La fermeture de multiples espaces aériens suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie a doublé le trafic vers cette dernière via des pays tels que la Turquie ou les Emirats Arabes Unis, même si l’aéroport de Moscou-Sheremetyevo a fermé sa troisième piste faute de trafic. La compagnie aérienne low cost britannique Jet2 a suspendu ses vols vers la Pologne, où l’irlandaise Ryanair est l’objet de critiques pour ne pas avoir baissé ses prix.

Si Air Serbia en particulier a pu tirer profit de l’absence de sanctions serbes contre la Russie, la majorité des compagnies aériennes européennes ont du s’adapter, entre suspension généralisée des liaisons vers Moscou ou Saint-Pétersbourg et allongement des temps de vols vers l’Asie pour les Air France ou autres Finnair. Mais la demande est toujours là, et selon ForwardKeys le trafic vers et depuis la Russie via la Serbie, la Turquie et les Emirats Arabes Unis a augmenté de plus de 200% par rapport aux niveaux d’avant la pandémie de Covid-19. « Les principaux pays de destination en Europe pour les transferts via la Turquie étaient l’Allemagne, l’Italie, le Royaume-Uni, l’Espagne et la Grèce ; via la Serbie étaient le Monténégro, Chypre, la France, la Suisse et l’Italie; via les EAU étaient Chypre, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie et la France. La Turquie et les Émirats arabes unis ont également servi de hubs pour relier la Russie aux États-Unis et certaines destinations asiatiques », explique Olivier Ponti, vice-président Insights, ForwardKeys.

En regardant les billets émis entre le 28 février (lorsque les sanctions ont été mises en place) et le 8 mars (dernières données disponibles), « les principaux hubs pour les personnes voyageant de la Russie vers l’Europe étaient via la Turquie, la Serbie et les Émirats arabes unis », poursuit-il : « En regardant la capacité de vol prévue avant l’imposition des sanctions (au cours de la semaine du 21 février) par rapport aux dernières données disponibles (au cours de la semaine du 7 mars), il y a eu une augmentation de 50 % de la Russie à la Serbie, de 12% d’augmentation en Turquie et une augmentation de 5% aux EAU ».

Cette augmentation de trafic indirect vers et depuis la Russie est cependant à relativiser en termes de trafic général : l’aéroport de Moscou-Sheremetyevo par exemple, base de la compagnie nationale Aeroflot, avait déjà fermé un terminal et a annoncé mercredi celle de sa troisième piste, inaugurée en 2019. Cette piste ainsi que les terminaux D et E « resteront fermés jusqu’à la reprise du trafic et l’augmentation des mouvements d’avions », a précisé un communiqué. Sheremetyevo va en outre suspendre ses projets d’investissement et chercher à « réduire ses coûts », tout en surveillant la situation pour être prêt à reprendre ses activités normales.

Guerre en Ukraine : trafic indirect, Sheremetyevo, Jet2 et Ryanair 1 Air Journal

©Jet2

La Pologne est également impactée par le conflit : sans citer explicitement la guerre, la low cost Jet2 a annoncé hier la suspension de toutes ses routes vers le pays du 24 mars 2022 au 26 mai en raison de l’invasion russe en cours de l’Ukraine. Elle n’y desservait que l’aéroport de Cracovie, au départ de Birmingham, Glasgow, Leeds-Bradford, Manchester et Newcastle, et affirme son intention de relancer les lignes « progressivement » dès que les conditions le permettront. Mais la compagnie aérienne n’a pas expliqué pourquoi le conflit affectait ses opérations, l’aéroport polonais étant bien plus loin de la frontière avec l’Ukraine que ceux de Lublin ou Rzeszow, ce dernier accueillant encore les avions de Ryanair depuis le Royaume Uni.

Ryanair justement est sous le feu des critiques en Irlande pour ne pas avoir baissé ses prix sur les routes au départ de la Pologne empruntées par les réfugiés ukrainiens. L’ambassadrice de l’Ukraine Larysa Gerasko l’a même accusée d’avoir augmenté ses tarifs, mais elle s’en est aussi prise au pays tout entier, soulignant qu’il n’avait pas fermé ses ports aux bateaux russes alors que ses aéroports et son espace aérien le sont aux avions russes.

Un sénateur irlandais a repris les critiques, suggérant que Ryanair « avec ses 400 avions pourrait offrir des vols gratuits aux réfugiés » ; Gerry Horkan a déclaré : « je pense que beaucoup d’entre nous qui volent avec Ryanair et qui utilisent Ryanair apprécieraient en ce moment si elle pouvait dire : Écoutez, à cette occasion, dans cette situation de guerre traumatisante », la compagnie va offrir des servies à coût nul. Il a en outre proposé la mise en place de vols charters gratuits vers la Pologne, la Moldavie, la Roumanie et d’autres pays limitrophes de l’Ukraine.

La première low cost d’Europe de l’est, Wizz Air, avait annoncé dès le 6 mars la mise à disposition 100.000 billets d’avion gratuits pour les réfugiés ukrainiens ; et ceux qui ne se trouvent pas dans les pays frontaliers bénéficient d’un tarif préférentiel de 29,99 euros sur tout le réseau (hors Émirats arabes unis, Islande et Canaries). La low cost hongroise s’était aussi engagée à embaucher des stewards et hôtesses ukrainiens.

Guerre en Ukraine : trafic indirect, Sheremetyevo, Jet2 et Ryanair 2 Air Journal

Premier vol vers l’Ukraine©Ryanair