Le gouvernement italien a confirmé hier avoir reporté à fin octobre la vente de la compagnie aérienne Alitalia, principalement en raison de l’incertitude politique. Et ce alors que l’Europe a lancé une enquête approfondie sur le prêt-relais de 900 millions d’euros consenti par l’état, et dont le remboursement est lui aussi reporté au 15 décembre.

Annoncé depuis deux semaines,  le report à l’automne 2018 au lieu du 30 avril de la finalisation du processus de vente a été officialisé hier à Rome par le ministre italien du Développement économique. Carlo Calenda a expliqué lors d’une conférence de presse avoir « repoussé le délai pour la vente d’Alitalia à fin octobre, et le délai pour le remboursement du prêt relais au 15 décembre ». Toute négociation « plus étroite » nécessite la formation d’un gouvernement ayant « la possibilité d’exprimer sa propre orientation », et donc de discuter avec les éventuels investisseurs, a précisé le ministre, ces derniers « n’étant pas prêts » à aller de l’avant tant que la situation politique n’est pas clarifiée. Il est « important de dire que la situation d’Alitalia reste fragile sur le long terme », a insisté le ministre. La Ligue et le Mouvement 5 Etoiles, qui disposent du plus grand nombre de sièges au parlement mais n’ont pu s’entendre, ont évoqué leur souhait de conserver « l’italianité d’Alitalia » quelque soit le repreneur choisi.

Trois offres ont bien été déposées à ce jour pour la reprise d’Alitalia, dont deux officiellement confirmées : Lufthansa a soumis un document décrivant ses idées pour une « nouvelle Alitalia restructurée », le président du directoire Carsten Spohr ayant expliqué depuis janvier que la compagnie italienne avait besoin de subir une « restructuration importante » avant d’être rachetée. Cette proposition était d’ailleurs jugée la plus prometteuse il y a dix jours par Carlo Calenda. La low cost easyJet a de son côté déposé une « manifestation d’intérêt revue pour une Alitalia restructurée, dans le cadre d’une alliance ». Le fonds américain Cerberus et la compagnie aérienne Delta Air Lines seraient ses partenaires, comme pressenti depuis le début de l’année quand le groupe Air France-KLM (partenaire de coentreprise et d’alliance de la compagnie américaine) faisait l’objet de plusieurs informations sur des consultations – et les démentait. Le PDG du groupe franco-néerlandais expliquait toutefois en février qu’il étudiait avec Delta « différentes possibilités pour qu’Alitalia reste dans la famille SkyTeam sans qu’Air France-KLM ne soit l’acquéreur d’Alitalia », ajoutant qu’ils regardent « toutes les solutions ». La présence de Delta dans ces discussions était alors justifiée par l’appartenance d’Alitalia à leur coentreprise transatlantique. Enfin la low cost hongroise Wizz Air disait en début d’année s’intéresser à l’activité court-courrier d’Alitalia, mais a refusé de commenter les rumeurs la nommant comme troisième candidate.

Alitalia avait été mise sous « administration extraordinaire » début mai 2017 par le gouvernement en raison de sa situation financière, les actionnaires dont Etihad Airways ayant refusé de remettre la main à la poche pour la refinancer après le refus des salariés d’accepter un nouveau plan d’austérité. Rappelons qu’en juillet 2017, Air France-KLM avait  annoncé la création d’une coentreprise globale avec Delta Air Lines et Virgin Atlantic, promettant un siège d’associé à Alitalia si elle survit – hors de Lufthansa bien sûr.

Hier, Carlo Calenda soulignait que les commissaires « travaillent bien », et que le prêt relais de 900 millions d’euros accordé par l’Etat « est quasi intact ». Ce prêt fait justement l’objet depuis lundi d’une enquête approfondie par la Commission européenne, afin de déterminer s’il s’agit d’une aide d’état incompatible avec les règles de la concurrence. L’instance « est préoccupée par le fait que la durée du prêt, allant de mai 2017 à au moins décembre 2018, dépasse la durée maximale de six mois autorisée par les lignes directrices pour les prêts de sauvetage », a déclaré la commissaire à la Concurrence Margrethe Vestager dans un communiqué. La Commission « a le devoir de s’assurer que les prêts accordés aux entreprises par les États membres sont conformes aux règles de l’UE en matière d’aides d’État. Notre enquête déterminera si tel est le cas pour Alitalia », a-t-elle ajouté, rappelant que l’Italie devra récupérer l’intégralité du prêt en cas de décision négative.

Alitalia : pas de vente avant fin octobre 1 Air Journal