Le groupe Lufthansa va réduire la croissance annoncée pour 2019, après avoir annoncé des résultats financiers toujours très positifs mais en baisse de  par rapport à l’année dernière. Il a d’autre part abandonné toute idée d’investir dans Alitalia, même si un partenariat commercial reste possible.

Le résultat d’exploitation ajusté de 1,354 milliard d’euros, annoncé le 30 octobre 2018 par le groupe formé de Lufthansa, Austrian Airlines, Swiss, Brussels Airlines et Eurowings, est en retrait de 11% par rapport à 2017, et sur les neuf premiers mois de l’année ce même EBIT ajusté recule de 7,7% à 2,362 milliards d’euros – en raison principalement des coûts d’intégration de la low cost Eurowings. Le tout sur un chiffre d’affaires ayant progressé de 0,5% depuis le début 2018 pour atteindre 26,897 milliards d’euros, mais affichant une baisse de 1,0% sur les seuls revenus liés au transport aérien (des résultats liés à l’adoption de la norme IRFS15 ; le groupe évoque en fait une hausse sur neuf mois de 7% globale, et de 6% sur le transport aérien). Le revenu unitaire était en hausse de 0,3% hors taux de change, tandis que le coût unitaire est resté stable hors carburant et taux de change.

Dans le détail, Swiss International Air Lines tire son épingle du jeu : elle affiche au cours des neuf premiers mois un bénéfice d’exploitation en hausse de 24% à 564 millions de francs. La rationalisation des coûts liée à la modernisation de la flotte, désormais bien avancée, y a contribué, précise son communiqué, tandis que les opérations de couverture ont aussi permis à SWISS de compenser la hausse du prix du pétrole dans une large mesure. Le chiffre d’affaires a grimpé de 8% à 4.02 milliards de francs. Les capacités, en hausse par rapport à l’année précédente, ont pu être absorbées sur le segment passagers comme sur celui du fret. En revanche le résultat d’exploitation sur neuf mois est en baisse de 4,2% chez Lufthansa German Airlines, et de 14% chez Austrian Airlines.

Eurowings publie de son coté un EBIT ajusté de -65 millions d’euros pour les neuf premiers mois de 2018 ; cette baisse de 210 millions d’euros par rapport à l’année précédente s’explique notamment par une charge non récurrente de 170 millions d’euros pour compléter l’intégration de certaines parts de l’ex-Air Berlin et pour les coûts occasionnés par les retards et les annulations de vols. « En 2017, nous avons saisi une opportunité historique dans la consolidation du secteur de l’aviation en Europe », souligne le CEO du groupe Carsten Sphor, « et c’était la bonne décision en termes stratégiques, même si cela a entrainé une année difficile pour Eurowings. Nous considérons les coûts exceptionnels liés à cette intégration et à notre expansion rapide en tant qu’investissement à long terme, qui aidera à renforcer durablement notre position sur le marché ».

Le groupe allemand a donc annoncé hier une réduction de la croissance prévue à l’été 2019, passant de plus de 5% à environ 3,8%, le ralentissement étant particulièrement marqué chez Eurowings qui a cru de 23% en 2018. La croissance future du secteur du transport aérien « devra prendre en compte beaucoup plus les capacités des infrastructures aériennes et terrestres », observe Carsten Spohr. « En même temps, nous visons à assurer la rentabilité de nos compagnies aériennes grâce à la discipline de capacité. Nous nous attendons également à des augmentations substantielles coûts de carburant conduisent à des prix plus élevés à partir de 2019 ». Rappelons que Lufthansa privilégie désormais Munich pour les vols long-courriers, réduisant ses capacités à Francfort (sans pour autant y abandonner ses créneaux de vol). Si le groupe Lufthansa a maintenu ses prévisions pour l’année 2018, les investisseurs n’ont pas apprécié : le cours de son action a chuté de 8% hier à la bourse de Francfort.

Lufthansa revoie sa croissance à la baisse, laisse tomber Alitalia 1 Air JournalCôté partenariats, un investissement dans Alitalia est définitivement écarté : à la veille de la fermeture des candidatures au capital de la compagnie nationale italienne, Carsten Spohr a déclaré : « il est hors de question pour nous d’investir aux côtés d’une entité publique ». Cet investissement était déjà en doute vu les demandes du groupe allemand en termes de restructuration, qui avait été rejetées par le nouveau gouvernement italien. En revanche, un « accord de partenariat commercial avec Alitalia est dans l’agenda pour les prochains mois », a ajouté le dirigeant allemand qui dit « très bien connaître » ses homologues de la compagnie nationale italienne. Et M. Spohr, qui avait déjà évoqué des discussions avec la low cost Norwegian, entend bien continuer à jouer « un rôle actif dans la consolidation du marché européen ».

Le groupe n’est pas le seul à refuser d’investir dans Alitalia : ENI, Leonardo et Poste ont également affiché hier leur manque d’intérêt, après l’annonce par Ferrovie dello Stato (FS) que son conseil d’administration avait approuvé un investissement – sans plus de précision. Selon un consultant cité par Times of Malta, Alitalia a coûté près de 10 milliards d’euros aux contribuables italiens au cours des 20 dernières années, « soit plus que la capitalisation boursière d’Air France-KLM, Turkish Airlines, Norwegian, Finnair et SAS »…

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