Alors que la saison estivale va d’ici peu battre son plein, le préfet de Corse a observé de nombreux dysfonctionnements, notamment des défaillances répétées dans le filtrage des bagages et passagers à l’aéroport d’Ajaccio.

« Depuis décembre 2022, trois missions d’audit successives des services de la direction générale de l’aviation civile (DGAC) ont révélé des défaillances graves de la mission d’inspection-filtrage », indique le préfet de Corse, Amaury de Saint-Quentin dans un communiqué. La Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Corse est gestionnaire des aéroports dans l’île de Beauté « par délégation de la Collectivité de Corse, propriétaire des infrastructures », et la CCI a sous-traité la sûreté aéroportuaire à la société SAP SUR, un marché évalué à 11 millions d’euros.

« Lors du dernier contrôle opéré en janvier, aucune amélioration significative n’a été observée » en la matière, selon le préfet, précisant que « plus de la moitié des défaillances relevées dix-huit mois plus tôt, dont les plus graves, n’avaient fait l’objet d’aucune action corrective concrète ». « Ces constats ne permettent pas de garantir aux usagers de l’aéroport d’Ajaccio le niveau de sécurité minimal assuré dans l’ensemble des aéroports », regrette-t-il alors que « le contexte d’élévation du plan Vigipirate est à son niveau le plus élevé “urgence attentat” (depuis) le 25 mars ».

Pour y « remédier de manière urgente », la CCI « a été placée sous surveillance renforcée par la DGAC, le 9 avril, pour augmenter les moyens de l’État dédiés au contrôle de la bonne réalisation des missions de sûreté », ajoute le préfet. Le préfet avait déjà pris des « mesures coercitives » vis-à-vis de la CCI dès le 29 mars, avec notamment la suppression de la ligne d’inspection-filtrage dédiée aux personnels de bord afin de mobiliser les effectifs sur les contrôles « de l’ensemble des passagers ». « La responsabilité de l’État est de dire qu’il y a des dysfonctionnements et ensuite c’est la responsabilité de la CCI d’y remédier », a expliqué une source proche du dossier, regrettant « la prestation minimaliste » de la société SAP SUR pour « faire un maximum de profit » et « une CCI qui n’ouvre pas trop les yeux là-dessus ».

Ce marché public de la sûreté de l’aéroport d’Ajaccio est au cœur de procédures judiciaires. Le 6 février, Dominique Peretti, le directeur de la société SAP SUR, a été mis en examen pour « extorsion en bande organisée, association de malfaiteurs et recel de favoritisme » par un magistrat instructeur de la juridiction interrégionale spécialisée de Marseille. L’enquête porte sur une plainte pour menace de mort de la part d’un responsable de la société Samsic Airport, autre soumissionnaire à cet appel d’offre, ce qui l’avait amené à retirer son offre.

Autre affaire embarrassante, le 22 décembre dernier, le coordinateur des ports et aéroports de la CCI de Corse-du-Sud, Jean-André Simonetti, a été condamné à trois ans d’emprisonnement, dont deux avec sursis, pour avoir tenté de franchir, début novembre, la sécurité de l’aéroport d’Ajaccio avec une arme chargée. Il avait par ailleurs été condamné pour meurtre en 2004.

Sûreté à l’aéroport d’Ajaccio : des « défaillances graves » constatées 1 Air Journal

©Patrick Janicek