La compagnie aérienne Air Italy a annoncé hier sa mise en liquidation après avoir accumulé des centaines de millions d’euros de pertes, les vols restant toutefois opérés jusqu’au 25 février – par d’autres appareils. Entre la suspension des vols d’Ernest Airlines et la privatisation toujours repoussée d’Alitalia, la survie des transporteurs italiens semble bien compliquée.

L’ex-Meridiana, relancée en octobre 2017 par Qatar Airways et Alisarda sous le nom d’Air Italy, a annoncé le 11 février 2020 sa mise en liquidation, la procédure utilisée signifiant que les actionnaires de l’entreprise rembourseront toutes les dettes en souffrance et verseront tous les salaires du personnel dus, selon la porte-parole des liquidateurs Giuliana Paoletti. Air Italy a déclaré dans un communiqué que la décision de cesser les activités avait été prise par tous les actionnaires, en raison de « conditions de marché persistantes et structurelles difficiles ». Quelque 1200 emplois devraient être supprimés.

Selon la presse italienne, les pertes financières pour 2019 s’élèveraient à 200 voire 300 millions d’euros, après les 164 millions de pertes enregistrées en 2018 – sa première année d’activité sous le nouveau nom. La compagnie expliquait alors s’attendre à des pertes similaires durant l’année financière en cours, notamment en raison en raison des Boeing 737 MAX 8 cloués au sol et qui l’ont forcée à louer d’autres avions. Le plan d’affaires sur cinq ans consulté par le Corriere della Serra posait d’ailleurs clairement la question du remplacement de sa flotte de monocouloirs (trois MAX 8 livrés depuis mai 2018 sur les 20 attendus, quatre 737-800 et un 737-700 âgés d’une vingtaine d’années) par des appareils plus modernes « notamment de la famille Airbus, en mettant l’accent sur l’homogénéité technique ». Le reste de sa flotte compte quatre Airbus A330-200, issus de la flotte de Qatar Airways.

Pour les passagers, Air Italy précisait hier que tous les vols prévus jusqu’au 25 février seront opérés « sans modification à l’aller » par d’autres compagnies aériennes. Hier, des avions de Wamos, Neos, Albastar ou Tayaran Jet étaient par exemple déployés sur ses routes au départ de l’aéroport de Milan-Malpensa (les départs le 26 depuis Dakar et Malé seront opérés, ainsi que certains vols domestiques le matin). Tous les clients ayant réservé après le 25 février seront soit remboursés, soit replacés chez d’autres transporteurs.

Air Italy proposait cet hiver à Milan un réseau de six destinations domestiques, une en Espagne (Ténériffe), huit en Afrique (Dakar, Le Caire, Sharm el Sheikh, Lagos, Accra, Mombasa, Zanzibar), une en Asie (les Maldives) et deux aux Etats-Unis (New York-JFK, Miami). Début 2018, le patron de Qatar Airways envisageait une flotte de 50 avions à l’horizon 2022, avec un trafic de 10 millions de passagers par an principalement sur des routes internationales.

Air Italy, c’est fini 1 Air Journal

©San Francisco Airport

Qatar Airways, qui détient 49% de la holding AQA contre 51% pour Alisarda, a publié un communiqué quelque peu cinglant envers son partenaire : elle explique que depuis l’acquisition en 2017 d’une participation minoritaire dans Air Italy, « elle a toujours cru fermement en la société et en son potentiel, soutenant le plan d’affaires proposé par la direction en vue d’améliorer la croissance et la création d’emplois d’Air Italy, avec l’ajout de des liaisons aériennes et de nombreuses améliorations des services en vol, conformément aux normes élevées de renommée mondiale de Qatar Airways ». Et « malgré son rôle d’actionnaire minoritaire », elle a « continuellement fourni « tout le soutien possible à Air Italy depuis le début, de la libération d’avions de notre flotte et la commande de nouveaux avions pour Air Italy, au soutien des choix de gestion et à l’injection de capitaux et d’investissements selon les besoins et les autorisations ». Face à l’évolution de l’environnement concurrentiel et les conditions de marché « de plus en plus difficiles qui affectent gravement le secteur du transport aérien », Qatar Airways a « constamment réaffirmé son engagement, en tant qu’actionnaire minoritaire, de continuer à investir dans l’entreprise pour créer de la valeur pour l’Italie et le public voyageur et pour fournir le soutien à Air Italy et à son personnel, car pour Qatar Airways, l’accent mis sur les employés est une priorité essentielle dans sa quête d’excellence – en plus de soutenir les communautés locales et d’autres parties prenantes. Pour cette raison, Qatar Airways était à nouveau prête à jouer son rôle pour soutenir la croissance de la compagnie aérienne, mais cela n’aurait été possible qu’avec l’engagement de tous les actionnaires ».

Une réunion entre les actionnaires d’Air Italy et le gouvernement devrait se tenir ce mercredi à Rome, la ministre des Transports Paola De Micheli ayant déjà réagi à l’annonce dans un communiqué : « la décision de mettre en liquidation une entreprise de telle dimension, sans en informer au préalable le gouvernement et sans examiner sérieusement d’éventuelles alternatives, n’est pas acceptable ». Côté syndicats, le secrétaire de la Filt-Cgil, Fabrizio Cuscito a déclaré : « il faut une action immédiate pour arrêter cet acte grave et irresponsable et un signe de vie des ministres compétents pour empêcher ce désastre au niveau de l’emploi ». Un projet de grève le 25 février dans le secteur aérien est déjà évoqué…

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