La Cour d’appel de Paris juge de nouveau la compagnie aérienne low cost Ryanair pour travail dissimulé, dans l’affaire entourant sa base de Marseille entre 2007 et 2010.

Les 10 et 11 mars 2022, la spécialiste irlandaise du vol pas cher va de nouveau présenter ses arguments devant la Cour d’appel contre les accusations de « travail dissimulé par absence de déclaration préalable à l’embauche, entraves aux institutions représentatives du personnel, prêt de main d’œuvre illicite », et également selon le SNPL « en raison de la fraude organisée à la législation européenne en matière de paiement des cotisations sociales » entre 2007 et 2010, pour son personnel navigant basé à l’aéroport de Marseille-Provence.

Ces fraudes avaient valu à Ryanair d’être condamnée en 2014 pour non-respect du code du travail français par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avec à la clé une amende de 200.000 euros pour travail dissimulé et 8,1 millions d’euros de dommages et intérêts à verser aux parties civiles (URSAAF, Caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l’aéronautique civile, Pôle Emploi, syndicats professionnels et quatre anciens pilotes).

Poursuivie pour avoir employé 127 salariés sous contrat de travail irlandais, sans cotiser donc auprès des organismes sociaux ou se déclarer au fisc français, et prêt illicite de main d’œuvre (PNC employés par des sociétés irlandaises tierces). Ryanair a toujours mis en avant le droit européen (entreprise irlandaise et avions irlandais, donc contrat de travail irlandais). 

Mais en raison d’une jurisprudence européenne, la Cour de Cassation avait cassé l’arrêt en 2018, renvoyant l’affaire devant la Cour d’appel de Paris – dont les travaux ont été retardés par la pandémie de Covid-19.

Selon le syndicat de pilotes, cette audience « est importante car elle sera l’occasion pour la Cour d’appel de trouver un juste équilibre entre le respect de l’application des principes procéduraux posés par la CJUE et la nécessité absolue de lutter contre et de condamner toute fraude avérée aux législations sociale et du travail, le non respect des droits des salariés et la concurrence déloyale envers les autres compagnies aériennes, qui elles respectent les législations européenne et française applicables ». 

L’enjeu de ce réexamen de l’affaire est également important pour la CRPN et pour l’URSSAF, qui en cas de victoire de Ryanair pourrait être obligées de rembourser les dommages et intérêts perçus, « simplement en raison d’une procédure peu claire à l’époque des faits et déterminée a posteriori par la CJUE, alors que la fraude est avérée », souligne le SNPL.

Enfin, ce dossier sera aussi l’occasion pour la Cour d’appel de Paris de se prononcer sur le droit au recours effectif des pilotes « et de leur organisation syndicale qui n’ont jusqu’à présent aucun moyen direct de se faire entendre dans la procédure préalable entre les organismes de sécurité sociale qui est ainsi exigée par la CJUE. De même, ni les pilotes ni une organisation syndicale ne peuvent contraindre l’URSSAF à initier ce processus pour voir leurs droits respectés ». Le syndicat reproche au passage à la CJUE de n’avoir jamais abordé ce sujet « alors même qu’il s’agit d’un droit fondamental et d’une liberté publique garantis par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme ».

Le SNPL « place beaucoup d’espoir dans l’issue de cette procédure » lancée aujourd’hui, tout en reconnaissant que Ryanair « a depuis changé un certain nombre de ses pratiques et a ouvert de nouvelles bases en France » : l’ensemble des faits reprochés il y a plus d’une décennie « doivent être définitivement condamnés, et les personnels navigants doivent se voir reconnaître leurs droits ».

Travail dissimulé : Ryanair de nouveau devant les juges 1 Air Journal

©Ryanair