Le syndicat des pilotes de lignes (SNPL) estime que le rapport d'expertise judiciaire présenté mercredi sur le crash du vol Air France AF447 entre Rio et Paris apporte de nouveaux éléments qui contredisent la version présentée par le BEA, dont les propres rapports préliminaires pointaient surtout du doigt des erreurs humaines. L'enquête sur l'accident qui avait coûté la vie à 228 personnes le 1er juin 2009 poursuit son cours, mais chaque déclaration officielle est suivie d'interprétations par les parties concernées, que ce soit le constructeur Airbus, la compagnie nationale ou les pilotes. Le rapport d'expertise judiciaire présenté mercredi 5 octobre 2011, qui confirmait la mise en examen pour homicide involontaire des deux sociétés, n'échappe pas à la règle. Alors qu'il ne portait que sur le volet judiciaire du crash (les familles de victimes soulignaient mercredi que les experts "ne tirent aucune conclusion de l’exploitation des enregistreurs"), le syndicat des pilotes y a trouvé des "éléments essentiels" qui manquaient au rapport précédent du BEA. L'argument du SNPL est technique: dans son communiqué, le syndicat souligne que "suite à la panne des sondes anémométriques, on sait aujourd'hui que non seulement les pilotes ne disposaient plus d'information sur la vitesse de l'avion, mais également que les altitudes affichées dans le cockpit étaient fausses". Ce qui aurait conduit les pilotes à chercher à reprendre de l'altitude, jusqu'au décrochage fatal. Le SNPL s'étonne que le BEA n'ait "pas analysé ni évoqué ces éléments" dans son dernier rapport intermédiaire, ce qui le conforte dans sa décision de retrait de l'enquête technique. Faux et de toute façon pas nouveau répond Airbus, pour qui "quand l'indication de vitesse est faussée, il y a un écart entre altitude affichée et altitude réelle". Selon la reconstitution de l'accident à partir des données des boîtes noires, cette perte d'altitude n'aurait été que d'environ 500 pieds, alors que les pilotes en ont gagné près de 3000, une correction donc exagérée qui aurait mené au décrochage. Rappelons que la seule certitude technique sur le crash est le givrage des sondes Pitot fabriquées par Thalès, le BEA estimant que ce givrage a contribué à l'accident sans pouvoir l'expliquer à lui seul. Chacun est somme toute dans son rôle: le syndicat défend ses pilotes et cherche à faire porter la responsabilité de l'accident sur le seul avion, tandis que le constructeur défend son appareil et veut croire à la responsabilité des pilotes. Quelque soit le résultat définitif de l'enquête, annoncé pour juin 2012, cette opposition se poursuivra avec la part habituelle de mauvaise foi...