L’EASA puis la CAA ont à leur tour annoncé hier la levée de l’interdiction de vol des Boeing 737 MAX dans leurs espaces aériens respectifs, avec le soutien des pilotes du vieux continent. Après les USA, le Brésil et le Canada, mais en attendant une décision de la Chine.

Comme prévu malgré un passage de dernière minute devant le Parlement européen sensible au point de vue des familles de victimes, l’Agence européenne pour la sécurité aérienne (EASA) a annoncé le 27 janvier 2021 avoir  levé son interdiction de vol des monocouloirs remotorisés de Boeing, prise en mars 2019 après deux accidents ayant fait 346 victimes chez les compagnies aériennes puis Ethiopian Airlines. Les conditions de ce retour en service des 737 MAX, précisées en novembre dernier, ont été résumées dans un communiqué de l’agence : « un ensemble de mises à niveau logicielles, de retouches du câblage électrique, de vérifications de maintenance, de mises à jour du manuel d’exploitation et de formation de l’équipage qui permettront à l’avion de voler en toute sécurité dans le ciel européen » après presque deux ans d’immobilisation au sol.

Le directeur exécutif de l’EASA Patrick Ky a évoqué hier « une étape importante franchie sur une longue route » : suite à une analyse approfondie de l’agence, « nous avons déterminé que le 737 MAX peut être remis en service en toute sécurité. Cette évaluation a été réalisée en toute indépendance de Boeing ou de la Federal Aviation Administration (FAA) et sans aucune pression économique ou politique », insiste le dirigeant qui avait promis encore plus d’indépendance aux députés français. « Nous avons posé des questions difficiles jusqu’à ce que nous ayons des réponses, et avons poussé pour des solutions qui répondent à nos exigences de sécurité rigoureuses », explique-t-il, rappelant que l’EASA a effectué ses propres essais en vol et sessions sur simulateur ; « nous ne nous sommes pas appuyés sur d’autres pour le faire à notre place ». Les détails de la directive 2021-0039 sont disponibles ici.

Le directeur de l’Agence souligne en outre que le travail n’est pas terminé pour autant : « Permettez-moi d’être tout à fait clair, ce voyage ne s’arrête pas là. Nous sommes convaincus que l’avion est sûr, ce qui est la condition préalable pour donner notre approbation. Mais nous continuerons de surveiller de près les opérations du 737 MAX quand l’avion reprendra du service. En parallèle, et sur notre insistance, Boeing s’est également engagé à travailler pour améliorer encore davantage l’avion à moyen terme, afin d’atteindre un niveau de sécurité encore plus élevé » (par la présence d’une troisième sonde AOA, synthétique, qui sera de série dans tous les futurs MAX 10 et rétrofittée dans les autres modèles).

Sans surprise non plus mais de façon légalement obligatoire depuis le Brexit, la CAA britannique (Civil Aviation Autority) a annoncé à son tour hier la levée de l’interdiction de vol des 737 MAX. Avec globalement les mêmes exigences que son homologue européen, et en précisant qu’elle est en « contact étroit » avec TUI (seul opérateur britannique de l’avion à ce jour) pour la remise en service de ses monocouloirs remotorisés : « dans ce cadre, nous aurons une surveillance complète des plans de la compagnie aérienne, y compris ses programmes de formation des pilotes et la mise en œuvre des modifications d’aéronefs requises ».

Boeing 737 MAX : feu vert en Europe et au Royaume Uni 2 Air Journal

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Côté pilotes, le syndicat européen ECA (European Cockpit Association) a salué hier la décision et le « processus plus transparent et rassurant » de l’EASA, avec qui il a travaillé pendant 18 mois pour « s’assurer que la perspective opérationnelle des pilotes de ligne est bien reflétée dans le processus d’examen ». Les raisons qui ont conduit à l’immobilisation au sol du Boeing 737 MAX « étaient un exemple clair des dangers quand la pression commerciale l’emporte sur les considérations de sécurité dans l’industrie aéronautique », a déclaré dans un communiqué Otjan de Bruijn, président d’ECA. « Outre les leçons techniques, la débâcle du MAX est certainement un rappel précieux sur l’importance des signes avant-coureurs de sécurité et de l’approche de précaution, ainsi que sur l’importance de trouver le juste équilibre entre coût et sécurité », a-t-il ajouté.

L’agence européenne « n’a pas hésité à imposer du temps dans le simulateur pour les pilotes, et des changements qui vont au-delà de la simple formation MCAS », souligne de son côté  Tanja Harter, directrice des affaires techniques de l’ECA. Désormais, avant d’être programmé pour voler, chaque pilote de 737 MAX doit suivre un module de formation de retour en service spécifique ; « à l’avenir, les pilotes de ligne devraient être davantage impliqués, apportant leur expertise opérationnelle dans la conception et les essais de nouveaux avions ».

Rappelons que si aucun 737 MAX n’est en service ou commandé en France, 723 ont été acquis par les compagnies aériennes européennes, dont 55 étaient entrés en service en mars 2019 chez Norwegian Air Shuttle, TUI fly, LOT Polish Airlines, Enter Air, Icelandair et Turkish Airlines (plus Air Italy aujourd’hui disparue). Le meilleur client, la low cost Ryanair avec 210 commandes de 737 8-200 mais aucun livré, pourrait les déployer au début du deuxième trimestre chez sa filiale polonaise Buzz.

 

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