Le gestionnaire de l’aéroport de Lannion a renoncé à attribuer la DSP de la ligne avec Paris face à la baisse du trafic, la compagnie aérienne Chalair n’opérant ces vols que jusqu’au 22 mars inclus. Ce qui le don d’énerver le patron de Twin Jet, qui n’avait pu obtenir cette DSP il y a huit mois.

Le syndicat mixte gérant l’aéroport de Lannion-Côte de Granit Rose a annoncé le 13 février l’abandon de son unique route régulière, opérée depuis Paris-Orly, après avoir constaté un effondrement du trafic ces derniers mois : de 2330 passagers en janvier 2017, la fréquentation est passée à 904 passagers le mois dernier. « C’est à contrecœur que nous avons pris cette décision », regrette son président Erven Léon sur France Info, « on s’est bagarré pour trouver une solution, mais depuis quelques mois, le trafic n’est plus là ». L’appel d’offres pour attribuer une nouvelle délégation de service public (celle de Chalair en juin dernier n’était que provisoire face aux poursuites engagées par Twin Jet), lancé sur la base de statistiques portant sur 2016, avait bien attiré deux candidats, Chalair donc et Regourd. Mais les deux compagnies aériennes avaient souligné que la baisse de trafic entrainerait un déficit plus important, qu’il faudrait bien combler. HOP! Air France, précédent détenteur de la DSP, avait d’ailleurs été accusée de « saboter » la ligne en annulant 43 vols entre Orly et Lannion entre la mi-juillet et la fin septembre, quand Chalair avait pris sa succession. D’autres raisons sont cependant évoquées pour expliquer la baisse du trafic, dont le développement de la LGV. Selon Ouest France, la fréquentation à l’aéroport de Lannion n’était que de 21.248 passagers en 2017, contre 29.000 en 2016, 41.000 en 2008, 45.000 en 2006 et 52.000 en 2005.

Rappelons que Chalair opère également un vol tous les samedis jusqu’au 17 mars entre Lannion et l’aéroport de Pau-Pyrénées via Nantes, en ATR 42 de 46 sièges.

Le président de Twin Jet Olivier Manaut n’a pas caché sa colère après l’annonce de l’abandon de la DSP vers Orly, publiant un communiqué pour « dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas » sur un trafic surestimé par l’aéroport et un « choix d’avion ridiculement trop gros ». « Prévert disait que “la meilleure façon de ne pas avancer était de suivre une idée fixe” ! Nous en avons la démonstration, laissez-moi vous en faire l’inventaire… Depuis le début de cette procédure de renouvellement d’opérateur de service sur la route Lannion-Paris, la volonté du syndicat mixte gérant l’aéroport de Lannion conduit par M. Erven Léon est très claire : mettre coûte que coûte des gros avions … là ou un avion de plus faible capacité et moins onéreux était largement suffisant. Ainsi, pour écarter notre compagnie, premier opérateur en Europe des avions de faible capacité, tout aura été tenté par M. Erven Léon et son syndicat, de l’appel d’offres entaché d’irrégularités pour finir par une modification des règles du jeu de ce dernier appel d’offres infructueux afin de nous en interdire l’accès …Nous n’avons jamais compris une telle obsession, sachant que les finances de la région et des collectivités ne permettait pas de mettre en œuvre son rêve inutile. M. Erven Léon et ses amis du syndicat mixte ont tué la ligne de Lannion par leur vision du big is beautiful, leur rêve américain va maintenant devenir le cauchemar quotidien des usagers. Les entreprises et les particuliers, tous utilisateurs de cette ligne, vont devoir se passer de l’avion ! Voilà le seul résultat de cette stratégie ridicule et sans aucune vision … »

« Souvenons-nous que le trafic actuel est suffisant pour nos types d’avions », poursuite le dirigeant en évoquant ses Beechcraft 1900D de 19 places : « nous l’avons crié haut et fort mais en vain devant un syndicat mixte incompétent qui n’a rien voulu entendre et qui a été condamné pour irrégularité au tribunal administratif, condamnation confirmée par le conseil d’Etat pour avoir voulu nous écarter en usant de moyens illégaux … Monsieur Erven Léon qui criait lui aussi haut et fort que nous racontions n’importe quoi, en responsable politique qu’il est, assumera certainement ses décisions en démissionnant de ses mandats devant ce résultat honteux pour l’industrie et l’économie locales. Bravo Monsieur Erven Léon ! il n’y a que ce mot qui me vienne à la bouche devant une telle suite de décisions donnant un résultat aussi lamentable ! et Bravo à Chalair qui, en professionnel de l’aérien a contribué à faire écrouler le trafic en seulement 6 mois et qui ne pouvait ignorer cette issue funeste, lui qui exploite aussi des modules de petite capacité ! … Belle démonstration d’inadéquation du réel besoin des régions par rapport à leur capacité, comme l’a déjà souligné la chambre régionale des comptes. Nos principaux regrets vont aux employés de l’aéroport dont les emplois sont mis en danger par l’ego et l’incompétence de leurs dirigeants quand nous proposions une solution opérationnelle, économiquement dimensionnée, pérenne et évolutive en mieux… Une nouvelle fois , bravo ! ».

Jusqu’au 22 mars inclus, Chalair continuera d’opérer entre Orly et Lannion deux rotations par jour en semaine et une le dimanche. Ensuite, des navettes seront mises en place pour les voyageurs d’affaires, afin de leur permettre de rejoindre plus facilement soit l’aéroport de Brest, soit la gare SNCF de Guingamp qualifiée de « gare d’affaires du Trégor » par le président du syndicat mixte. Erven Léon a précisé sur France Info que l’aéroport reste ouvert « pour les vols privés, les vols d’affaires et d’autres trafics sur lesquels nous réfléchissons » Un projet de réorganisation de l’activité de l’aéroport est à l’étude pour sauver certains des 19 emplois.