose actuellement de quatre A320 et d’un A330-200, mais le premier vol commercial fin avril à Sanaa (où l’aéroport reste fermé depuis 2016) a été reporté sine die.

Crash de Yemenia aux Comores : le procès débute à Paris 1 Air Journal

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