La compagnie aérienne Air France a promis de dévoiler de nouvelles mesures concrètes pour les salariés lors du CCE de jeudi. L’intersyndicale, qui a déjà déposé un préavis de grève de quatre jours pour la fin du mois, n’y croit guère.

Regroupant les trois syndicats de pilotes (SNPL, SPAF, Alter), deux syndicats d’hôtesses de l’air et stewards (SNPNC et UNSA-PNC) et cinq de personnel au sol (CGT​, FO, SUD, CFTC et SNGAF) représentant au total 52,6% des voix du personnel, plus l’UNAC, l’intersyndicale ne croit pas aux promesses de « mesures et actions concrètes » promises pour le CCE du 14 juin 2018 par Anne-Marie Couderc. Nommée à la tête de la direction transitoire du groupe Air France-KLM, la dirigeante espérait ainsi éviter l’été « houleux » promis par FO, qui affecterait les résultats du troisième trimestre d’ordinaire très rentable après les 400 millions d’euros perdus pendant 15 jours de grève menés depuis février. Dans une lettre ouverte publiée mardi, les syndicats expliquent que la présidente a « eu raison d’écrire que le « malaise est ancien et va au-delà de la seule question salariale », mais que cela serait « une erreur de ne pas la traiter et de ne travailler que sur le sujet des conditions de travail et du management. C’est pour cette raison que nous vous avons expliqué l’impérieuse nécessité de nous mettre autour de la table pour discuter du rattrapage des salaires pour l’année 2018. En outre, vous n’êtes pas sans savoir que des négociations très comparables ont actuellement cours au sein de KLM et qu’elles font l’objet d’une gestion managériale très différente, même s’il semble qu’elles puissent ne pas satisfaire les salariés à ce stade des propositions ».

L’intersyndicale attendait des rencontres bilatérales organisés par Anne-Marie Couderc qu’elles « conduisent à ouvrir une négociation de sortie de conflit. Mais à l’inverse, il a été annoncé (par voie de presse et directement aux salariés…) la présentation lors du CCE du 14 juin 2018 d’un ensemble de mesures et d’actions concrètes afin de répondre à ce ‘malaise’. Or nous sommes habitués à ces annonces à Air France, Madame la Présidente. Par expérience, les réponses ne sont jamais adaptées à la volonté des salariés d’exercer leur métier dans de bonnes conditions de travail et de rémunération. Et une annonce en CCE non négociée ne sera pas la solution à la situation actuelle puisqu’il faudra bien une négociation pour sortir de l’impasse dans laquelle la direction a placé la compagnie ».

Le préavis de quatre jours de grève du 23 au 26 juin 2018 a déclenché une « réponse quasi-immédiate de la direction », dont les termes « n’ont pas détrompé » l’intersyndicale : « la question salariale n’est à l’évidence toujours pas prise en compte comme LA priorité ». L’objectif poursuivi par les syndicats « n’est pas la grève, mais bien de provoquer une prise de conscience des directeurs ! Leur refus de résoudre le conflit dont ils recherchent l’enlisement est consternant. Ce nouvel appel à la grève est le seul moyen légal pour les salariés de se faire entendre ». La revendication reste une demande de rattrapage de l’inflation, et « ne remet pas en cause le développement stratégique d’Air France bien au contraire. Toutes les organisations syndicales de l’Intersyndicale Air France sont prêtes à répondre à une invitation à négocier qui leur serait faite. Il est encore largement temps ! Les salariés ne comprendraient pas que leur vote reste lettre morte et que nous ne soyons pas entendus. Nous espérons que la voie du dialogue sera prise très vite par la direction d’Air France. Nous y sommes toutes et tous prêts », conclut l’intersyndicale.

Rappelons que l’intersyndicale réclame une augmentation générale des salaires de 5,1% dès 2018 (plus 4,7% supplémentaires pour les pilotes), avec +3,8% au 1er avril (rattrapage d’inflation 2012-2017) et +1,3% en octobre (inflation prévisionnelle de 2018). En face, la direction d’Air France avait revu à la hausse l’augmentation qui n’avait été signée que par deux syndicats (CFDT et CFE-CGT représentant 31,3% des voix du personnel) : sa proposition d’accord portait sur une augmentation générale de 2% en 2018, assortie d’un seuil minimum de 25 euros par mois, et une autre de 5% pour 2019, 2020 et 2021 (1,65% par an), assortie d’un seuil minimum de 40 euros par mois. Les salaires seraient selon la direction augmentés de 12,5% en moyenne sur la période (comprenant une augmentation générale de 7% pour toutes les catégories de personnel et les augmentations individuelles/GVT) ; mais ce « pacte de croissance » prévoyait d’adapter l’augmentation dans le cas où le résultat d’exploitation d’Air France serait inférieur à 200 millions d’euros, et d’appliquer une clause de revoyure en cas d’inflation plus élevée ou de résultat négatif. Le rejet par 55% de l’ensemble du personnel de ces propositions a entrainé la démission du PDG d’Air France-KLM Jean-Marc Janaillac.