Le NTSB vient de publier son rapport préliminaire, levant le voile sur les premières causes techniques et contextuelles du crash d’un vol UPS. Trois membres d’équipage et onze personnes au sol ont perdu la vie dans l’accident du vol UPS 2976, survenu lors du décollage d’un MD-11F à l’aéroport international Muhammad de Louisville aux Etats-Unis, le 4 novembre dernier.

Le vol UPS 2976, assuré par un McDonnell Douglas MD-11F à destination d’Honolulu, s’est écrasé lors de sa mise en puissance sur la piste 17R. L’accélération initiale n’a pas présenté d’anomalies selon les données du Flight Data Recorder (la boîte noire relative aux données de vol), qui contenaient les paramètres de 63 heures réparties sur 24 vols, dont le tragique dernier segment.

L’origine technique du drame

Le NTSB confirme dans un rapport préliminaire une rupture soudaine du moteur gauche et de son pylône pendant la phase de décollage. Des photos d’UPS l’attestent visuellement. Cette rupture a déclenché immédiatement un incendie. L’avion a atteint une altitude maximale de 9 mètres (30 pieds) au-dessus du sol, selon l’altimètre radar et l’enregistreur de vol (FDR). Après avoir franchi le mur de protection au-delà de la piste, le train d’atterrissage principal gauche a heurté le toit d’un entrepôt de UPS Supply Chain Solutions, puis un parc de stockage et deux autres bâtiments, dont une usine de recyclage de produits pétroliers. L’appareil a été en grande partie détruit par les flammes. La zone de débris s’étendait sur environ 900 mètres. Les débris du moteur, du pylône, ainsi que des fragments de la roue et d’aile ont été retrouvés sur la piste et alentours, rapidement transférés en hangar sécurisé pour examen détaillé.

Défaillances structurelles et traces de fatigue

Les analyses du NTSB révèlent la présence de fissures de fatigue sur les surfaces de rupture des attaches du pylône gauche, en plus de zones de rupture par surcontrainte. « Des fissures de fatigue ont été mises en évidence sur la face interne du bras arrière du pylône, là où la structure subissait des efforts majeurs », précise l’agence. Ces observations corroborent les défaillances structurelles susceptibles d’avoir été initiées bien avant l’accident. L’avion impliqué dans le crash de Louisville datait de 1991, soit 34 ans de service commercial. Il avait été acquis par UPS en 2006.

Un crash qui en rappelle un autre : à Chicago en 1979

Le rapport relie ce drame au célèbre crash d’un un McDonnell Douglas DC-10, vol American Airlines 191, à Chicago en 1979, où le moteur gauche et le pylône s’étaient détachés lors de la rotation, provoquant le basculement de l’appareil et une perte de contrôle fatale. 271 personnes à bord du vol 191 ont péri ; deux personnes au sol ont été tuées et deux autres grièvement blessées. Un ancien hangar d’avions, plusieurs automobiles et une maison mobile ont été détruits.

La parenté technique avec la famille DC-10 – dont le MD-11 partage la conception du pylône moteur – invite à une vigilance accrue pour ce type d’aéronefs.

Conséquences réglementaires et flotte suspendue

Face à la gravité des faits, UPS a immédiatement immobilisé toute sa flotte de MD-11 dès le 7 novembre, suivant les recommandations de Boeing. L’autorité fédérale américaine, la FAA, a promulgué une Emergency Airworthiness Directive (AD) le 8 novembre, interdisant tout vol des MD-11 et MD-11F jusqu’à inspection complète des fixations moteur et application de correctifs validés par le service de la sécurité opérationnelle de la FAA (AIR-520). Une directive renforcée, publiée le 14 novembre, étend désormais cette interdiction à toute la série DC-10, du fait de la similarité des architectures.

Le MD-11 : un triréacteur au destin mouvementé
Le McDonnell Douglas MD-11 est un long-courrier triréacteur lancé officiellement en 1986, conçu pour succéder au célèbre DC-10. L’appareil est reconnaissable à son troisième moteur monté à la base de la dérive. Sa mise en service en 1990 visait à répondre aux besoins des compagnies aériennes en matière de rayon d’action et de capacité, avec des améliorations sur la consommation et le cockpit. Malgré ces atouts, le MD-11 n’a jamais vraiment rivalisé avec ses contemporains, notamment le Boeing 777 ou l’Airbus A340.​

Seuls 200 exemplaires ont été produits jusqu’en 2000, période à laquelle la fabrication a été arrêtée faute de nouvelles commandes. Très populaire auprès des compagnies cargo, le MD-11 est aujourd’hui principalement employé pour le transport de fret aérien chez UPS, FedEx et quelques opérateurs spécialisés.​ Les compagnies aériennes concernées indiquent avoir mis en place des plans de contingence pour assurer le maintien du service, l’appareil représentant entre 9 et 12% de leur flotte cargo.

La publication de ce rapport préliminaire souligne l’importance de rigoureux contrôles structurels sur les avions cargo de grandes dimensions, notamment les MD-11 et DC-10 encore présents dans certaines flottes mondiales. L’enquête du NTSB sur le vol 2976 d’UPS reste en cours.

Crash du vol UPS 2976 : des « fissures de fatigue » expliquent pourquoi le moteur gauche est tombé, selon le NTSB 1 Air Journal

©NTSB Source UPS

Crash du vol UPS 2976 : des « fissures de fatigue » expliquent pourquoi le moteur gauche est tombé, selon le NTSB 2 Air Journal

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