De nombreux vols de la compagnie aérienne Air Malta ont été retardés hier par un mouvement de grève surprise des pilotes, officiellement sur des problèmes de conditions de travail mais aussi suite au lancement par la low cost Ryanair d’une nouvelle filiale basée dans l’île méditerranéenne, Malta Air.

La plupart des pilotes de la compagnie nationale maltaise avaient voté en secret en faveur du mouvement du 1er juillet 2019, qui a retardé d’une demi-heure les départs de l’aéroport de La Valette-Luqa par exemple vers Londres, Amsterdam ou Rome. Un tribunal a déclaré illégal le mouvement lancé par le syndicat ALPA, qui reproche au gouvernement et principal actionnaire d’Air Malta de ne pas respecter les engagements de la convention collective signée en 2012, par exemple sur les horaires de travail, le manque de pilotes pendant la haute saison estivale ou la programmation des vacances. Un point en particulier est mis en avant par les grévistes : ils souhaitent que la possibilité de partir à la retraite à 55 ans avec un « package » de 700.000 euros soit garantie même en cas de disparition de la compagnie aérienne. La grève a pris fin suite au jugement, le tribunal devant examiner les faits de nouveau vendredi prochain.

Selon le syndicat de pilotes, Air Malta « semble avoir l’intention de déformer des faits incontestables, ainsi que de brosser un tableau faux et flou de la situation actuelle ». Evoquant « des mensonges flagrants et capricieux afin de couvrir l’inaptitude et la mauvaise gestion qui prévalent au sein des niveaux supérieurs de la société », ALPA accuse la compagnie aérienne de déployer « illégalement » du personnel navigant en dépit des procédures prévues, ainsi que d’être « dans l’incapacité persistante à répondre aux préoccupations relatives à la sécurité et au bien-être de ses membres ».

Un communiqué d’Air Malta souligne qu’elle a « dédié des ressources depuis des mois pour arriver à un accord » avec ses pilotes, « pour découvrir au dernier moment qu’une fois cet accord conclu il n’était pas suffisant pour satisfaire ALPA ». Le ministre maltais du tourisme Konrad Mizzi a déclaré de son côté qu’il était hors de question de « céder au chantage » des pilotes, traitant la revendication sur les retraites de « ridicule ». Et il s’est dit « convaincu qu’Air Malta continuera d’exister. Nous prévoyons de la développer. Nous discutons avec la Commission européenne au sujet des investissements dans Air Malta. Nous parlons d’une nouvelle flotte avec Airbus. Mais il n’y a qu’une façon d’y parvenir : tous les acteurs, y compris ALPA, doivent tirer dans le même sens ». Avant de rappeler que si Air Malta n’y arrivait pas, le gouvernement disposait « d’une autre compagnie, Med Air ».

Mais si les problèmes de convention collective sont bien présents dans l’esprit des pilotes, il semble que l’élément déclencheur de la grève est le lancement de Malta Air par la low cost Ryanair, officialisé le mois dernier. Six Boeing 737-800 sont désormais immatriculé sous code 9H, même si leur livrée reste la même. Son investissement devait être finalisé fin juin dans l’île méditerranéenne où elle transporte déjà 3 millions de clients par an, et où elle opère une base depuis 2010. Selon un porte-parole du gouvernement maltais cité par le Times of Malta, « nous voulions avant tout verrouiller Ryanair sur l’île, car c’est le principal transporteur, et nous avons donc un certain degré de dépendance à son égard en tant que pays ». Mais pour un officiel de la compagnie nationale cité par le même quotidien, « Malta Air frappe directement Air Malta, et il est clair que le gouvernement a des projets non écrits sur Air Malta. Cela rend évidemment les pilotes et les autres employés très tendus, ils veulent des garanties du ministre du Tourisme et du Premier ministre ». Après Ryanair elle-même, Lauda en Autriche en janvier dernier et Buzz en Pologne l’automne prochain, Malta Air sera la quatrième filiale de Ryanair Holdings.

Air Malta : les pilotes en grève après l’annonce de Ryanair 1 Air Journal