La société de leasing Dr Peters Group a décidé de cannibaliser les deux premiers Airbus A380 rendus par la compagnie aérienne Singapore Airlines, faute de leur avoir trouvé des clients. Le retour sur investissement dans les deux superjumbos est estimé à environ 150%.

Deux des quatre A380 loués depuis dix ans par Singapore Airlines et rendus depuis le début de l’année au Dr Peters Group (les MSN003, MSN005, MSN 008 et MSN010) vont être démontés et leurs pièces mises sur le marché de la maintenance, a annoncé le 5 juin 2018 la société allemande. « Après de longues et intenses négociations avec diverses compagnies aériennes telles que British Airways, Hi Fly et Iran Air, Dr Peters Group a décidé de vendre les composants de l’avion et recommandera cette approche à ses investisseurs », précise un communiqué. Les options alternatives négociées pour les nouveaux contrats de location « ne répondaient pas aux exigences des investisseurs pour obtenir un résultat approprié. Même une vente d’avions, qui avait également été envisagée, ne répondait pas aux conditions exigées par le Dr. Peters Group », précise encore la société.

Cette vente de pièces sera confiée au « leader mondial du marché », l’américaine VAS Aero Services ; au cours du processus de deux ans, les sociétés d’investissement généreront un produit d’environ 45 millions USD provenant uniquement de la vente des composants, selon le calcul préliminaire effectué par VAS Aero Services. « La raison principale de cette évaluation élevée » est que de nombreuses compagnies aériennes utilisant actuellement l’A380-800 auront une forte demande pour des composants de remplacement individuels en raison des intervalles de maintenance à venir, explique le Dr Peters Group. Les Rolls Royce Trent 900 ont déjà été démontés et renvoyés au motoriste britannique, mais la société allemande précise que sa stratégie « consiste à poursuivre le contrat de location de moteurs existant avec Rolls Royce, ou avec une compagnie aérienne, au-delà de mars 2019 », avant une vente en 2020. En raison du nombre croissant d’A380 utilisant les Trent, qui devront à leur tour être entretenus dans les années à venir, Dr Peters Group prévoit de générer « au moins le revenu mensuel actuel de 480 000 USD » par avion. Les principaux composants, tels que le train d’atterrissage ou l’APU, seront vendus « très rapidement », et le Groupe Peters s’attend à pouvoir effectuer un premier paiement aux investisseurs au premier trimestre de 2019.

Anselm Gehling, PDG du Dr. Peters Group, a souligné que le marché des avions de type A380 « n’a pas évolué positivement ces dernières années, certaines compagnies aériennes ont annulé des commandes auprès d’Airbus, d’autres ont opté pour de plus petits avions long-courriers. L’A380 n’a pas conduit les compagnies aériennes à s’appuyer de plus en plus sur ce type d’appareils et, à la lumière de ce développement, le concept désormais finalisé est une excellente réalisation avec un chiffre d’affaires prévisionnel d’environ 80 millions USD par avion ». Ce concept – la vente au détail des pièces – « va satisfaire, voire dépasser, les attentes actuelles de nos investisseurs, ce qui est notre objectif principal », ajoute le groupe qui s’attend à un rendement global de 145% à 155% pour les investisseurs dans les fonds DS 129 et 130, y compris les gains de change déjà réalisés (y compris les remboursements partiels des fonds dédiés à chaque appareil déjà effectués), « et un remboursement intégral des prêts restants ». En suivant cette stratégie, Dr. Peters Group réalise « un bon résultat pour ses investisseurs dans l’environnement de marché actuel ». La décision devrait être entérinée lors d’un Conseil d’administration le 28 juin ; les négociations sur les deux autres A380, détenus par un fond séparé, continuent.

« Nous ne pouvons pas commenter la décision de Dr Peters, qui est le propriétaire des appareils », a déclaré un porte-parole d’Airbus ; « nous restons confiants dans le marché d’occasion de l’A380 et dans le potentiel d’élargissement de la base d’exploitants ». Si le coup au moral est sans doute dur, l’avionneur européen a enregistré depuis le début de l’année pour son A380 une commande supplémentaire d’Emirates Airlines (36 appareils au total), mais aussi l’achat en avril par la société de leasing portugaise Hi Fly de son premier A380 d’occasion, un deuxième exemplaire devant le rejoindre l’année prochaine). Singapore Airlines, compagnie de lancement du superjumbo en 2007, doit rendre un cinquième A380 pris en leasing durant les prochaines semaines.