Le groupe ADP gérant les aéroports parisiens sera bien privatisé l’année prochaine, mais en attendant il poursuit son développement avec la signature d’un accord avec Hong Kong.

Les conditions de la privatisation en 2019 du groupe ADP, permise par la loi Pacte, ne sont toujours pas connues, mais on sait déjà qu’elle devrait rapporter quelque 9,5 milliards d’euros à l’Etat qui détient 50,6% de son capital. Ce qui lui rapporte « 174 millions d’euros de dividendes par an », souligne le ministre de l’économie Bruno Le Maire dans les Echos; mais selon une source chez ADP interrogée par Libération, la participation de l’Etat lui aurait en fait rapporté 200 millions par an depuis son introduction en Bourse en 2006. Le PDG d’Aéroports de Paris Augustin de Romanet a déclaré lors du Paris Air Forum avoir « toujours pensé qu’une entreprise n’appartenait pas seulement à ses actionnaires, mais aussi à ses salariés, à ses clients ainsi qu’aux territoires où elle opère. Le fait que notre actionnaire pourrait changer ne doit aucunement nous troubler », a-t-il expliqué, ADP devant « poursuivre ses projets et ses priorités, notamment en innovant ». La ministre des Transports, Elisabeth Borne a de son côté rappelé que l’Etat utilisera « la régulation » pou protéger « l’intérêt général ».

Rappelons que depuis l’été dernier, plusieurs scénarios de privatisation sont à l’étude, le plus lucratif consistant à la vente de la totalité du capital détenus par l’Etat. Un principe qui a les faveurs du groupe Vinci, déjà détenteur de 8% du capital d’ADP et partie prenante du consortium ayant remporté la privatisation de l’aéroport de Lyon-Saint Exupéry pour 535 millions d’euros. Une privatisation partielle, l’Etat conservant environ 30% du capital, a également été mentionnée (et apparemment préférée par le PDG d’ADP), tout comme une vente séparée des aéroports Charles de Gaulle et Orly pour améliorer la concurrence, ou une vente hors foncier pour éviter que le futur propriétaire ne favorise la spéculation immobilière au détriment de l’essor des aéroports.

Thomas Juin, président de l’Union des aéroports français, explique dans une tribune publiée par Le Monde que ce processus de privatisation des aéroports « n’est pas une exception française. Il s’intègre dans une tendance générale et un modèle européen d’exploitation aéroportuaire avec mixité de capitaux publics et privés ». Dans l’Union européenne en 2016, selon le Conseil international des aéroports (ACI Europe), 46,8% des sociétés d’exploitation aéroportuaire, représentant plus des trois quarts du trafic commercial, comptaient de l’actionnariat privé contre seulement 23 % en 2010.

En attendant la privatisation, ADP signe avec Hong Kong 1 Air JournalQuelque soit son futur actionnariat, le groupe ADP ne chôme pas : il a annoncé hier avoir signé deux protocoles d’accord avec les autorités de l’aéroport de Hong-Kong (AAHK) afin de renforcer la coopération entre les aéroports de Paris-CDG et Hong Kong-Chek Lap Kok. Ces accords portent sur l’exploitation aéroportuaire, le développement du trafic passager, mais aussi sur le développement des activités Cargo. ADP souligne dans son communiqué que depuis le début de l’année 2018, une moyenne de 40 vols par semaine relie les deux aéroports (avec les compagnies aériennes Air France et Cathay Pacific NDLR) ; l’an dernier, ces vols ont permis de transporter 481.819 passagers et 39.700 tonnes de marchandises. Concernant l’exploitation aéroportuaire et le développement du trafic passager, les deux parties s’engagent à :

– agir conjointement pour améliorer leurs performances en termes d’efficacité, de sûreté, de qualité, de respect environnemental et de productivité, et pour améliorer la connectivité des deux aéroports en renforçant leurs positions de hubs respectives ;
– partager les retours d’expériences et les meilleures pratiques notamment par le biais d’un soutien au développement de l’emploi et des talents.

Concernant les activités Cargo, la coopération qui vise à resserrer les liens entre les deux aéroports et les échanges entre l’Europe et l’Asie a notamment pour but de :

– promouvoir et faciliter le transport aérien de marchandises sur des segments à forte croissance : e-commerce, transport de denrées à température contrôlée, transport de produits de luxes ;
– partager les retours d’expériences et les meilleures pratiques dans un intérêt mutuel afin d’améliorer la sûreté, la sécurité, la robustesse et l’efficacité des activités Cargo. Les deux aéroports ont, en outre, obtenu la certification IATA CEIV Pharma, norme mondiale en matière de compétences et de manipulations pour les produits pharmaceutiques.

L’aéroport international de Hong-Kong est l’un des plus fréquentés d’Asie puisqu’il accueille 73 millions de passagers en 2017 et couvre un réseau de plus de 220 destinations mondiales ; Roissy est le deuxième aéroport en Europe en termes de trafic passagers avec 69,5 millions de passagers accueillis en 2017 et une desserte de 325 villes dans le monde. Depuis 1996, l’aéroport international de Hong-Kong se classe au premier rang mondial pour le fret aérien. En 2017, il a transporté plus de 5 millions de tonnes de fret et de courrier, devenant ainsi le premier aéroport à atteindre ce niveau de tonnage. De son côté, Paris-CDG est le premier aéroport d’Europe pour le cargo avec 2,2 millions de tonnes de fret et de courrier en 2017.

Lors de la signature, le PDG du groupe ADP Augustin de Romanet a déclaré : « le Groupe ADP est heureux de poser les bases d’un partenariat global entre l’aéroport Paris-Charles de Gaulle et l’aéroport international de Hong-Kong, deux des plus importantes plates-formes aéroportuaires d’Europe et d’Asie. Le partage d’expériences et des meilleures pratiques va nous permettre d’améliorer nos performances vis-à-vis des passagers dans de nombreux domaines clés : qualité de service, productivité, sécurité, développement durable. Nous sommes également très fiers d’œuvrer avec HKIA au développement des talents de notre industrie et à l’examen d’opportunités de développement en Chine continentale. Enfin dans le Cargo, nous bénéficierons mutuellement des échanges des meilleures pratiques et du développement de segments à forte valeur ajoutée comme le transport de produits de luxe ou de matériel électronique ». Fred Lam, Directeur général de l’aéroport de Hong-Kong, a ajouté : « Nous sommes ravis de pouvoir renforcer nos connexions avec l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, un hub européen incontournable et un des aéroports les plus importants au monde. Au travers de cette collaboration, nous espérons construire un partenariat aux bénéfices mutuels qui aidera chacun à renforcer ses opérations aéroportuaires et à se développer dans des domaines variés. Je crois que le partage d’expérience et le travail en commun main dans la main peut nous permettre d’offrir une meilleure expérience et davantage de services à nos passagers respectifs et à nos clients cargo, tout en améliorant la compétitivité de nos aéroports ».

Rappelons que le groupe ADP est déjà présent dans plus de 30 pays via sa filiale ADP International, et impliqué en tant qu’actionnaire ou opérateur dans la gestion de TAV Airports et des aéroports de Santiago du Chili, Amsterdam, Liège, Zagreb, Conakry, Enfidha, Antananarivo, Amman ou Sharjah entre autres. Au premier trimestre 2018, le chiffre d’affaires du groupe a augmenté de 37,8%.

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