Publié le 1 juin 2024 à 00h03
Europe : le modèle PNC Ryanair mis à mal
Publié le 3 mai 2017 à 08h00 par François Duclos
©Ryanair
Un avis remis par l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) dans le dossier opposant la compagnie aérienne low cost Ryanair à six hôtesses de l’air et stewards basés à l'aéroport de Charleroi remet en cause tout son fonctionnement : les litiges relatifs aux contrats de travail des PNC relève des juridictions du lieu « où ou à partir duquel » ils exercent leur travail. Et donc pas du droit irlandais.
Alors que la spécialiste irlandaise du vol pas cher criait victoire la semaine dernière dans un cas l’opposant à la France sur les prélèvements sociaux des travailleurs détachés, une autre affaire, venue de Belgique cette fois, menace son modèle de contrat PNC. Selon un avis non contraignant rendu par l’avocat général de la CJUE Henrik Saugmandsgaard Øe le 27 avril 2017, la justice européenne devrait appliquer une jurisprudence constante sur les contrats de travail effectués dans plus d'un pays de l'Union européenne, et ordonner que le tribunal compétent soit le tribunal du lieu « où ou à partir duquel l'employé remplit effectivement la partie essentielle de ses fonctions vis-à-vis de son employeur ».
Le texte précise six critères de résidence : « en décidant de cet endroit, le tribunal devrait tenir compte de l'endroit où le travailleur commence et finit ses jours, où il reçoit des instructions de son employeur et organise sa journée de travail, où il est contractuellement tenu de résider, où se trouve un bureau d'employeur, et où il doit se trouver s'il est inapte au travail ou en cas de problèmes disciplinaires ».
Il appartient donc à la Cour du travail de Mons d'appliquer ces critères, a déclaré l'avocat général, les points ci-dessus « désignant sans équivoque les tribunaux du lieu où se trouve l'aéroport de Charleroi ». La cour de Mons avait entendu les plaintes de six anciens PNC de Ryanair venus de Belgique, Espagne et Portugal, basés à l’aéroport de Charleroi entre 2009 et 2011 (et obligés par contrat de vivre à moins d’une heure de l’aéroport) ; cinq avaient en 2011 poursuivi Crewlink et le sixième la compagnie aérienne directement. Doutant de ses compétences et face aux complexités du droit du travail dans le transport aérien, elle avait renvoyé l’affaire devant la CJUE. L’avocat général a précisé dans son avis que le fait que les six anciens salariés relevaient de deux employeurs différents « n’est pas pertinent » dans ces circonstances, et que la nationalité de l'avion dans lequel ces salariés travaillent « ne peut pas être prise en compte lors de la détermination de l'endroit où les employés travaillent habituellement ». En Belgique donc, où le code du travail doit supplanter celui irlandais appliqué par la low cost.
Si les avis des avocats généraux ne sont pas contraignants pour la CJUE, ils sont en général suivis ; celui de Saugmandsgaard Øe s’appliquerait in fine à tous les Etats de l’UE où des cas similaires arrivent devant la justice. Ce qui pourrait entrainer enfin une clarification du droit du travail dans l’aérien de l’Union européenne, droit qui jusque là s’opposait régulièrement aux règlements nationaux. Interrogé par La Libre Belgique, Yves Lambot du syndicat CNE déclarait la semaine dernière : « si cela se confirme, c'est une grande victoire pour nous. Je vois mal Ryanair faire décoller chaque matin et atterrir chaque soir ses avions en Irlande ». Ryanair nous a fait parvenir cette réaction : « Nous étudierons l'avis non contraignant de l'Avocat Général dans l'affaire juridique de Mons qui a été publiée plus tôt aujourd'hui ».
Le texte complet de l’avis est disponible ici.
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MindYou a commenté :
3 mai 2017 - 8 h 25 min
L’avocat général a remis son avis, tout comme les avocats de Ryanair, et c’est maintenant à la Cour de rendre son jugement. Ce jugement suivra l’avis de l’une ou l’autre partie, on verra. Deuxièmement, si la Cour suit l’avocat général et décide que le tribunal de Mons est compétent, celui-ci devra encore écouter les parties et rendre son jugement – susceptible d’être contesté en appel, évidemment. On est encore loin d’un jugement définitif qui condamnerait le système Ryanair.
thierry a commenté :
3 mai 2017 - 9 h 49 min
La “Cour”. Pas la “Court”.
Un vrai pas de géant.... a commenté :
3 mai 2017 - 11 h 03 min
Ryanair s’est engouffre dans ce que chez eux on a perçu comme une possibilité ” d’optimisation socio-fiscale” et a construit tout son modèle PN sur cela ( pas seulement PNC, d’ailleurs). Cela a généré ici et/ou la des difficultés de diverses natures dues essentiellement à des interprétations différentes des textes…
Chaque difficulté a elle meme génère des actions en justice en premier niveau, puis en appel, puis en …etc…en remontant dans chaque pays l’échelle des possibilités juridiques…
In fine, et pour tous les pays, Apres ces divers parcours, tous les cas remontent au niveau europeen et suivent alors l’échelle Europeenne…
Mais à la fin des fins, on arrivera à une clarification définitive qui fera jurisprudence et s’appliquera donc dans tous les États, à tous les salariés concernés ou potentiels ainsi qu’à tous les employeurs actuels et à venir….
Ce processus est forcément lent et long, très lent et tres long, parfois trop lent et trop long…mais la justice suit son bonhomme de chemin..
Personne aujourd’hui ne peut dire qu’elles seront les gagnants et les perdants et sur quels domaines: il n’est pas dit que Ryanair ou autres employeurs perdront sur tous les points…ni que les législations nationales resteront la référence en tous les domaines…Mais au moins, en fin de parcours, les choses seront claires, définitivement et pour tout le monde., et ce sera mieux ainsi….Quel que soit le résultat, il conduira à des changements drastiques soit pour les employeurs au benefice des employés, soit dans les règles applicables aux employés au benefice des employeurs..
Justin Fair a commenté :
3 mai 2017 - 11 h 43 min
C’est tout à fait ça, et il n’y a pas que l’Aérien de concerné…
( Cf le topic: “Cotisations sociales. Ryanair va réclamer 15 millions d’euros à la France “, sur le FORUM.”
Bond a commenté :
3 mai 2017 - 11 h 17 min
le plan ALWAYS GETTING BETTER !!!!!
flyrelax a commenté :
3 mai 2017 - 11 h 35 min
les personnels basés au camping de Marignane…. autour de la fameuse base de Marseille relèveraient donc du droit français : ce qui vaut pour les PNC vaut pour les PNT… s ils relevent de notre législation ils relevent donc de nos droits et charges sociaux
j ai parfois du mal a comprendre l Europe, qui dit tout et son contraire en deux avis juridiques contraires en huit jours d intervalle
Justin Fair a commenté :
3 mai 2017 - 14 h 45 min
Je vous invite à lire les deux articles que j’ai mis sur le forum sujet:« Cotisations sociales. Ryanair va réclamer 15 millions d’euros à la France « Si j’ai bien compris, il n’y a pas contradiction entre les deux avis juridiques.
Pour le premier,” les juges européens ont estimé, pour leur part, que quels que soient les doutes concernant la légalité d’un détachement, les autorités françaises N’AVAIENT PAS LE DROIT D’INVALIDER UNILATERALEMENT un formulaire de détachement SANS EN DEBATTRE AU PREALABLE AVEC LE PAYS EMETTEUR.”
Peut-être que la France va devoir rembourser Ryanair…
Mais si l’avis ( le deuxième!) remis par l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) est suivi, Ryanair devra revoir sa façon de faire à l’avenir ou/et payer les charges sociales en Belgique ou en France!
A suivre!
Nathmol a commenté :
3 mai 2017 - 16 h 45 min
Il ne s’agit pas d’un “avis” mais de “conclusions”, que l’avocat général présente en toute indépendance. Elles disent le droit et sont très généralement suivies par la Cour dans son jugement.
Justin Fair a commenté :
3 mai 2017 - 19 h 48 min
Vous avez raison, ce sont des conclusions et ce serait une bonne chose qu’elles soit suivies!
Lyonnnais a commenté :
3 mai 2017 - 22 h 24 min
J’espère que cette conclusion sera élargie à l’ensemble des situations de travailleurs détachés !!!
Pour aider les pays les plus en retard, les cotisations devraient être reversés au pays d’origine par le pays préleveur…mais au taux du pays du lieu de travail !!!
Justin Fair a commenté :
4 mai 2017 - 7 h 40 min
En principe, oui… Cela ne concerne pas que l’Aérien.