A la conférence annuelle Turkish Airlines Corporate Club qui s’est tenue le 8 octobre 2019 à Istanbul, Ilker Aycı, le président de la compagnie nationale turque, a déclaré devant 1 200 professionnels du voyage venus de 75 pays : « Nous avons construit le nouvel aéroport pour ouvrir un nouveau chapitre de l’aviation », en appuyant sur « NOUS », à propos de la nouvelle plate-forme aéroportuaire d’Istanbul.

Effectivement, le futur de Turkish Airlines et celui d’Istanbul Airport sont intimement liés. Affichant clairement son ambition de transporteur international, la compagnie nationale turque compte faire de son gigantesque hub d’Istanbul un carrefour aérien « au centre de l’aviation internationale ».  En avril dernier, elle s’est installée à Istanbul Airport au cours d’une vaste opération baptisée «The Great Move» (le grand transfert) : en l’espace d’une journée, tous ses avions ont quitté l’ancien aéroport Atatürk pour se poser à Istanbul Airport. Aujourd’hui, le nouvel aéroport d’Istanbul est pleinement opérationnel : il peut recevoir 90 millions de passagers par an et jusqu’à 200 millions de personnes d’ici 2028 -ce qui en ferait l’aéroport le plus fréquenté de la planète.

Turkish Airlines veut faire d’Istanbul Airport « la plaque tournante du monde » 1 Air Journal

@Istanbul Airport

L’ambition de Turkish Airlines est-elle réalisable ? On serait tenté de répondre par l’affirmatif -si aucun facteur externe ne l’en empêche. Tout d’abord, la compagnie nationale turque bénéficie de l’emplacement géographique de son hub, situé idéalement à Istanbul, là où « l’Orient rencontre l’Occident », pour relier l’Europe à l’Asie et à l’Afrique. En outre, la conjoncture lui est actuellement très favorable, au moment où ses concurrentes directes, à savoir les trois principales compagnies du Golfe persique, Emirates, Ethiad Airlines et Qatar Airways, connaissent toutes des difficultés financières et ralentissent leur expansion effrénée. A l’inverse, Turkish Airlines se porte plutôt bien, malgré la dévaluation de la livre turque l’année dernière. En 2018, elle a transporté 75 millions de passagers (contre 69 millions en 2017), et enregistré un chiffre d’affaires de 62,9 milliards de livres turques et un bénéfice brut de 4 milliards de livres turques (745 millions de dollars).

Entre janvier et septembre 2019, le nombre total de passagers transportés par Turkish Airlines est d’environ 56,4 millions. Sur la même période, le taux de remplissage total a atteint 81,4% : le taux des vols nationaux est de 86,4 % tandis que celui des vols à l’international est de 80,7%. Les passagers en correspondance internationale (passagers en transit) ont augmenté de 3,9%. Le volume de fret / courrier a continué sa croissance pendant les neuf premiers mois de 2019 et a augmenté de 9,6% pour atteindre un total de 1,1 million de tonnes.

Reste un risque de facteur externe, en l’occurence la politique que mène le Président turc Recep Tayyip Erdoğan, qui vient d’ordonner une offensive militaires contre les Kurdes de Syrie, alliés des Occidentaux dans la lutte contre l’État islamiste. Comment les pays voisins, l’Europe et les États-unis réagiront à terme face à l’hégémonie turque dans la région ? Pour rappel, Transaero, qui était la deuxième compagnie aérienne russe, avait mis la clé sous la porte en 2015 après les sanctions occidentales contre la Russie pour son annexion de la Crimée. Plus récemment, Qatar Airways a dû subir l’interdiction de survol imposée par une alliance de pays arabes sunnites en raison des liens du Qatar avec l’Iran chiites, ce qui a complètement chamboulé les opérations de la compagnie aérienne qatarie.

Nouvelles destinations internationales

Turkish Airlines veut faire d’Istanbul Airport « la plaque tournante du monde » 2 Air Journal

@Istanbul Airport

Pour faire d’Istanbul Airport « la plaque tournante du monde », Turkish Airlines, qui est déjà « la compagnie aérienne qui dessert le plus grand nombre de destinations dans le monde » (à ce jour 315 destinations dans 126 pays),  poursuit le développement de son réseau international. Après l’ouverture de nouvelles lignes vers Marrakech, Sharjah, Bali et Louxor en 2019, Turkish Airlines a lancé cet été ses premiers vols à destination du Mexique reliant Istanbul à Mexico et Cancun à raison de trois rotation par semaine. Depuis septembre, elle a choisi d’opérer des vols directs à destination de Hô Chi Minh-Ville et de Hanoi, au Vietnam. La compagnie nationale turque assure désormais des vols quotidiens vers Hô Chi Minh-Ville et dessert Hanoi six jours par semaine (quotidiennement à partir d’avril 2020). Elle dessert également Freetown, Samarcande, Aqaba, Krasnodar, Moroni, Banjul, et Lusaka depuis l’année dernière

Prochainement, Turkish Airlines inaugurera deux nouvelles dessertes : Rovaniemi en Finlande à partir du 5 décembre 2019, et Osaka au Japon à partir du 14 avril 2020. Elle augmentera aussi la fréquence de ses vols vers de nombreuses villes. Ainsi, les vols d’Istanbul à Muscat passeront de 7 à 10 par semaine dès le 20 décembre 2019 et ceux des villes de Tokyo et de Washington-DC passeront de 7 à 10 par semaine au mois d’avril 2020. En juin 2020, les vols d’Istanbul vers Singapour et vers Los Angeles passeront de 7 à 10 par semaine et les vols vers Kuala Lumpur de 7 à 11 par semaine.

En France, Turkish Airlines vient d’ajouter Strasbourg à son réseau. Elle dessert désormais sept grandes villes françaises et souhaite davantage s’imposer sur le marché français en gardant six vols par jour au départ de Paris-CDG, des vols quotidiens depuis Lyon et maintenant Toulouse, même en hiver. Egalement, le nombre de vols entre l’aéroport Sabiha Gokçen (le deuxième aéroport d’Istanbul) et Paris-CDG passera de 5 à 7 vols à partir du 3 décembre 2019.

400 appareils en 2021

Turkish Airlines veut faire d’Istanbul Airport « la plaque tournante du monde » 3 Air Journal

©Boeing

Pour atteindre son objectif, Turkish Airlines prévoit de passer sa flotte actuelle de 343 appareils à 400 pour transporter 120 millions de passager en 2021. Aussi, elle a commandé 92 nouveaux Airbus A321neo et 65 Boeing 737 MAX 8 pour renouveler sa flotte court et moyen-courrier, 25 Boeing 787-9 Dreamliner et 25 Airbus A350-900 (plus cinq exemplaires de chaque type en option) pour son réseau long-courrier.

Le premier Dreamliner lui a été livré en juin dernier, et le premier A350 devra être livré au premier semestre 2020. La compagnie turque attend avec impatience l’arrivée de ces nouveaux long-courriers pour pouvoir lancer de nouvelles routes. Pour exemple, la liaison Istanbul-Sydney, annoncée l’année dernière, est toujours en attente, faute d’appareils disponibles. Au niveau du moyen-courrier, Turkish Airlines, comme d’autres compagnies aériennes, est pénalisée par le Boeing 737 MAX : ses 24 déjà reçus sont cloués au sol, ce qui l’oblige à opérer régulièrement des gros-porteurs A330 ou 777 sur des lignes moyen-courriers. 

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