L’expulsion d’une cinquantaine d’adolescents français de confession juive d’un avion de Vueling est devenue une affaires d’Etat entre Paris et Madrid, la France exigeant officiellement des explications à l’Espagne et à la low cost espagnole.

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a appelé la direction de Vueling pour demander des « éléments d’explication », afin de « déterminer si ces compatriotes avaient fait l’objet de discriminations liées à leur confession », a fait savoir hier le Quai d’Orsay dans un communiqué. Lors de cet entretien avec Carolina Martinoli, PDG de la compagnie aérienne espagnole, le chef de la diplomatie française a fait « part de la vive émotion suscitée par le débarquement d’un groupe de jeunes Français juifs d’un avion de la compagnie ». En réponse, la PDG « lui a assuré qu’une enquête interne rigoureuse était en cours et que les conclusions de cette enquête seraient partagées avec les autorités françaises et espagnoles ». Des explications ont également été demandées à l’ambassadeur d’Espagne en France, selon le communiqué.

Survenu le 23 juillet 2025 à l’aéroport de Valence, en Espagne, l’incident est abondamment relayé par les associations et les familles. L’expulsion d’un groupe d’une cinquantaine d’adolescents, âgés de 13 à 15 ans, est officiellement motivée par Vueling par « une attitude fortement conflictuelle, mettant en péril le bon déroulement du vol ». Selon la compagnie, les jeunes passagers auraient manipulé du matériel de sécurité, interrompu les démonstrations obligatoires et continué un comportement perturbateur malgré plusieurs avertissements. L’équipage a finalement appelé la Guardia Civil (gendarmerie espagnole), qui a procédé à leur débarquement. La directrice du groupe a été menottée après avoir protesté contre la confiscation des téléphones portables. Dans un message sur X ensuite effacé, le ministre espagnol du Transport Oscar Puente a ainsi qualifié les adolescents expulsés de « morveux israéliens », alors qu’il s’agit de citoyens français, pour décrire ces jeunes accusés d’être des perturbateurs.

Cette version est catégoriquement rejetée par l’association Club Kineret, organisatrice du séjour, ainsi que par nombre de parents et de témoins. La polémique a pris une ampleur supplémentaire lorsque des médias ont révélé que le commandant de bord ayant pris la décision d’expulser les enfants n’était autre qu’Iván Chirivella, un ancien instructeur de vol ayant formé, à la fin des années 1990 en Floride, deux des auteurs des attentats du 11 septembre à New York. Bien qu’il n’ait jamais été condamné ni jamais soupçonné de liens avec leurs actes, ce fait a été jugé troublant par certains médias, alimentant le climat de suspicion entourant cette « affaire Vueling ».

Dans le même temps, d’autres polémiques sont revenues sur le devant de la scène, notamment la circulation sur les réseaux sociaux, depuis plusieurs mois, d’une photo prise dans un cockpit Vueling et montrant un drapeau palestinien : certains y voient un signal du parti pris supposé de certains membres du personnel de la low cost espagnole, dans un contexte où la question israélo-palestinienne exacerbe déjà les tensions.

Le ministre israélien de la Diaspora a dénoncé cette « affaire Vueling » comme « l’un des faits antisémites les plus graves qui se soient produits récemment ». Face à la controverse, la low cost espagnole nie toute motivation discriminatoire ou antisémite et assure que l’équipage n’a fait qu’appliquer les protocoles de sécurité nécessaires à la sécurité des passagers. L’enquête administrative espagnole et les procédures judiciaires annoncées devraient permettre d’établir les faits, dans un climat électrique où chaque fragment d’information alimente le débat public.