La compagnie low cost Ryanair a annoncé qu’elle n’indemnisera pas les passagers affectés par la grève sans précédent des pilotes qui a occasionné,  le vendredi 10 août, l’annulation de quelques 396 vols dans cinq pays européens (Allemagne, Belgique, Irlande, Pays-Bas et Suède).

Alors que la compagnie irlandaise s’est engagée à rembourser l’intégralité du prix billet aux quelque 55.000 passagers impactés, elle maintient qu’elle ne versera aucune indemnité supplémentaire au motif de « circonstances extraordinaires » encadrées par le texte du règlement européen n° 261/2004.

La législation européenne impose pourtant des indemnités allant jusqu’à 600 euros par passager en cas de vol annulé moins de 2 semaines avant le départ ou de vol retardé de plus de 3 heures de temps. Le règlement européen nº 261/2004 indique cependant que « les obligations des transporteurs aériens effectifs devraient être limitées ou leur responsabilité exonérée dans les cas où un événement est dû à des circonstances extraordinaires ».

C’est exactement sur cette clause à l’interprétation ambiguë que Ryanair s’appuie. Elle sera soustraite à l’obligation d’indemnisation si elle est en mesure de justifier que les circonstances extraordinaires « n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises ».

La compagnie irlandaise indique justement que cette grève relève des circonstances extraordinaires : « En vertu de la législation, aucune indemnisation n’est payable lorsque le syndicat agit de manière déraisonnable et totalement hors du contrôle de la compagnie aérienne. Si cela était sous notre contrôle, il n’y aurait pas d’annulations », a déclaré son PDG, Michael O’Leary.

La position de la Cour de justice européenne

Mais les jurisprudences antérieures de la Cour de justice européenne (CJE) quant aux retards et annulations découlant de grèves internes aux compagnies aériennes ne sont pas véritablement en la faveur de Ryanair. Dans un arrêt de la CJE du 17 avril 2018 statuant sur la grève de 2016 du personnel de la compagnie aérienne allemande TUIfly, la cour a estimé qu’une grève sauvage du personnel navigant suite à l’annonce surprise d’une restructuration ne constitue pas une « circonstance extraordinaire » permettant à la compagnie aérienne de se libérer de son obligation d’indemnisation en cas d’annulation ou de retard important de vol, rappelle RefundMyTicket, un site juridique qui vient en aide aux passagers victimes de retard.

La Cour a rappelé que le règlement prévoit deux conditions cumulatives pour qu’un événement puisse être qualifié de « circonstances extraordinaires » : 1) il ne doit pas être, par sa nature ou son origine, inhérent à l’exercice normal de l’activité de la compagnie aérienne et 2) il doit échapper à la maîtrise effective de celle-ci.

La Cour souligne à juste titre que les compagnies aériennes peuvent être, de manière ordinaire, confrontées, dans l’exercice de leur activité, à des désaccords, voire à des conflits, avec les membres de leur personnel ou à une partie de ce personnel. Les risques découlant des conséquences sociales qui accompagnent de telles mesures doivent être considérés comme inhérents à l’exercice normal de l’activité de la compagnie aérienne concernée.

Pour le cas d’espèce, les grèves incessantes chez Ryanair sont le résultat des négociations infructueuses entre la direction de la compagnie et plusieurs syndicats de pilotes, hôtesses de l’air et stewards qui exigent des reconsidérations salariales et des meilleures conditions de travail.

Grève Ryanair : la low cost refuse d’indemniser les passagers pour les vols annulés 1 Air Journal