La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a accepté avec réserves le projet de l’ancien ministre délégué au Transport de reconversion au sein d’Hopium, qui développe des voitures à hydrogène, et celui de créer une société de conseil. Mais en rappelant précisément les peines encourues en cas de prise illégale d’intérêts.

Après avoir jugé en avril dernier « incompatible avec les fonctions gouvernementales qu’il a exercées au cours de trois dernières années » la volonté de l’ancien secrétaire d’Etat au transport de rejoindre le pôle spatial du géant de la logistique CMA CGM (futur actionnaire du groupe aérien Air France-KLM), la Haute autorité a annoncé le 17 mai 2022 avoir donné un avis positif « avec réserve » à sa demande de rejoindre « après son départ du Gouvernement, la société anonyme Hopium, en qualité de membre ou de président de son conseil d’administration ».

La startup cotée en Bourse prépare des berlines à hydrogène qui « ne seraient commercialisées qu’à compter de 2025 », souligne le communiqué de la HATVP. Mais comme les statuts d’Hopium incluent « l’assistance à la coordination de projets de recherche et développement portant notamment sur le développement de nouveaux véhicules électriques, hybrides ou à hydrogène, de la pile à combustible et ses équipements annexes, de la batterie et autres systèmes permettant la propulsion », la HAVTP estime qu’il revient « d’encadrer » les futures relations professionnelles de Jean-Baptiste Djebbari.

L’ancien ministre devra donc s’abstenir, dans le cadre de sa nouvelle activité privée, « de toute démarche, y compris de représentation d’intérêts », auprès :

  • des membres du Gouvernement qui l’étaient en même temps que lui, pendant une durée de trois ans à compter de la cessation de ses fonctions ;
  • des membres de son cabinet et de ceux des ministres successivement chargés de la  transition écologique, tant qu’ils occupent encore des fonctions publiques ; cette réserve  vaut, pour chacune des personnes qu’elle vise, jusqu’à l’expiration d’un délai de trois ans suivant la cessation de la relation de travail entre Monsieur Djebbari et la personne concernée ;
  • des services dont il dispose en tant que ministre délégué chargé des transports, pendant trois ans suivant la cessation de ses fonctions gouvernementales.

La HATVP a également jugé « compatible avec réserves » le projet de l’ancien ministre de créer une société de conseil, sous les conditions suivantes :

  • l’intéressé devra s’abstenir de délivrer, directement ou indirectement, des prestations à des entreprises à l’égard desquelles il aurait accompli, au cours des trois années précédant les prestations envisagées, dans le cadre de ses fonctions gouvernementales, l’un des actes mentionnés à l’article 432-13 du code pénal, ou qui auraient avec ces entreprises l’un des liens mentionnés au deuxième alinéa du même article ;
  • il devra s’abstenir, pendant trois ans suivant la cessation de ses fonctions, de réaliser des prestations, de quelque nature que ce soit, directement ou indirectement, pour le compte des ministères chargés de la transition écologique et des transports ;
  • il devra s’abstenir de toute démarche, y compris de représentation d’intérêts, auprès des membres du Gouvernement en exercice ainsi que des membres de son cabinet et du cabinet de la ministre de la transition écologique, qui étaient en fonction en même temps que lui et qui occupent encore des fonctions publiques et, enfin, du secrétariat général du ministère de la transition écologique et des services relevant de ce ministère en lien avec le secteur des transports. Cette réserve vaut, pour chacune des personnes qu’elle vise, jusqu’à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la cessation de la relation de travail entre Monsieur Djebbari et la personne concernée.

Le risque pénal, au regard du délit de prise illégale d’intérêts : « le premier alinéa de l’article 432-13 du code pénal punit de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 200.000 euros le fait, pour un membre du Gouvernement, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux, dans une entreprise privée alors qu’il a été chargé, dans le cadre des fonctions qu’il a effectivement exercées au cours des trois dernières années, soit d’assurer la surveillance ou le contrôle de cette entreprise, soit de conclure avec elle un contrat de toute nature ou de formuler un avis sur un tel contrat, soit de proposer à l’autorité compétente des décisions relatives à des opérations de cette entreprise ou de formuler un avis sur de telles décisions ». Le deuxième alinéa de cet article punit des mêmes peines « toute participation par travail, conseil ou capitaux dans une entreprise privée qui possède au moins 30% de capital commun ou a conclu un contrat comportant une exclusivité de droit ou de fait avec l’une des entreprises mentionnées au premier alinéa ». Le troisième alinéa de l’article précise que, pour l’application des deux premiers alinéas, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé.

Jean-Baptiste Djebbari avait occupé les fonctions de secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports, entre le 3 septembre 2019 et le 6 juillet 2020 et, depuis cette date et jusqu’à la fin du gouvernement Castex, celles de ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports. Il avait déclaré à propos de ces décisions : « Ca ne me met pas du tout mal à l’aise, c’est normal de retrouver une activité normale après la politique, il y a des règles, il faut les respecter ».

Jean-Baptiste Djebbari et la transparence de la vie publique 1 Air Journal

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