Le gestionnaire des aéroports parisiens s’apprête à ouvrir un nouveau cycle d’investissements majeurs. Objectif : adapter les infrastructures à la transition environnementale et aux nouvelles dynamiques du transport aérien, dans un contexte de croissance modérée du trafic.
Le groupe ADP a présenté le cadre du futur Contrat de régulation économique (CRE), définissant la politique tarifaire, le niveau de rémunération et les investissements sur les activités aéronautiques régulées. Prévu pour couvrir la période 2027-2034, ce CRE s’inscrit sur une durée exceptionnellement longue, rompant avec les cycles précédents de cinq ans. La dernière mouture, s’achevant en 2020, avait été fortement perturbée par la crise sanitaire et ses conséquences brutales sur le trafic aérien.
Le Groupe ADP propose désormais un plan d’investissement de 8,4 milliards d’euros, soit plus d’un milliard par an, destiné à ses trois plateformes : Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et Paris-Le Bourget.
Objectif : concilier modernisation et sobriété
Ces investissements visent à moderniser les infrastructures tout en préparant les aéroports à la nouvelle donne climatique. Le groupe assure vouloir « conjuguer performance opérationnelle et responsabilité environnementale », deux notions que l’entreprise juge indissociables à l’heure où l’aviation mondiale cherche à réduire son empreinte carbone. La proposition repose sur une croissance annuelle de trafic « modérée », estimée à 1,6 % de moyenne.
Parmi les grands chantiers envisagés figurent la rénovation et la digitalisation des terminaux, le renforcement de la sécurité et de la fluidité des parcours passagers, le déploiement d’infrastructures pour carburants durables d’aviation (SAF) et un effort marqué sur la neutralité carbone à horizon 2030, un objectif déjà annoncé pour l’ensemble des installations du groupe.
Selon des données communiquées par ADP, près de 40% des investissements concerneront directement la décarbonation des plateformes. Cette priorité s’inscrit dans le cadre du programme « Pégase », la feuille de route de transition environnementale du groupe. De nouveaux équipements permettront aussi de mieux accueillir la prochaine génération d’appareils hybrides et électriques.
La politique tarifaire proposée par ADP dans le cadre du CRE 2027-2034 prévoit une hausse des redevances pour les compagnies, mais présentée comme « proportionnée » et étalée dans le temps. « Pour réaliser cette transformation, les investissements historiques envisagés – plus de 1 milliard d’euros par an en moyenne pendant 8 ans – seraient financés par un nouveau contrat de régulation économique. Le projet de contrat présenté cherche à trouver le juste équilibre entre un niveau d’investissements sans précédent, dont la rentabilité est à la fois garantie et plafonnée par la loi, et des tarifs applicables aux compagnies aériennes qui resteront, après la hausse proposée, dans la borne basse de nos concurrents », a expliqué Philippe Pascal, Président-directeur général du Groupe ADP. Pour la période 2027-2034, ADP propose une évolution annuelle moyenne des tarifs de redevances égale à l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) + 2,6 points.
Les premières années du contrat seraient plus dynamiques : certains analystes évoquent une formule proche de « inflation + 5,5 points en 2027, + 3 points en 2028, puis + 2 points à partir de 2029 », ce qui représente une montée en charge rapide avant une stabilisation. Pour les compagnies, cela signifie une augmentation sensible des redevances passagers et atterrissage au début de la période, venant s’ajouter à la pression des coûts carburant et de la fiscalité environnementale.
Une croissance du trafic jugée prudente
Si la fréquentation aérienne repart, ADP table sur une croissance modérée du trafic dans les années à venir. Selon les estimations de l’entreprise, le nombre de passagers sur ses plateformes parisiennes pourrait atteindre 120 à 125 millions d’ici 2034, contre 112 millions en 2023 selon ADP. Une progression jugée « saine mais prudente » par le groupe. Cette prudence découle de plusieurs facteurs : saturation progressive des capacités d’accueil, incertitudes économiques, et nouvelles habitudes de mobilité plus raisonnées.
Le plan d’investissement du Groupe ADP s’inscrit dans un environnement concurrentiel et réglementaire en mutation. D’autres grands opérateurs européens, tels que Fraport (Francfort) ou Heathrow Airport Holdings (Londres), ont également lancé des programmes de modernisation de plusieurs milliards d’euros afin de renforcer leur compétitivité et leur performance environnementale à long terme. Rappelons d’ailleurs que le gouvernement britannique vient de trancher en faveur du projet d’Heathrow pour une troisième piste, un chantier total estimé à environ 49 milliards de livres, dont 21 milliards pour la seule piste et les travaux liés.
En France, cette stratégie de long terme pourrait être scrutée de près par l’État, principal actionnaire du groupe (environ 50,6% du capital), soucieux de concilier attractivité du hub parisien et maîtrise des tarifs aéroportuaires. Avec cet ambitieux plan sur huit ans, le Groupe ADP entend se positionner à la croisée de la transition énergétique, de l’innovation technologique et d’une vision de l’aérien plus sobre mais toujours performante.

Yoann a commenté :
12 décembre 2025 - 14 h 12 min
21 milliards de livres pour une seule piste ?!?
Doudedudi a commenté :
12 décembre 2025 - 21 h 58 min
La construction de la piste se fera à un emplacement qui nécessite de déplacer une autoroute qui passe déjà par là. J’imagine que ça en fera l’une des pistes les plus chères au monde, peut-être sur le podium avec celle de Madeira qui est sur piliers sur une partie de sa longueur.
beurk a commenté :
12 décembre 2025 - 16 h 24 min
Une croissance annuelle moyenne annoncée de… 1,6 %. Et pourquoi ? À cause d’une « saturation progressive des capacités d’accueil » (SIC). Autrement dit : si Paris ne croît pas, c’est parce qu’ADP n’a pas les capacités pour suivre. Rien d’étonnant de la part d’un groupe qui a sciemment scié la branche sur laquelle il était assis en enterrant prématurément le projet du Terminal 4, attendu par son principal opérateur – Air France – pour rester compétitif.
ADP poursuit donc sa stratégie de rustines sur un pneu crevé : ajouter des portes à des halls conçus pour tout… sauf pour fonctionner comme un hub international. Les « extensions » du 2A dans le prolongement de la “soucoupe volante” et du 2G, ne sont que des bricolages qui masqueront à peine la faiblesse structurelle des infrastructures. Ces dernières n’apporteront que quelques points de contact supplémentaires, aux endroits les plus éloignés du moyeux de correspondances. Il en sera de même lorsque les nouvelles jetés, à l’est du T1, seront ouvertes, encore plus éloignées…
Pendant ce temps, le transport aérien mondial atteindra 5,2 milliards de passagers en 2026, avec des régions du globe affichant des croissances à deux chiffres. Et Paris ? Paris se contente de viser 1 % de croissance annuelle sur vingt ans… Des projections sans ambition, pour ne pas dire pathétiques, qui condamnent la plateforme à perdre encore davantage de parts de marché au profit de Francfort (qui inaugure un véritable terminal), Heathrow (qui va révolutionner la plate-forme avec de nouveaux terminaux connectés et une troisième piste) ou Schiphol (lequel, soit dit en passant, construit un nouveau bâtiment central entièrement repensé pour fluidifier les connexions).
Dans ce contexte, Air France ne peut qu’être à plaindre : difficile de trouver partenaire plus freinant, plus rigide, plus contre-productif qu’ADP pour soutenir sa croissance. Si, à cela, vous ajoutez le niveau ultra-élevé des taxes d’atterrissage à Paris et des taxes spécifiques au marché français imposés par l’Etat, les compagnies aériennes françaises ont du souci à se faire. Quant au passager, il vivra toujours une triste expérience client à Roissy comme à Orly où tout n’est que rafistolage…
Pierre a commenté :
12 décembre 2025 - 23 h 01 min
Quand on connait les aeroports d’Asie….
Il y a un monde d’écart et de retard avec ADP……!
Illigo a commenté :
13 décembre 2025 - 3 h 50 min
Chaud devant : Roissy a dégringolé dans le classement des hubs qui accueillent des passagers en correspondance. En 2023, il ne pointait plus qu’à la septième place mondiale contre la quatrième en 2019. En quatre ans, son trafic en correspondance a reculé d’à peu près dix points. Ce n’est pas avec un plan aussi peu ambitieux que Roissy va reconquérir les places perdus… curieux de présenter des objectifs basés sur une prévision de croissance quasi-confidentielle… ADP continue avec sa politique de « modularité » qui est à l’origine de la conception d’un aéroport ingérable et qui mécontente tous les utilisateurs ! La plus grande erreur d’ADP qui persiste et signe a été d’abandonner la construction du T4 sous la pression des écologistes et de tous ceux qui pensaient que la Covid allait enterrer le transport aérien. Ben voyons, rien que ça ! Ça promet pour les années à venir…
Filoustyle a commenté :
13 décembre 2025 - 7 h 40 min
Developper les liaisons en « province » non ? Pour délester Paris.
Un jour les terminaux de CDG arriveront jusqu’en Picardie ou bien en Bretagne a force d’allonger les distances .