En mars, l’avionneur chinois COMAC a dévoilé les plans du C949, un avion de ligne supersonique d’une vitesse de Mach 1,6 (1 960 km/h), conçu pour voler beaucoup plus loin et plus silencieusement que le Concorde.

Propulsé par deux turboréacteurs à double flux, le C949 sera doté d’un fuselage à forme variable, avec un nez allongé et une section médiane incurvée pour atténuer les ondes de choc. Il bénéficiera d’une autonomie de 50 % par rapport au Concorde (11 000 km contre 7 200 km) tout en réduisant le bang sonique à 83,9 PLdB (niveau de pression acoustique perçu). En revanche, il transportera seulement entre 28 et 48 passagers en classe Affaires, beaucoup moins que les 100 sièges du Concorde, pour relier Shanghai à Los Angeles sans escale en environ cinq heures à sa vitesse supersonique, à l’horizon 2049.

Le programme C949 est-il faisable ?
L’avionneur chinois COMAC (Commercial Aircraft Corporation of China) a déjà démontré sa capacité à développer et commercialiser le C919, un avion moyen-courrier qui concurrence les Airbus A320 et Boeing 737. En 2024, le C919 a capté environ 25 % des commandes mondiales de moyen-courriers, principalement auprès des compagnies aériennes chinoises. Cette expérience, bien que récente, montre que COMAC dispose d’une base industrielle et de ressources financières soutenues par l’État chinois, ce qui est crucial pour un projet aussi complexe qu’un avion supersonique.

COMAC prévoit les premiers vols du C949 autour de 2049, un calendrier éloigné qui laisse du temps pour le développement technologique, notamment en matière de moteurs à faible consommation et de matériaux avancés. La Chine investit massivement dans l’aéronautique, comme en témoigne le développement de moteurs hypersoniques (pouvant atteindre Mach 16 dans le domaine militaire ou spatial).

Défis technologiques
Bien que les spécifications soient impressionnantes, elles reposent sur des études préliminaires et non sur des prototypes testés. La réduction du bang supersonique à 83,9 PLdB, par exemple, est ambitieuse mais difficile à valider sans essais réels. Le Concorde produisait un bang de 110 PLdB, et même des projets avancés comme le X-59 de la NASA (Mach 1,4, 75 PLdB) sont encore en phase expérimentale.

Malgré les progrès de COMAC, le moyen-courrier C919 repose sur des composants occidentaux (moteurs, avionique). L’avion supersonique C949 nécessitera des technologies encore plus avancées, et il n’est pas clair si la Chine peut les développer seule ou si elle devra jongler avec les restrictions commerciales et industrielles, notamment avec les États-Unis et l’Europe.

Les annonces autour du C949, relayées par des médias aux ordres du pouvoir communiste de Pékin, pourraient être amplifiées pour des raisons politiques, visant à projeter l’image d’une Chine technologiquement dominante face aux Etats-Unis. Les comparaisons flatteuses avec le Concorde (par exemple, “50 % d’autonomie en plus”, “silence de cathédrale”) doivent être prises avec prudence, car elles émanent uniquement de sources proches de COMAC ou de l’État chinois.

Réalité industrielle chinoise
Bien que la Chine ait les moyens financiers et politiques pour soutenir un tel projet, l’écart entre un concept académique annoncé en mars 2025 et un avion opérationnel est immense. Le Concorde, développé par des nations aéronautiques établies (France et Royaume-Uni), a pris plus de 10 ans à être opérationnel et a souffert de problèmes économiques et environnementaux. COMAC, malgré ses progrès, n’a pas encore l’expérience d’un tel défi.

Le calendrier de 2049 coïncide avec le centenaire de la République populaire de Chine, ce qui pourrait indiquer une dimension symbolique plus que technique. Cela donne à COMAC une marge de manœuvre pour surmonter les obstacles, mais cela rend également le projet difficile à évaluer à court terme. A son stade initial, le C949 est davantage un concept prometteur qu’un projet abouti.