Un décret publié dimanche au Journal officiel impose désormais aux contrôleurs aériens de pointer par biométrie lorsqu’ils prennent leur service.

La mesure, présentée par le ministère des Transports comme une garantie de « sécurité », répond directement aux critiques formulées après un incident grave survenu en décembre 2022 à Bordeaux, où deux avions avaient failli se percuter. L’enquête du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) avait alors dénoncé dans un rapport une organisation défaillante dans la gestion des effectifs de la navigation aérienne en raison de l’absentéisme des contrôleurs. Le texte crée un traitement automatisé de données personnelles baptisé SPS (« Système de vérification de la présence sur site »), qui servira à contrôler de manière incontestable la présence des contrôleurs dans leurs salles de contrôle. « Cette décision traduit une volonté de renforcer la fiabilité et la transparence du système », a fait savoir le ministère dans un communiqué. La CNIL a déjà validé le principe de recours à la biométrie.

Le système, qui va pouvoir désormais être mis œuvre, sera opérationnel dans les principaux centres d’ici la fin de l’année, conformément au calendrier prévu.

L’affaire de Bordeaux n’est pas un cas isolé. Dès 2010, la Cour des comptes avait dénoncé comme « inacceptable » l’opacité du système officieux d’autorisations d’absences pratiqué dans le contrôle aérien. Dans les faits, il revenait aux chefs d’équipe de libérer certains agents lors des périodes de faible trafic, sans que ceux-ci soient officiellement considérés en repos ou en formation. Cette pratique, qui échappait à toute traçabilité, avait pour effet de réduire ponctuellement la capacité opérationnelle des centres de contrôle.

Le décret de septembre 2025 s’inscrit donc dans une volonté plus large de sécurisation et de modernisation du contrôle aérien français, un secteur souvent pointé du doigt pour ses rigidités corporatistes et ses grèves récurrentes. Entre 2010 et 2020, la France cumulait près de la moitié des jours de grève des contrôleurs aériens en Europe selon l’association Airlines for Europe (A4E), ce qui avait coûté plusieurs centaines de millions d’euros aux compagnies aériennes et perturbé des millions de passagers.

Si le ministère insiste sur l’aspect sécuritaire de la réforme, les syndicats de contrôleurs dénoncent déjà une « surveillance généralisée » et une remise en cause de la confiance accordée au personnel. Ils rappellent que le corps des aiguilleurs du ciel constitue une profession hautement qualifiée, indispensable à la sécurité aérienne, et craignent que cette mesure ne fragilise encore davantage un climat social déjà tendu après les grèves de 2023 et 2024 sur la réforme des retraites et des conditions de travail.

Le ministre des Transports, déterminé à faire appliquer ce dispositif biométrique, affirme quant à lui qu’il s’agit d’une avancée nécessaire pour éviter que ne se reproduisent des incidents comme celui de Bordeaux. « La sécurité des passagers prime sur tout », martèle-t‑il.

Contrôleurs aériens : le pointage par biométrie officialisé 1 Air Journal

@AJ